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     Écriture automatique ou automatisme d'Ă©criture ? (Essai)
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Expéditeur Conversation
ARobert13
Envoyé le :  28/4/2022 19:44
Plume de platine
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De: Marseille
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Écriture automatique ou automatisme d'écriture ? (Essai)

ÉCRITURE AUTOMATIQUE OU AUTOMATISME D' ECRITURE

ESSAI

A. LEROI-GOURHAN a situé les origines de l'écriture vers 50 000 ans avant notre ère pour le moustérien évolué (incisions régulièrement espacées dans la pierre ou dans l'os) et vers 30 000 avant notre ère pour l'aurignacien (figures gravées ou peintes.) Vers 20 000 ans la figuration graphique devient courante, et vers 15 000 ans elle atteint une maîtrise technique presque égale à celle de l'époque moderne.

Les graphismes couramment appelés "pictogrammes" sont la première grande invention de l'homme dans le domaine de l'écriture ; il s'agit plutôt d'un type "spatial d'écriture" et certaines de ces écritures évolueront soit vers la linéarité phonétique, soit vers des alphabets, reproduisant, plus ou moins, le phonétisme (par opposition aux autre domaines : morphologie, syntaxe, lexique et sémantique) et la linéarité de la chaîne parlée.

Le terme d'écriture est utilisé, de nos jours, en des sens différents pour la poétique, cette poétique qui échappe aux lois des grammairiens, tout en faisant un usage intensif de la richesse née de sa grande variété dans les allitérations, éléments indispensables des possibilités expressives dont les sons, les mots et les images sont une gamme merveilleuse, modulable à l'infini.

Comme le soulignait G. GENETTE, l'essence même de la langue est fondée, d'après les prémisses de la linguistique, sur un jeu de différences et d'espacements, sur ce que l'écriture, elle-même, appelle techniquement : les pleins et les déliés. Dans un sens plus large, le terme d écriture nous renvoie à toute une réflexion théorique dont Roland BARTHES la définit en opposition à la notion de "style", comme une manière d'utiliser le langage qui est propre à l'écrivain, c'est-à-dire un langage réfléchi créé par et pour le texte, voulant signifier par là-même que l'écrivain, le poète, s'individualise clairement parce qu'il s'engage dans le choix général d'un ton, d'un éthos. Il contredit, ainsi, la doctrine mise en avant par les surréalistes qui étaient censés mettre en avant un système de création dont l'écrivain éventuel est en relation avec son inconscient sous la dictée de l'inconscient-inspiration et qui, selon A. BRETON, serait la "recette" de l'écriture automatique.

Le terme d’écriture, de nos jours, est utilisé en des sens différents pour la « poétique ». C’est d’abord au sens strict et premier qu’il convient de faire référence à la notation graphique du langage, avec l’influence importante qu’a eue la progression prééminence de l’écrit en « matière poétique ». Elle met en valeur l’aspect visuel et « spatial » du texte basé sur un jeu de différences et d’espacements, sur ce que l’écriture elle-même appelle techniquement des pleins et des déliés. Cet acte d’écrire a été particulièrement mis en avant par les « Surréalistes », avec ce qu’on appelle « l’écriture automatique ». Ce mode de « création » était censé mettre le poète en relation avec son inconscient, sous la dictée de l’inconscient-inspiration. Le poète André BRETON affirmait (je cite) « le langage a été donné à l’homme pour qu’il en fasse un usage surréaliste ». Dès 1919, déjà, André BRETON et Philippe SOUPAULT avaient pratiqué « l’écriture automatique ». Il écrivait à l’époque : « Il m’avait paru, et il me paraît encore que la vitesse de la pensée n’est pas supérieure à celle de la parole, et qu’elle ne défie pas forcément la langue., ni même la plume qu court. C’est dans ces dispositions que Philippe SOUPAULT, à qui j’avais fait part de ces premières conclusions, et moi, nous entreprîmes de noircir du papier, avec un louable mépris de ce qui pourrait s’ensuivre littéralement ».

