Chrono-l'eau-giquement.
Je me souviens de la rivière
S’écoulant sous le pont
D’une heureuse enfance
Tout au bout de la cour
Je me souviens d’un ru
Des clapotis sur les pierres
Des vœux que nous formulions…
Délicates rêveries .
Je me souviens de la colère
Du fracas par-dessus les écluses
Lorsque, chargé de pluies
L’affluent se déverse dans la plaine
Et ce ciel inversé
Parsemé de nuées opalescentes
Tremblant dans l’onde
Tel un rideau balancé par le vent.
Je me souviens des marées,
Des déferlantes mousseuses.
Des rochers tantôt enfouis
Jusqu'au sable par les flots dénudé.
Et puis, je vois mon père,
le dos courbe dessous l’azur
Une main plongée, le regard fouillant.
Quelques trésors dans la nasse.
Je me souviens que je courrais
le long de l’humble canal
Des lourdes branches fruitières
Absorbées, emportées dans son fil estival
Je me souviens aussi
De ce tout petit fleuve
Qui, dans un cortège de roses
Se jette dans la mer
Je me souviens aussi
Du crachin, de la bruine, de l’averse
De l’après et de son suintement
A travers le chaume
Je me souviens des orages,
du déchirement des ciels
Des ors et des lourds noirs
Grondant par-delà les terres
De l’opéra joué
De la gouttière au trottoir
De la nature dégoulinante
et des flaques naissantes.
Des abeilles aspirant le liquide
Dans la feuille réceptacle
De l’oiseau qui s’abreuve
Et abreuve ses petits
Je me souviens de l'odeur
des blés et des foins.
Des bovins, des chevaux
Paisibles passagers du temps filochant.
Voilà …
Je me souviens de tout.
Et de l’eau… Et partout.
Du ciel à la terre...
Jusqu’à dans la transparence d’un verre.
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