A l'oeilJe me suis sorti un oeil pour mieux voir
et je l'ai lancé pour encore mieux voir de près. Il a suivi la ligne de mire et je l'ai vu qui se rapprochait de l'écorce du tronc d'arbre.
Il l'a contournée.
J'ai jeté un oeil, l'autre.
Et je n'y ai plus vu que du feu, tout noir.
J'ai repris mon oeil en tâtonnant,
Juste à temps pour voir l'autre se faufiler
autour de l'écorce.
Il avait pris le parti de l'arbre
contre l'écorce et je ne l'ai pas supporté..
Moi, je hais les arbres sans écorce,
Je n'aime pas écorcer l'écorce,
même à l'oeil..
Les Corses écorcent l'écorce des chênes lièges
Ils sont tout nus, rouges et tristes..les chênes..
Je n'aime pas, ça a failli me rendre aveugle,
Et ça fait pleurer les termites
Qui vivent, aiment, meurent là -dedans.
Dans l'écorce et à l'oeil aussi..
J'ai senti alors un choc.. comme un coup... d'oeil.
C'était le mien qui, après avoir orbité autour de l'arbre, était aller s'incruster
Comme dans une orbite
Dans un noeud du bois de l'arbre, là où il n'y a pas d'écorce, et qui se vengeait de mon abandon.
Je me suis dit qu'il y avait beaucoup de coups d'yeux dans cette affaire
Et j'ai ramené tendrement mon oeil à la maison.
L'autre aussi.
Et puis je me suis assis, j'ai posé mes deux yeux sur mes genoux
Et je les ai regardé pleurer.
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Avec mes amitiés
Alain
Pour voir mon site : Mes vers à moi
""A la cour, mon cher fils, l'art le plus nécessaire
N'est pas de bien parler, mais de savoir se taire !""
(Voltaire)