Ellipse temporelle !
Le village est sans vie, regarde loin les plaines
Où le soleil poudroie, simple de vérité,
Fut-il le rire ici, mais aussi tant de peines
Qu’aux pavés trop usés, les trous sont excavés ?
Tarie est la fontaine, il n’est plus d’eau à boire,
Et sans doute est-ce ainsi que tout fut déserté,
Comme stèle dressée qui parle à la mémoire
Fantôme est ce village et sa vie oubliée …
Sur tombes délaissées, humiliées par l'absence,
Seule ardeur du soleil pose ses rayons blonds,
Les fĂŞlures meurtries de la pierre en souffrance
Ont laissé pousser fleurs, d’âmes en affliction.
Une arche dégradée, sous ses pierres de tailles,
Se fait soutien de ruine où les murs sans façons
Fendus, brisés, griffés laissent voir leurs entailles
Où s’engouffrent souvent, fortes pluies de saisons.
Sans bruit, et sous mes pas confondus d’allégeance
S’osmose l’atmosphère au temps qui s’écoula
Car le souffle alangui de douce résurgence
S’élève en susurrant … lointain rire en éclat !
La chaise vermoulue, sur le seuil d'une porte,
Reste clin d’œil vivant de l’émoi éthéré,
Soumise encore au rêve, au sommeil qui l’exhorte
à évoquer ce temps ravivé du passé !
L’émotion déambule et rejoint l'assonance
D'une brise en douceur venue pour caresser
L’abandon du village où prestige s’élance,
Statufié sur sa roche … en éternelle paix !
*Ellipse temporelle* où « le chant fait silence »
De tout ce minéral, vestiges écroulés,
Renvoie t’elle en ce lieu cette prière dense
Qui prend ce bel accord, d’un hymne à écouter ?
C.Chandy
En narratologie, une « ellipse temporelle », également appelée « ellipse narrative » consiste à passer sous silence une période, c'est-à -dire à ne pas en raconter les événements. Il s'agit donc d'une accélération du récit.
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« La poésie - par des voies inégales et feutrées - nous mène vers la pointe du jour au pays de la première fois.  »
de Andrée Chedid