Je connais une dame qui est fort marrie,
Esclave de tous ses amis à quatre pattes,
Chaque jour, elle quitte son travail et se hâte,
C’est ma sœur et elle se nomme Anne-Marie.
Quand elle rentre, ses chats sont déjà impatients,
De Caramel qui l’attend, sagement assis,
A Saba, qui baille et montre ainsi son ennui,
Les deux autres se la jouent parfaits inconscients.
Ainsi de Snow le snob qui se lèche l’oreille,
Et qui fronce doucement son nez l’air de rien,
Trop fier pour révéler qu’il a déjà très faim,
Attendant prudemment mais toujours en éveil.
Ou bien encore la sournoise Choupinette,
Qui ne peut jamais se retenir très longtemps,
Laissant sur le sol ses offrandes tant et tant,
Et qui n’en fait qu’à sa tête la malhonnête.
C’est bientôt l’heure de bien se remplir la panse,
Comme toujours, la maîtresse est active et se presse,
Leur parlant doucement et avec la même tendresse,
Distribuant ces prébendes sans grande offense.
Ces chanoines séculiers aiment ces offrandes,
Ils savourent au quotidien ces plaisirs de bouche,
Dégustent lentement, s’étirent et puis se couchent,
Ces viles chattemites sont des vraies brigandes.
Sœur Anne, voies-tu là ces félins qui minaudent,
Et dédaignent tes caresses, gestes si tendres,
Les repoussent mais sans vraiment faire d’esclandre,
Juste histoire de montrer ici qui commande.
Seul Caramel se frotte à tes jambes et quémande,
Mais il a encore faim ce grand hypocrite,
Et si tu cèdes trop vite à cet escogriffe,
Tu n’en tireras jamais aucun dividende.
Ces chats te rendent heureuse, chère Anne,
Mais sache en tirer meilleur profit encore,
Tout en chérissant ces fabuleux trésors,
De cette cour, n’en sois donc pas la courtisane.
Heureuse femme, te voila bien entourée,
Grâce à eux, tu touches vraiment au parfait bonheur,
Et ils savent te faire oublier tes malheurs,
Esclave d’eux à jamais, c’est ta destinée.
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L'homme est le rêve d'une ombre
(vers 135-140 des Pythiques de Pindare, le prince des poètes).