Plume de platine   Inscrit le: 8/4/2017 De: Hauts-de-France Envois: 4456 |
Tom et Linda [Nouvelle] Tom et Linda
Il faisait un temps magnifique, ce matin-là , une belle journée de printemps pour tous les Parisiens. Sur le pont Alexandre III, beaucoup de monde se promenait, pour profiter du retour de la belle saison. Des jeunes sur rollers se faufilaient entre les passants, les évitant habilement. La foule, placide, ne réagissait pas, habituée sans doute. Il est vrai que la coexistence entre bipèdes à pied et bipèdes à roulettes se passait généralement de façon satisfaisante.
Pourtant, à 10 heures très précisément, alors que sonnait la grosse horloge des Invalides, il se produisit un incident malheureux. Un bolide monté sur rollers et peu stable sur ses roues frôla à le toucher un passant, un homme jeune, grand, l’air sportif, qui d’un bond, réussit à l’éviter. Malheureusement, le passant, dans le même mouvement, heurta assez violemment une jeune femme qui cheminait en sens inverse, profondément absorbée par la lecture d’un quotidien. Elle n’avait pu anticiper le choc, ne regardant pas devant elle.
- « Excusez-moi, Mademoiselle, je suis vraiment désolé ! Je voulais éviter un jeune à rollers et malheureusement, je vous ai heurtée.
- Ne vous excusez pas, Monsieur, je ne regardais pas où j'allais ! De toutes façons, ce n'est pas bien grave. J'ai juste fait tomber mon journal.
Elle le ramassa prestement. Celui-ci était taché par l'eau sale du trottoir, la pluie n'ayant pas ménagé la capitale dans la nuit. Aussitôt, le jeune homme, qui l'observait, reprit la parole.
- Je vois que votre quotidien n'est plus net du tout ! Si vous avez une minute, je vous en offrirai volontiers un autre. Je travaille justement dans ce journal comme graphiste et j’en ai plusieurs exemplaires dans mon véhicule. Je suis garé tout près.
- Avec plaisir, répondit la jeune femme en souriant. C’est mon quotidien préféré et je ne voudrais manquer pour rien au monde la rubrique « Culture ». Appelez-moi Linda, si vous voulez !
- Très volontiers, ce sera une joie ; moi-même, je suis Tom.
Les deux jeunes gens rejoignirent la voiture du graphiste. Tom tendit un exemplaire du quotidien à Linda, tout en lui parlant de ses réalisations pour le journal. Linda était très intéressée par le travail de Tom. Ce n’était pas étonnant, elle était elle-même employée à la Bibliothèque Nationale au rayon « Périodiques et Magazines ». Au bout d’un petit moment, elle interrompit le jeune homme.
- Je suis désolée, mais je dois partir, je vais me mettre en retard ! Mon chef de bureau est terrible, dit-elle en souriant.
- Je comprends très bien, désolé de vous avoir retenue. Voulez-vous que nous reprenions cette conversation ce soir, autour d'un café ? J'aimerais vous revoir.
- Avec plaisir. Connaissez-vous le Café de l'Univers, place du Montparnasse ? Un endroit animé mais sympathique, fit Linda.
- Oui, bien sûr, qui ne connaît ce haut lieu de la culture artistique ? Ce sera avec plaisir, à dix-neuf heures, répondit Tom.
- Cela me convient, repartit la jeune femme. J'espère qu'il n'y aura pas de jeune écervelé sur notre route, cette fois-ci ! J'ai vraiment craint un moment de tomber par terre, heureusement, vous m'avez retenue !
- Oui, et je me suis retenu aussi, j'avais vraiment perdu l'équilibre également, dit Tom en riant. Quel danger public, ces rollers ! En tout cas, je leur suis très reconnaissant, ils m'auront permis de faire votre connaissance.
- Vous avez raison, c'est un sport détestable, je l'ai en horreur, fit Linda en souriant, mais cette fois-ci, je dis avec vous "vive les rollers !"
- A ce soir, donc !
- A ce soir ! »
Les deux jeunes gens se séparèrent, ravis d’avoir rompu un instant leur isolement au sein de la grande ville. Linda se dépêcha de gagner la Bibliothèque Nationale, rue des Archives. Toute la journée, elle repensa à cette rencontre inattendue. Ce jeune homme, Tom, avait l’air sympathique et souriant. Il devait avoir le sens de l’humour. Mais comment en être sûr ? Elle eut une idée amusante : et si elle se rendait au rendez-vous en rollers ? Ce serait divertissant de voir la mine de celui qui avait proclamé adorer les rollers après avoir failli être renversé par eux. Elle attendit le rendez-vous en jubilant.
De son côté, Tom était ravi. Enfin, il rencontrait une jeune fille charmante, qui lui manifestait de l’intérêt. Et tellement jolie ! Il était vraiment séduit par la grâce, et la silhouette, de la jeune femme. Mais comment retenir son attention, qu’est-ce qui pourrait l’amuser ? Il savait que faire rire une femme est déjà la séduire à moitié, alors, que faire ? Il eut l’idée d’aller à leur rendez-vous en rollers. Après tout, c’était leur histoire, une sorte de clin d’œil à leur rencontre mouvementée de cette après-midi. Il attendit 19 heures avec impatience.
A l’heure dite, place du Montparnasse, les passants, nombreux à cette heure, eurent la surprise de voir deux adultes en costume et robe élégante se rejoindre en rollers, éclater de rire ensemble et entrer dans le grand café parisien bras dessus bras dessous en titubant sur leurs chaussures à roulettes.
Nul doute qu’une passante sentimentale s’est fait la remarque qu’ils semblaient faits l’un pour l’autre et qu’une belle histoire d’amour commençait certainement.
FIN
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