Une telle méthode devait se révéler comme le moyen le plus efficace pour investir l’inconscient. Dictée de la pensée en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale. Le « surréalisme » repose sur la croyance à la réalité supérieure de certaines formes d’associations négligées jusqu’alors, à la toute puissance du rêve, au jeu désintéressé de la pensée. Il tend aussi, il est bon de le signaler, à ruiner définitivement tous les autres mécanismes psychiques eet à se substituer à eux dans la résolution des principaux problèmes de la vie. Ils furent assez nombreux à adhérer à cette « vision » du langage. Outre SOUPAULT et BRETON, on peut y ajouter Paul LUARD, PRET, ARAGON, BARON, CREVEL, DESNOS, MORISE, NAVILLE, VITRAC, et tant d’autres. Il ne s’agissait pas de faire du Beau, mais de viser à la Connaissance. Une telle quête nécessitait l’exploration de l’inconscient. En tant qu’étudiants en médecine, ARAGON et BRETON, très tôt, avaient été intéressés par les découvertes de FREUD. Ils affirmaient que le but ultime du « surréalisme » était de parvenir à l’état mental de « surréalité », autrement dit à un point où l’état de veille et l’état de rêve ne soient plus perçus contradictoirement.

Toujours selon les adeptes de cette pratique d'écriture automatique, le moyen mis à la disposition de l'au-delà, permet de communiquer avec un "intermédiaire". Et celui ou celle qui tient la plume, reçoit des réponses aux signes qui lui sont envoyés. Les partisans de ces dogmes pensent que ceci doit impliquer des "dons de voyance". Autrement dit, pratiquer l'écriture automatique se résumerait à rédiger un texte dicté par des mots spontanés. Une sorte de "dictée" sans démarche créative, et où le signe précèderait le sens. Ceci, me semble cultiver du domaine de l'ambiguïté. L'homme échapperait-il à sa conscience ? BRETON, ELUARD, ARAGON, ERNST se sont donnés pour mission de saisir ce qui, en l'homme, se soustrait à la conscience, en insistant sur le fait que tout ce qui est non rationnel est pourtant bien réel dans l'activité de l'esprit humain. Ils ont accordé une grande importance à l'inconscient, au rêve et, même, à la folie.

Mais, dès 1933, cette pratique d’écriture automatique se révèle décevante : impossibilité réelle d’un tel contact avec l’inconscient, réfections des textes ainsi écrits, limites vite atteintes de tout « automatisme ». Ainsi, les « poèmes » (on devrait plutôt dire textes) nés du « fonctionnement réel de la pensée » s’ils ne sont pas si incohérents qu’on pourrait le craindre, ne sont pas plus merveilleux qu’on pourrait l’espérer.

J'aurais plutôt tendance, mais cela est une opinion personnelle, à considérer qu'en fait, ce que les psychologues désignent de nos jours, eux-mêmes, comme une "technique libératoire" permettant de faire émerger nos rêves et nos désirs de l'inconscient, alors que les parapsychologues envisagent cette technique avec l'intervention du paranormal comme effet de dissociation psychique du sujet introduit dans une nouvelle dimension, qu'il faut tout simplement ramener le "phénomène" à notre mémoire eidétique, autrement dit à la reviviscence d'une perception après un certain temps de latence. Comment ne pas alors faire le rapprochement – qui me semble plus logique – avec l'intertextualité, cet écho de mémoire dont on peut résumer, pour la limpidité du terme, et dans sa plus simple représentation, comme l'idée corroborée que tout s'appuie, en fait, en écriture, sur les bases que nul texte ne peut s'écrire indépendamment de ce qui a déjà été consigné dans notre mémoire par des écrits antérieurs, émis par d'autres auteurs et dont notre plume se nourrit, à notre insu, de tout texte qui l'a précédé. Mais de là à penser écriture automatique il y a un pas que je ne franchirai pas.

Comme le soulignait BAKHTINE : "Notre pensée ne rencontre que des mots déjà occupés, et tout mot, de son propre contexte, provient d'un autre énoncé déjà marqué par l'interprétation d'autrui".

