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     Le chant Royale ...Fiche de Mohammed ZeĂ®d
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Expéditeur Conversation
dolores
Envoyé le :  5/2/2022 11:36
Mascotte d'Oasis
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De: france : 06 Alpes-Maritimes
Envois: 34142
Le chant Royale ...Fiche de Mohammed Zeîd
Chant Royal - Le chant royal Chant-royal-gif-3498d41

I?DĂ©finition et historique
? Le chant royal est une ancienne pièce de poésie française inventée au XIVe et cultivée avec faveur jusqu’au XVIe siècle.( wikipédia)

?Il fut d'usage principalement lors des concours organisés à partir de 1486, à Rouen, Caen°, Toulouse. [...] Le chant royal étant une sorte de « super-ballade » à cinq strophes au lieu de 3 pour la ballade, il était la forme noble par excellence, proche des cansos des troubadours. [...] Le refrain (qui était proposé par le gagnant du concours d'une année qui prenait le titre de "roi" ou "prince" aux participants de l'année suivante qui devaient lui adresser "les envois" de leurs poèmes) fut librement choisi par les poètes, à partir de 1512. Wikipedia
° Caen ? Voir Puy de Palinods à caen

?Certains poètes du XIXè siècle, dont Th. de Banville °, ont compoisé des chants royaux en s'écartant de la thématique religieuse qui était l'une des spécificités de ce genre.
° Th. de Banville ? Voir exemple 3


II?Composition et formule
? Il s’agit d’un poème à forme fixe, proche de la ballade mais d’une longueur importante :
? Le vers utilisé est le décasyllabe°.
? Cinq strophes de onze vers suivant le schéma de rimes suivant : A-B-A-B-B-C-C-D-E-D-E*.
? Le onzième vers, qui doit être féminin, fait office de refrain. (Il est le même à la fin de toutes les strophes, envoi compris).
?Un sixième couplet (final) comprend 5 vers (quintil) suivant le schéma de rimes suivant : D-D-E-D-E* ;
? Ce couplet final peut être une strophe de sept vers (septain) selon le schéma suivant : C-C-D-D-E-D-E*
? Ce sixième couplet, appelé envoi, se termine par le refrain. (E* )
?Le poème compte, au total, ( 5x 11) +5 = 60 vers, ou ( 5x 11) + 7 = 62 vers.
?Certains ont composé l'envoi en six vers (voir Chant royal de Pierre Gringoire)
=> L'astérisque indique le vers refrain.
° Le décasyllabe est un vers à deux coupes : 4+6 ou 6+4 ou 5+5

? Le chant royal tient son nom de la difficulté inhérente à sa composition : longueur importante et nombre de rimes identiques. La matière du chant royal était à l’origine allégorique° ou satirique° : Eustache Deschamps dépeint, dans sa Chanson Royale, des animaux se plaignant d’être tondus de trop près par un barbier (représentant les percepteurs royaux). Réduits à la misère, les animaux errent en répétant ce refrain :
Pour ce, vous pri, gardez-vous des barbiers. wikipedia

° Allégorique = Qui utilise l'allégorie ? Mode d'expression consistant à représenter une idée abstraite, une notion morale par une image ou un récit où souvent (mais non obligatoirement) les éléments représentants correspondent trait pour trait aux éléments de l'idée représentée.Trésor de la langue française
° Satirique = Qui appartient au genre de la satire ? Œuvre en vers dans laquelle le poète tourne en dérision les défauts et les vices d'une personne (souvent en la nommant), d'une société, d'une institution...Trésor de la langue française-A2b

III?Exemples

1?Chant royal de l'arbre de vie
? Par Guillaume Dubois, dit Crétin, poète français né vers 1460 et mort en 1525.
Chant Royal - Le chant royal Guillaume-cretin-3498e64

?Premier onzain

Le maistre ouvrier en vraye agriculture
Planta jadis au terrestre verger
Arbres plusieurs, de fruict et floriture
Belles a veoir et doulces a manger ;
Dont ordonna une fructueuse ente
De ses clozier et cloziere estre exempte
Du fruict cueillir ; mais le serpent hideux
Si fort souffla qu'en mangerent tous deux,
Soulz fainct blazon de parole fardee ;
Pour ce fut veue a l'occasion d'eux
L'arbre de vie en tout temps bien gardee

? Formule globale : ABABCCDDEDE*
? Formule d'après le genre des rimes : fmfmffmmfmf*
? Le poème est composé sur 5 rimes différentes.
? Un mĂŞme vers (E*) finit toutes les strophes, envoi compris.
? Le vers servant de refrain est féminin. (C'est obligatoire !)

