Le poète a chanté ses louanges ‘’ Ah si j’étais toi, lorsque celle qui hante mes nuits viendrait présenter ses attraits devant toi’’.
Archimède l’a utilisé pour détruire la flotte ennemie lors du siège de Syracuse.
Le prince le brise pour calmer sa colère. Les femmes restent des heures pour parfaire leurs coiffures. A travers les temps, dans tous les espaces, il est resté le même, il a gardé ses principes, nous savons tous ce qu’est un miroir.
C’est cet objet de surface polie qui vous renvoie l’image telle que vous la lui présentez. He bien mon miroir à moi il est du même acabit que ses congénères.
Il ne veut pas changer d’avis, je l’ai supplié, menacé, flatté,
‘’Non’’, il ne veut pas, il n’a que faire de mes supplications, de mes supplices, de mes menaces, de mes flatteries, de ma gentillesse, de ma folie, de mon incrédulité, de mon ignorance, de mes fantasmes, de ma faiblesse, de mes prouesses, de mes humeurs, de mes fantaisies, de mes colères, ‘’Non’’, il n’a que faire de tout cela, lui il est là pour la vérité, il n’aime pas le mensonge ni l’hypocrisie.
Le ‘’noir’’ pour lui est toujours ‘’noir’’, il ne peut être blanc. Un jour j’ai voulu le tromper, je lui ai présenté du ‘’rouge’’ en souhaitant qu’il me renvoie l’image d’un ‘’vert ‘’ éclatant. Il n’a même pas daigné attendre que je formule mon souhait, ‘’le rouge est rouge me dit-il, et le vert est vert ils ne peuvent se ressembler’’. J’ai essayé de lui expliquer la situation :’’ pour la circonstance et tenant compte de la situation, je te prie de faire une incartade à tes principes, renvoie moi du vert à la place du rouge.
Il me toisa d’un air hautain et me répondit ‘’Vous les humains vous avez été créés purs et vous vous êtes noyés dans les impuretés, et cela n’est pas de ma faute, vous flattez les imbéciles, et vous incitez les ignorants, vous faites du couard un intrépide, et du brave une âme damnée, d’un tyran un dieu, et d’un sage un fou, d’un parvenu un sir, et d’un pur un serf, de l’égocentrisme une vertu, et de l’altruisme une tare’’.
J’ai essayé de tourner dans ma tête toutes ces vérités qu’il vient de m’assener, j’ai essayé de trouver une parade, ‘’ ce que je veux de toi c’est que tu me démontres le beau lorsque c’est beau, et le laid lorsque c’est laid’’.
Il me renvoie mes grimaces telles que je les lui présenté, et me lança avec un accent plein de colère, ‘’je n’ai pas été créé pour déchiffrer l’essence, mais simplement pour renvoyer l’image du contenant et non du contenu, je ne suis pas là pour refléter la laideur ou la beauté des âmes, mais seulement l’élégance ou l’inélégance de l’enveloppe, un homme nourri dans l’incivisme, l’incivilité, l’inclémence, et l’inculture, bien habillé et bien coiffé paraitrait élégant dans l’image que je renverrais est-ce ma faute ?…. Et il ajouta ‘’si tu recherches à ce que je te fasse découvrir, dans l’être humain : la sagesse ou la folie, la tyrannie ou la clémence, l’amour ou la haine, le bien ou le mal, le savoir ou l’ignorance, la richesse ou la pauvreté, tu te trompes mon cher ami !…
‘’Ecoutes’’ lui dis-je ‘’c’est simplement pour étancher ma curieuse soif de savoir, et c’est pour rendre un peu de sérénité à mon cœur !…
‘’Non’’ me dit-il ‘’coupes les cheveux, rases les barbes, laisses caché ce que Dieu a créé caché, laisses moi exercer mon métier de miroir et contentes-toi d’exercer le tien, celui de coiffeur !….

Alger 1993