repost du 9/7/2005 mis en page
Tu es partie
Tu es partie sans qu’on se dise un au revoir
Sans que je puisse déposer avec douceur
Sur ton front si chéri un bécot où mon cœur
T’aurait dit mon amour et ma joie de te voir.
Et pourtant, sans les mots, je sais que tu m’as vu
Que tu as entendu ce que j’ai pu te dire
Quand je te revoyais travailler et sourire
Ton sourire si clair que je ne verrai plus.
Je t’ai revue porter les lourds cageots de bois
Où pommes ou choux fleurs attendaient leur destin
Ou à ton étalage, où tes petites mains
Prenaient avec douceur des fruits de premier choix
Et tu étais patience et jamais en colère
Devant ces grandes dames que tu devais servir
Et malgré leurs grands airs, tu savais les ravir
Et par un mot gentil réussir à leur plaire
Je t’ai revue aussi affairée au fourneau
Préparer les menus que tous nous aimions tant
Les gâteaux qui fleuraient le miel et le froment
Et que nous picorions, pareils à des moineaux
Je t’ai vue fureter sur les côtes rocheuses
Haveneau à la main fouiller les goémons
Ramasser par paniers les roses palémons
Et traquer dans les baies les palourdes fouisseuses
Je t’ai revue marcher dans la forêt jolie
Ecouter les oiseaux proclamer leurs amours
Quand les jacinthes bleues au printemps font retour
Et pour te faire honneur, déroulaient un tapis
J’ai revu tout cela quand je tenais ta main
Qui ne répondait plus à mes appels pressants
Sur ton lit de douleur ton silence oppressant
Me déchirait le cœur en supplice inhumain
Ta pauvre main inerte brûlait dans mes doigts
Tes yeux ne voyaient plus, tes jolis yeux si doux
Ta bouche ne disait plus un mot. Mon bijou
Toi si vivante hier, comment étais- tu là ?
Et à la fin du jour, quand je t’ ai dit bonsoir
Je savais que jamais tu ne me reviendrais
Je savais qu’un grand livre doré se fermait
Tu es partie sans qu’on se dise un au revoir
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Science sans conscience n'est que ruine de l'âme (Rabelais)