?Les 4 onzains qui suivent sont bâtis selon le même schéma que le premier.

L'arbre touchee avoit telle nature
Que la science aprenoit de leger
Du bien et mal, et par coup d'avanture
Faisoit la vie au mangeant abreger ;
Mais se l'homme eust en pensee innocente
Gardé justice originelle absente,
Au mesme instant qu'en desir convoiteux
Gousta le fruict deffendu, fort piteux,
N'eust sa fortune en tel point hazardee ;
Car il avoit pour repas non doubteux
L'Arbre de Vie en tout temps bien gardee.

Moult différente est l'arbre en nourriture
A celle ayant goust de mortel danger,
Elle preserve ung corps de pourriture,
Et vivifie en tout sans rien changer ;
Elle a vertu si grande et excellente,
Que ne l'actaint froidure violente
Grésil, frimas, gresle, vent despiteux,
Divers oraige estrange et hazardeux
N'ont la beauté de son tainct blasfardee ;
Mais fut et est pour humains souffreteux
L'Arbre de Vie en tout temps bien gardee.

Le cherubin du verger ayant cure
Garde tousjours celle arbre endommager ;
Glayve trenchant et ardente closture
Font de ce lieu tous perilz estranger.
Or entendons, Eve est l'arbre dolente,
Marie aussi celle très redolente* ;
L'une a porté germe deffectueux,
Et l'autre si très digne et vertueux
Que par luy fut paix au monde accordee ;
Dont bien se nomme, a tiltre sumptueux,
L'Arbre de Vie en tout temps bien gardee.

Le Createur voulant sa creature
Du fyer dragon plutonique venger,
L'arbre a gardee entiere sans fracture,
Et mal n'y sceut loy commune exiger ;
Corruption d'originelle sente
Onc n'encourut, et fault que d'elle on sente
Racyne, tyge et branches vers les cieux
Estre exaltez, sans ce qu'aer vicieux
Ayt la vertu de sa fleur retardee ;
Veu qu'a produit fruict sur tous précieux,
L'Arbre de Vie en tout temps bien gardee.

? L'envoi est de cinq vers construits selon la formule : DDEDE*

Prince du puy, ne soions soucieux,
Fors d'humble bouche et cueur devocieux
Tenir la Vierge, en concept regardee,
Estre en despit des faulx seditieux
L'Arbre de Vie en tous temps bien gardee.


2?Monsieur Coquardeau? de

Théodore de Banville, poète, dramaturge et critique français né le 14 mars 1823 et mort le 13 mars 1891.
Chant Royal - Le chant royal Banville-3499042

?Premier onzain

Roi des Crétins, qu’avec terreur on nomme,
Grand Coquardeau, non, tu ne mourras pas.
Lépidoptère en habit de Prudhomme,
Ta majesté t’affranchit du trépas,
Car tu naquis aux premiers jours du monde,
Avant les cieux et les terres et l’onde.
Quand le métal entrait en fusion,
Titan, instruit par une vision
Que son travail durerait la semaine,
Fondit d’abord, et par provision,
Le front serein de la BĂŞtise humaine.

? Formule globale : ABABCCDDEDE*
? Formule d'après le genre des rimes : fmfmffmmfmf*
? Le poème est composé sur 5 rimes différentes.
? Un mĂŞme vers (E*) finit toutes les strophes, envoi compris.
? Le vers servant de refrain est féminin. (C'est obligatoire !)

?Les 4 onzains qui suivent sont bâtis selon le même schéma que le premier.
On t’a connu dans Corinthe et dans Rome,
Et sous Colbert, comme sous Maurepas.
Mais sur tes yeux de vautour Ă©conome
Se courbait l’arc d’un sourcil plein d’appas,
Et le sommet de ta tĂŞte profonde
A resplendi sous la crinière blonde.
Que Gavarni tourne en dérision
Tes six cheveux ! Avec décision
Le démêloir en toupet les ramène :
Un Dieu scalpa, comme l’Occasion,
Le front serein de la BĂŞtise humaine.

