Oh, douce nature en fête,
Tu pares ta mature tête
De draperies immaculées,
Légères soieries gonflant leurs traits
Sous le souffle puissant du vent;
Leur tendre, volubile amant.
Les tristes linteaux montagneux
Sortent de leurs manteaux neigeux
Pour se vêtir de champs vivants
Auxquels se mêle le chant des enfants.
Ta lymphe se gorge d'onde,
Parcourant la terre blonde,
Eveille les temples forestiers
Où le temps s'était arrêté.
Viens l'éclosion des passions,
Des brassées de fleurs en lampion:
Léthéennes roses aux bas de laine,
Eclat de soleil sur nos plaines !
Les tapis soyeux, amoureux
Se teintent de jacinthes bleues,
De clochettes aux têtes mordorées
Renaissantes dans les sentes des prés.
Oh, musique immortelle
Qui embrasse le monde telle
Proserpine embrassant l'épine
De ses douces lèvres divines.
Les faunes déposent la rosée
Sur l'oreiller des oiselets,
Nouent la mousseline églantine,
Caressent la couche des ceps de vignes.
Dionysos couronné de lierre
S'endort sur un lit de pierre
Laissant Titania reine des bois.
Les elfes aux doigts délicats
Libèrent l'aura des essences,
Oh, multiples enivrances !
C'est l'heure de la fleur de l'amour,
Le leurre des poètes toujours.
Les guirlandes de nouvelles amandes
Ploient, vibrent comme des cordes qui se tendent.
Leur harmonie fuit dans la nuit
Unie aux mille bruits de la vie.
Des vagues de senteurs pleurent
S'échouant sur les plages des cœurs !
----------------
je suis fait de l’univers et l’univers est fait de moi.