Je laisserai donc avec leur conscience et leurs convictions les psychologues, les parapsychologues et les spirites convaincus de leurs bonnes raisons pour adopter et admettre le principe de l'écriture automatique. Ces phénomènes me faisant penser plutôt à une écriture "spéculaire" et aux quelques cas de xénoglossie, lisibles uniquement, d'après les défenseurs de la pré-connaissance ou de la rétro-connaissance , quand elle est reflétée dans un miroir. Ces phénomènes sont très proches de la graphie du trépassé que le "médium" ne connaît pas d'ailleurs, et dont aucune preuve n'a pu être apportée à ce jour.

Je pense qu'il existe plutôt un « automatisme d'écriture » qui s'acquiert grâce à une certaine dextérité cérébrale. FREGE disait d'ailleurs que "l'écriture a été à la pensée ce que la voile qui remonte le vent fut à la navigation".

L'écriture, telle que je la perçois, n'est que l'objet d'un long apprentissage, un moyen, parmi tant d'autres, d'affirmer sa personnalité. On progresse, on recule, on désapprend, et, enfin, si seulement on s'accroche, on se perfectionne vraiment. La technique doit ensuite permettre de prendre la place d'une "seconde nature". Seule une longue pratique critique permettra à l'attention de ne plus être perturbée par les codes et la procédure.

Ecrire met en jeux deux aspects : l'écriture et le style. Il en résulte l'appropriation universelle de symboles (les lettres) assemblées en signifiants (les mots). Voilà pourquoi je rejette le principe de l'écriture automatique. J'ai toujours considéré que le style est une manifestation du tempérament, de la personnalité, car, par le style l'auteur, le poète, s'identifie en tant qu'être unique, une pensée unique, une manière de communiquer, de personnaliser son message. Je suis de ceux qui considèrent que l'écriture est un automatisme acquis pendant l'enfance car de notre attitude dépendent tous les facteurs sensoriels, cognitifs, affectifs qui forgent notre personnalité. Et, pour écrire, il est indispensable d'être dans un état d'élaboration intellectuelle. Le raisonnement agit comme une association logique d'idées conduisant à une conclusion avec une visée précise. Notre cerveau participe, seul, aux stratégies de décisions graphiques.

Bien entendu, il y a le raisonnement concret et le raisonnement abstrait. Le premier doit tirer les conclusions par l'observation. Il s'agit d'une démarche d'analyse conduisant à "décomposer" un objet ou une notion en éléments simples.

Tandis que le raisonnement abstrait ne doit pas être confondu avec le phénomène de l'inconscient-inspiration, si cher à BRETON, et qui révèle l'impossibilité d'un tel contact avec l'inconscient, réfections des textes ainsi écrits où les limites de tout automatisme sont vite atteintes, mais bien interprété comme un mode de travail "personnel" consistant à rassembler des prépositions séparées en une préposition unique, si je puis m'exprimer ainsi.

Il s'agit d'un choix des moyens en fonction des valeurs et des concepts sous-jacents. La fonction de l'écrivain me semble se justifier par le fait que, contrairement à la dite écriture automatique dont l'auteur ne corrige jamais sa copie, et en considérant que l'écriture peut mieux se contrôler que la parole, il est indispensable de réécrire, de modifier, de policer, de perfectionner afin d'arriver à l'exploitation de ces possibilités sans lesquelles n'existerait ce qui fait la richesse stylistique et la spécificité de l'écrit.

Pour résumer, et en d'autres termes, tout en me gardant bien de vouloir convaincre les inconditionnels de l'écriture automatique, je dirai que le potentiel créatif de l'écriture provient de la main et de l'œil, ce qui donne une valeur unique au processus de l'écriture, c'est la lecture simultanée de ce que l'on écrit.

ANDRÉ



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Citation :

La poésie se nourrit aux sources de la prose et s'embellit au concerto des mots. (André LAUGIER)


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