Tu te rêvais député de la Somme
Dans les discours que tu développas,
Et, beau parleur grâce à ton majordome,
On te voit fier de tes quatre repas.
Lorsqu’en s’ouvrant ta bouche rubiconde
Verse au hasard les trésors de Golconde,
On cause bas, Ă  ton exclusion,
Ou chacun rĂŞve Ă  son Ă©vasion.
Tu n’as jamais connu ce phénomène ;
Mais l’ouvrier doubla d’illusion
Le front serein de la BĂŞtise humaine.

Comme Pâris tu tiens toujours la pomme.
Dans ton salon, qu’ornent des Mazeppas.
On boit du lait et du sirop de gomme,
Et tu n’y peux, selon toi, faire un pas
Sans qu’à ta flamme une flamme réponde.
Dans tes miroirs tu te vois en Joconde.
Jamais pourtant, cœur plein d’effusion,
Tu n’oublias ta chère infusion
Pour les rigueurs d’Iris ou de Climène.
L’espoir fleurit avec profusion
Le front serein de la BĂŞtise humaine.

A ton café, tu te dis brave comme
Un Perceval, et toi mĂŞme Ă©charpas
Le rude Arpin ; ta chiquenaude assomme.
Lorsque tu vas, les jambes en compas,
On croirait voir un héros de la Fronde,
Ou quelque preux, vainqueur de Trébizonde.
Mais, évitant avec précision
L’éclat fatal d’une collision,
Tu vis dodu comme un chapon du Maine,
Pour sauver mieux de toute lésion
Le front serein de la BĂŞtise humaine


? L'envoi est de sept vers construits selon la formule : CCDDEDE*

Prince des sots, un système qu’on fonde
A son aurore a soif de ta faconde.
Toi, tu vivais dans la prévision
Et dans l’espoir de cette invasion :
Le RĂ©alisme est ton meilleur domaine,
Car il charma dès son éclosion
Le front serein de la BĂŞtise humaine.

IV?Création de variantes

? On remarque, dans ces deux exemples, que le premier et le dernier vers sont féminins. Ceci vient du fait que le chant royal, à son début' était "religieux" et son envoi s'adressait, en particulier, à Sainte Marie. Il s'est étendu par la suite à d'autres thèmes et son envoi a dû être adressée à d'autres personnes. On peut donc changer la formule de base : ABABCCDDEDE* = fmfmffmmfmf*

? La strophe de 11 vers (onzain) a plusieurs schèmes :

1- Dans la grande ballade et le chant royal : ABABCC/DDEDE = sizain + quintil avec pause entre les deux

2- Chez les rhétoriqueurs, on trouve plusieurs formes, construites sur cinq rimes : dont la précédente (sans pause) = ABABCCDDEDE et le onzain batelé °
° Les rimes batelées s'appliquent aux vers de dix syllabes. Le dernier mot d'un vers doit rimer avec la quatrième syllabe du suivant. ; d'où le schéma :


----------------------------------------------A
--------------a-------------------------------B
--------------b-------------------------------A
--------------a-------------------------------B
--------------b-------------------------------C
--------------c-------------------------------C
--------------c-------------------------------D
--------------d-------------------------------D
--------------d-------------------------------E
--------------e-------------------------------D
--------------e-------------------------------E

Exemple : (2 vers àrimes batelées)

Quand Neptunus, puissant dieu de la mer,
Cessa d'armer carraques et galées...

3 -Les romantiques, ont essayé d'obtenir le onzain en enflant, d'un vers, un dizain à rimes plates (10 + 1)


?ex " J'étais couché dans l'ombre " de Ch. Guérin (1873- 1907)

J'étais couché dans l'ombre au seuil de la forêt.
Un talus du chemin désert me séparait.
J'écoutais s'écouler près de moi, bruit débile,
Une source qui sort d'une voûte d'argile.
Par ce beau jour de juin brûlant et vaporeux
L'horizon retenait des nuages heureux.
Des faucheurs répandus à travers la prairie
Abattaient ses remparts d'herbe haute et nourrie.
D'un coteau descendaient des voitures de foin.
Ailleurs encor c'Ă©tait une eau bleue, et, plus loin,
La ville aux toits d'azur liquides de lumière.

