Honoré est parti un jour de février,
Et il n’a pas frémi, quand Dieu a dit :’Dégage’.
Délivré de son corps, il n’est plus prisonnier,
Il était détenu par le Temps en otage.
Et quand il a surgi de ce très long tunnel,
Il a levé les yeux : tout était bleu d’azur,
Rien ne venait ternir la pureté du ciel,
Où il mettait les pieds, il n’en était pas sûr.
Il a cherché en vain les ‘merveilleux nuages’,
Reverrait-il passer, un jour, les oies sauvages ?
Et pourrait-il cueillir encor les fleurs des champs ?
Ne verrait-il donc plus, plus jamais, le printemps.
Cet éther était loin de n’être que néant,
Les âmes des humains, au fil des millénaires,
Étaient montées là -haut depuis l’aube des temps,
Et il se demandait ce qu’elles pouvaient y faire.
Il craignait plus que tout, un jour, de s’ennuyer,
Pourrait-il s’adonner aux joies du jardinage ?
Y aurait-il besoin de tailler ses rosiers ?
Planter son chevalet, peindre des paysages.
Gilgamesh ne quittait, un instant Enkidu,
Vulcain, Venus et Mars, bras dessus, bras dessous,
Juliette et Roméo s’aimaient pour mille vies,
Tristan et Iseult étaient de nouveau réunis.
Tout le monde est-il donc sage comme une image ?
Et les premiers, ici, sont-ils bien les derniers ?
Y-a-t-il des oasis, des déserts, des mirages ?
Et les alexandrins, ont-ils, leurs douze pieds ?
Des hommes et des femmes j’aimais le badinage,
Barde sur terre j’étais, barde je veux rester,
De ma très tendre amie perdrai-je le visage ?
Peut-on s’aimer d’amour encor au paradis ?
Saint Pierre, me dit-on, fait très mal son métier,
Et l’on vient de l’Enfer pour forcer le passage,
Il n’a pu arrêter les auteurs d’un carnage,
Qui s’étaient fait sauter à Paris en janvier !
J’ai vu tous les élus, le ciel est un village,
Et partout où je vais, il y a du réseau,
Et de grands orateurs sur les aréopages,
Où l’on juge toujours les choses de très haut.
Dumnac