Je marche
Depuis qu'ils m'ont lâché
Je ne fais que marcher
Je marche
Ma marche est peine
Ma démarche est incertaine
Ma fougue est soudaine
Ma foulée devient aérienne
Suis-je devenu vapeur?
Cette apesanteur me fait peur
Si je m'arrête pour atterrir
Je meurs!
Je dois atteindre la mer
Avant qu'ils ne lâchent les tireurs ...
Je marche
Je consulte l'horloge de l'univers
J'y retrouve l'heure d'hier
J'avance en arrière
Le temps ne bouge guère
Je feuillette les nuages taris
Où le ciel n'a rien écrit
Par dédain, par mépris
Je revisite ma terre spoliée
J'y retrouve ma mère qui prie
Dans l'ombre du vieil olivier
Si je m'arrête pour me réveiller
Je meurs!
Je dois atteindre la mer
Avant qu'ils ne lâchent les éclaireurs ...
Je marche
Je frappe à la porte de mon cœur
Par peur ou par pudeur
Il refuse de m'ouvrir
Je le sais frémir
Il bat à cent à l'heure
Ébranlement thoracique?
Valse démoniaque?
Décharge électrique?
Crise cardiaque?
Si je m'arrête pour souffrir
Je meurs!
Je dois atteindre la mer
Avant qu'ils ne lâchent les délateurs ...
Je marche
Fait-il déjà nuit?
Fait-il encore jour?
J'arrive enfin au carrefour
Je dois feindre les vautours
Avant l'extinction des feux
Avant le couvre-feu
Avant l'état de siège
Avant l'ultime piège
Celui des monstres
Qui coupent les doigts aux pianistes
La langue aux poètes
La tête aux humanistes
Le rêve aux utopistes
Les ailes aux oiseaux
Si je m'arrête pour voir
Je meurs!
Je dois atteindre la mer
Avant qu'ils ne lâchent les loups ...
Je marche
Je me précipite vers le précipice
J'éteins mes feux d'artifice
Je me languis de mon supplice
Je me réjouis de mon sacrifice
J'attends
Je me morfonds
Je contemple le néon
Insondable néant
Je dois me fier au vent
Si je m'arrête pour lire
Je meurs!
Je dois atteindre la mer
Avant qu'ils ne lâchent les tueurs ...
Je marche
Je n'arrive plus à supporter leur cruauté
Est-ce une nouvelle forme de cécité?
Est-ce mon impardonnable incapacité?
Est-ce mon manque de lucidité?
Est-ce mon incurable nullité?
Je fredonne un air ancien
Pour apprivoiser le chemin
Ma mère me chantait ce refrain
Pour tromper ma faim
Quand je n'étais qu'un citadin
Un indésirable citoyen
Si je m'arrête pour écrire
Je meurs!
Je dois atteindre la mer
Avant qu'ils ne lâchent les vautours ...
Je marche
Je scande un slogan prolétaire
Que me chantait un camarade téméraire
Quand j'étais un intolérable réfractaire
Je compose un poème révolutionnaire
Mes vers tombent par terre
Se brisent comme du verre
J'ai oublié mes rimes
J'ai oublié mon rythme
J'ai oublié mes assonances
J'ai oublié ma cadence
J'ai oublié ma transe
Si je m'arrête pour me souvenir
Je meurs!
Je dois atteindre la mer
Avant qu'ils ne lâchent les cerbères ...
Je marche
Mon pain est dur
Mon eau est amère
Mes mains se fissurent
Mon dos est brûlures
Mes os sont fractures
Mes articulations sont courbatures
Tout mon être est tortures
Mon horizon est clôtures
Mon demain est obscur
Si je m'arrête pour soigner mes blessures
Je meurs!
Je dois atteindre la mer
Avant qu'ils ne lâchent les chasseurs...
Je marche
Je revisite la terre de mes ancêtres
Dans ma tête
Je revois mon pays natal
Souillé par les vandales
Spolié par les barbares
Mutilé par les tortionnaires
Je revois ma mère
Prosternée sur son tapis de prière
Elle pleure
Pour que cesse la guerre
Je revois mon père
Reposant dans son cimetière
A l'abri de notre enfer
Mon père était mon repère
Sans mon père, je me perds
Sans mon père, j'erre
Sans mon père, je m'égare
Si je m'arrête pour m'orienter
Je meurs!
Je dois atteindre la mer
Avant qu'ils n'allument les projecteurs
Pour la nuit de l'horreur
La nuit de la terreur...
Je marche
Je marche
Je marche ...
...........................................
Agadir, le 11 / 11 / 2016

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Ma vie n'est plus une barque dans une mer enragée
Et je ne suis plus le naufragé!
...............................................................................................
Mostafa, point fat, seul, las, si doux, rêvant de sa mie!!!