• Formule : AABBCCDDEEF
• La rime du dernier vers est orpheline
• On peut éviter cette rime orpheline en rimant le dernier vers avec le huitième : AABBCCDDEED

=> Dans ce cas, le premier vers doit être masculin pour que le dernier soit féminin : mmffmmffmmf*

IV? Variantes

1- Chant royal de « La plus belle qui jamais fut au monde » de Catherine d' Amboise (?-1550)

?Premier onzain

Anges, TrĂ´nes et Dominations,
Principaultés, Archanges, Chérubins,
Inclinez-vous aux basses régions
Avec Vertus, Potestés, Seraphins,
Transvolitez des haults cieux cristalins
Pour decorer la triumphante entrée
Et la très digne naissance adorée,
Le saint concept par mysteres tres haults
De celle Vierge, ou toute grace abonde,
Decretee par dits imperiaulx
La plus belle qui jamais fut au monde.

? Formule : ABABACCDEDE*
? Formule d'après le genre des rimes : fmfmffmmfmf*
? Le poème est composé sur 5 rimes différentes.
? Un mĂŞme vers (E*) finit toutes les strophes, envoi compris.
? Le vers servant de refrain est féminin.

?Les 4 onzains qui suivent sont bâtis selon le même schéma que le premier.

Faites sermons et predications,
Carmes devots, Cordeliers, Augustins ;
Du saint concept portez relations,
Caldeyens, Hebrieux et Latins ;
Roumains, chantez sur les monts palatins
Que Jouachim Saincte Anne a rencontree,
Et que par eulx nous est administree
Ceste Vierge sans amours conjugaulx
Que Dieu crea de plaisance feconde,
Sans poinct sentir vices originaulx,
La plus belle qui jamais fut au monde.

Ses honnestes belles receptions
D'ame et de corps aux beaux lieux intestins
Ont transcendé toutes conceptions
Personnelles, par mysteres divins.
Car pour nourrir Jhésus de ses doulx seins
Dieu l'a toujours sans maculle monstree,
La desclarant par droit et loi oultree :
Toute belle pour le tout beau des beaux,
Toute clère, necte, pudique et monde,
Toute pure par dessus tous vesseaulx,
La plus belle qui jamais fut au monde.

Muses, venez en jubilations
Et transmigrez vos ruisseaulx cristalins,
Viens, Aurora, par lucidations,
En precursant les beaux jours matutins ;
Viens, Orpheus, sonner harpe et clarins,
Viens, Amphion, de la belle contree,
Viens, Musique, plaisamment acoustrée,
Viens, Royne Hester, parée de joyaulx,
Venez, Judith, Rachel et Florimonde,
Accompagnez par honneurs spéciaulx
La plus belle qui jamais fut au monde.

Tres doulx zephirs, par sibilations
Semez partout roses et roumarins,
Nimphes, lessez vos inundations,
Lieux stigieulx et carybdes marins ;
Sonnez des cors, violes, tabourins ;
Que ma maistresse, la Vierge honnoree
Soit de chacun en tous lieux decoree
Viens, Apolo, jouer des chalumeaux,
Sonne, Panna, si hault que tout redonde,
Collaudez tous en termes generaulx
La plus belle qui jamais fut au monde.

Esprits devotz, fidelles et loyaulx,
En paradis beaux manoirs et chasteaux,
Au plaisir Dieu, la Vierge pour nous fonde
Ou la verrez en ses palais royaulx,
La plus belle qui jamais fut au monde.


