Quand j’ai ouvert le journal
Je me suis vu dedans
Dans un carré, y’avait moi
Je n’en revenais pas
Soudainement j’étais
Quelqu’un d’important
Assez pour y mettre
Mon nom en toutes lettres
J’étais fier d’être cité
Sur ce papier imprimé
Je l’ai gardé de longues années
C’était réconfortant de savoir
Qu’un jour on a pensé à moi
Pour remplir les lignes
Des faits divers du lundi
C’était mon honneur à moi
Mais aujourd’hui, j’ai dû
Me défaire de mon héritage
Car il faut bien que je chauffe
Ma maison trop froide
C’est avec une larme
Que j’ai froissé la page
Qui m’a donné un nom
À moi, l’anonyme
À l’allumette, je l’ai flambé
L’ai regardé se consumer
Je me suis réchauffé un instant
De sa bonne odeur de dignité.
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sylvianni