Un côté rêve étrange qui n'en finit pas et ce surréalisme soft mais expressif, imagé.
Heureux de te lire de nouveau Mostafa!

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Prière ne pas remonter mes anciens textes, merci
Le tagastin: quand on vit d'amour et de vers, il faut assumer ses coliques!

Bonsoir Mostafa,

Des vers très émouvants !



Belle soirée !
Mes amitiés
Sybilla

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Presque toutes mes poésies ont été publiées en France et ailleurs avec les dates ""réelles"" de parution.

Le rêve est le poumon de ma vie (Citation de Sybilla)

BONSOIR Mostafa Un écrit qui en dit long quand on pense au horreur qui se passe sur terre il y a de quoi faire parler sons coeur et de le crié très fort comme tu la fait COURAGE
mes amitiés jean claude

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http://www.mespoemes.net/poete47/
"Aimer ce n'est pas se regarder l'un l'autre mais c'est regarder ENSEMBLE dans la même direction" Saint Exupéry"

des vers forts et précis, comme une gestuelle de la fuite, et on se pose la question en vous lisant, peut on être sauvé, superbe


yann

BOnjour Mostafa ,une bien longue marche dont on ignore encore quel en sera le terme.
Mon amitié.

Capricorne

les horreurs des guerres
merci Mostafa pour cette superbe et longue marche qui n'en fini plus
bonne journée
Denise

toujours avancer quel que soit les obstacles , c'est facile à dire , pourtant certains subissent et vivent des horreurs durant leur vie , mais nous devons d'avancer , je dirais presque par devoir pour la vie qui nous a offert ce cadeau , précisément la vie !
un texte profond et criant
bravo
mes amitiés
yohann

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la nostalgie est un bouquet de fleurs enfoui au fond de votre coeur ,
qui vous embaume quand remontent les souvenirs du bonheur ,
yohann

Un poème épique
Qui en dit long sur notre époque...


Très Amicalement...
NL...

une marche éperdue continuelle

à travers le rythme de vos mots

pour atteindre la mer,la paix


bonne journée!

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Nous avons appris à voler dans les airs comme des oiseaux et à nager dans la mer comme des poissons mais nous n'avons pas appris l art simple de vivre ensemble comme des frères

Martin Luther King

candidao Sybilla poete1947 islander Capricorne Denise12 yoledelatole3 NoirLune Madeleine


Je suis très heureux de lire vos commentaires et découvrir vos interprétations et vos impressions.
Mille et un mercis!

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Ma vie n'est plus une barque dans une mer enragée
Et je ne suis plus le naufragé!
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Mostafa, point fat, seul, las, si doux, rêvant de sa mie!!!

naufrage, d'un coeur esseulé

que de mots, comme des sanglots contenus, avec pudeur..



je compatis à cette souffrance qu'engendre la solitude..

amicalement

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l'Amour rayonne quand l'Ame s'élève, citation maryjo

je viens de toucher la rive
juste avant que je dérive
maintenant je marche sans peur
maintenant je marche en sueur
cherchant au fond de l'horizon
d'où me viennent mes sensations.

Toujours aussi beau Mostafa


Guy

quelle intensité Mostapha dans ce texte...
et quel rythme aussi...
fiuuuuuuuuu
la marche de ceux qui en exil doivent continuer à essayer de survivre, un magnifique message poétique...
merci du partage

Une fuite vers un monde meilleur ?
Merci Mostafa pour ce texte qui prend aux tripes !
ortiaz

Cyrael Chibani Cristof75 ORTIAZ

Mille mercis!
Vos commentaires embaument le cœur!

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Ma vie n'est plus une barque dans une mer enragée
Et je ne suis plus le naufragé!
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Mostafa, point fat, seul, las, si doux, rêvant de sa mie!!!

"Je revois mon pays natal
Souillé par les vandales
Spolié par les barbares
Je revois ma mère
Prosternée sur son tapis de prière
Je revois mon père
Reposant dans son cimetière
Mon père était mon repère
Sans lui je me perds
Sans lui j'erre
Si je m'arrête pour m'orienter
Je meurs!
Je dois atteindre la mer
Avant qu'ils n'allument les projecteurs
Pour la nuit de l'horreur...
Je marche"

Quoi dire...
Les mots me manquent Mostafa

Mon amitié cher poète
Marc

Citation :

Ne dis rien, mon cher, ne dis rien!Parfois, le silence est plus éloquent que mille mots !

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Ma vie n'est plus une barque dans une mer enragée
Et je ne suis plus le naufragé!
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Mostafa, point fat, seul, las, si doux, rêvant de sa mie!!!