V? Formulaire
1? ABABBCCDEDE* (5 fois) + DDEDE* ou CCDEDE* ou CCDDEDE*
? 2A - 3B - 2c - 2D - 2E ; l'envoi :3D - 2E ou 2C -2C - 2E ou 2C - 3D - 2E

2? ABABCCDDEDE* (5 fois) + DDEDE* ou CCDDEDE*
? 2A - 2B - 2C - 3D - 2E ; l'envoi : 3D - 2E ou 2C - 3D - 2E

3? ABABACCDEDE* (5 fois) + DDEDE* ou CCDDEDE*
? 3A - 2B - 2C - 2D - 2E ; l'envoi : 3D - 2E ou 2C - 3D - 2E

4? AABBCCDDEED* (5 fois) + DDEDE* ou CCDDEED*
? 2A - 2B - 2C - 3D - 2E ; l'envoi : 3D - 2E ou 2C - 3D - 2E

Note : En principe, le vers-refrain doit être féminin ; mais dès lors que certains poètes dont P.Gringoire ont opté pour un refrain masculin ; et, qui plus est, l'envoi n'est plus adressé à Sainte Marie, avec Th. de Banville qui s'était écarté de la thématique religieuse, on peut finir toutes les strophes par un même vers masculin.


-------------------------------Pour lecture-----------------------------------

? « Chant royal chrestien » de Clément Marot (1496 - 1544)
Chant Royal - Le chant royal C-marot-3498ff7

Qui ayme Dieu, son règne et son empire,
Rien désirer ne doibt qu’à son honneur
Et toutesfois l’homme tousiours aspire
A son bien propre, Ă  son aise, et bon heur,
Sans adviser si point contemne ou blesse
En ses désirs la divine noblesse
La plus grand’part appete grand avoir :
La moindre part souhaite grand sçavoir ;
L’autre désire être exempte de blasme,
Et l’autre quiert (voulant mieulx se pourvoir)
Santé au corps et Paradis à l’âme

Ces deux souhaitz contraires on peult le dire
Comme la blanche et la noire couleur ;
Car Jesuchrist ne promet par son dire
Ça bas aux siens qu’nnui, peine et douleur.
Et d’autre part (respondez moy) qui est-ce
Qui sans mourir aux Cieulx aura liesse ?
Nul pour certain. Or faut-il concevoir
Que mort ne peult si bien nous decevoir
Que de douleur nous sentions quelque dragme
Par ainsi semble impossible d’avoir
Santé au corps et Paradis à l’âme.

Doulce santé mainte amertume attire,
Et peine au corps est à l’âme doulceur.
Les bienheureux qui ont souffert le martyre
De ce nous font tesmoignage tout seur.
Et si l'homme est quelque temps sans destresse,
Sa propre cher sera de luy maistresse,
Et destruira son Ame (Ă  dire voir)
Si quelque ennuy ne vient ramentevoir
Le povre humain d'invoquer Dieu, qui l'ame,
En luy disant : Homme, penses-tu veoir
Santé au corps et Paradis à l’âme.

0 doncques, Homme en qui santé empire,
Croy que ton mal d'un plus grand est vainqueur ;
Si tu sentois de tous les maux le pire,
Tu sentirois Enfer dedans ton cueur.
Mais Dieu tout bon sentir (sans plus) te laisse
Tes petis maulx, sachant ta foiblesse
Ne pouvant pas ton grand mal percevoir
Et que aussi tost que de l’apercevoir
Tu périroys comme paille en flamme,
Sans nul espoir de jamais recevoir
Santé au corps et Paradis à l’âme.

Certes plutost un bon père desire
Son filz blessé que meurdrier, ou jureur :
Mesmes de verge il le blesse, et descire,
Affin qu'il n'entre en si lourde fureur.
Aussi quand Dieu, père céleste, oppresse
Ses chers enfans, sa grand’bonté expresse
Faict lors sur eulx eau de grâce pleuvoir;
Car telle peine à leur bien veult prévoir
A ce qu'enfer en fin ne les enflamme,
Leur réservant (oultre l'humain devoir)
Santé au corps et Paradis à l'âme.

Prince Royal, quand Dieu par son povoir
Fera les Cieulx et la Terre mouvoir,
Et que les corps sortiront de la lame,
Nous aurons lors ce bien, c'est à sçavoir,
Santé au corps et Paradis à l'âme.

• Remarques :
-Ce chant royal est composé selon la formule de base : ABABCCDDED* avec D* féminin.

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2-? Chant royal de Pierre Gringoire (1475-1539)

Considérez que guerre, l'immortelle,
Par son regard fier les courages tente ;
Dissension, héritier de cautelle,
Loge Fureur en pavillon ou tente :
Vengeance sort, laquelle essaye ou tente
De succomber ses ennemis mortels,
Remémorant qu'en guerre sont morts tels
Qui en France portent un grand dommage,
MĂŞmes perdu or, argent et alloy,
Par défaut de croire en maint passage,
Un Dieu, un Roi, une Foi, une Loi.

Guerre trépigne, et vacille et chancelle ;
Sans fin mengue, jamais ne se contente ;
Aucunes fois machination cèle
L'intention qui dut ĂŞtre patente ;
Simulateurs vont par oblique sente ;
Fraudulateurs pillent maisons, hĂ´tels ;
Biens pris, saisis, ravis, gâtés, ôtés.
Satalites font aux métaux hommage ;
Haine sonne la campane ou beffroi ;
Force ne croit, tant a cruel courage,
Un Dieu, un Roi, une Foi, une Loi.

Trahison bâtit invention nouvelle,
Feignant d'ĂŞtre morne, pensive et lente ;
Du premier coup son penser ne révèle,
Plus petite est que ciron ou que lente ;
Mais fausseté ès coeurs des seigneurs l'ente,
Si très avant qu'enfin en sont notés ;
Félonie épand de tous côtés
Glaives tranchants et en fait labouraige,
Que discord queult et attribue Ă  soi
Sans redouter, recueillant cet ouvrage,
Un Dieu, un Roi, une Foi, une Loi.

Fortune tient tous humains en tutelle,
Les plus grands fait servir par folle attente.
Vulcanus fond, Mars sans cesser martelle.
Et Midas met leurs ouvrages en vente ;
Clotho les prend, Lachesis les présente
A Atropos, et sont revisités
Par preux hardis, en la guerre usités,
Qui les livrent à gens de moyenne âge,
Les désirants plus qu'amoureux le Moy ;
Et ne craignent en soleil ou ombrage,
Un Dieu, un Roi, une Foi, une Loi.

Quand Neptunos met sur mer sa nacelle,
Que Boréas de subit soufflet vente,
Et que Pluto les autres dieux precelle,
Guerre montre sa queue de serpente ;
Si Palas n'est pour l'heure diligente
De résister à leurs férocités :
Ils font trembler palais royaux, cités,
En l'air causent frimas, Ă©clair, orage ;
Lors les soudards, qui mènent leur arroi,
Ne prisent rien, tant sont remplis de rage,
Un Dieu, un Roi, une Foi, une Loi.

Prins ce, seigneurs, ne soyez irrités
Si peine avez, car vous le méritez :
Tous malfaiteurs se mettent en servage ;
Force leur est de recevoir chastoy,
Quand s'efforcent dépriser par outrage
Un Dieu, un Roi, une Foi, une Loi.

• Remarques :
- Les 5 premiers vers sont féminins
- Le dernier vers de l'envoi est masculin.
- Formule : ABABBCCDEDE = fffffmmfmfm
- Si l'auteur de ce poème avait commencé par un vers marculin, la formule aurait été : ABABBCCDEDE* = mfmffmmfmfm*




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Chant Royal - Le chant royal Boninsp-34bb372

Fiche élaborée par

Flormed


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ARobert13
Envoyé le :  7/2/2022 18:07
Plume de platine
Inscrit le: 17/11/2021
De: Marseille
Envois: 2907
Re: Le chant Royale ...Fiche de Mohammed Zeîd

Les explications sont savoureuses de limpidité. Beaucoup de poètes s'éloignent des Dictionnaires de poétique à cause du côté assez fastidieux de la lecture. Les exemples qui sont donnés dans le cadre de ces explications en facilitent l'assimilation.

Tous les membres de "L'Oasis" ne viendront certainement pas compulser ces fiches ... mais ceux qui sont désireux d'approfondir leurs connaissances, ou de passer de la poésie libérée à la poésie classique ou néo-classque, y puiseront une mine d'or.

MERCI, Chère MARIA.

Excellente fin d'après-midi.

d'ANDRÉ


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Citation :

La poésie se nourrit aux sources de la prose et s'embellit au concerto des mots. (André LAUGIER)


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