Être chauffeur de bus, ce n’est pas sinécure,
Il faut des passagers se faire respecter,
Et certains, quelquefois, vous mènent la vie dure,
On ne peut accepter de se faire insulter.
Si vous voulez connaître l’état de notre France,
Il faut vous convertir aux transports en commun,
Où fusent les insultes, où règne l’insolence,
Et où l’on a, parfois, honte du genre humain.
Pas très loin de chez moi, une ligne de bus,
C’est le N°12, qui me conduit en ville,
Puisque j’avance en âge, je le prends beaucoup plus,
J’ai donc quitté la bulle de mon automobile.
« Ma carte est plastifiée, est-elle bien lisible ? »
Demandai-je au chauffeur à ma montée à bord,
Je croyais ma question plus que compréhensible,
Il ne répondait pas, je parlai donc plus fort.
Et il me fit comprendre qu’il fallait le saluer,
Un chauffeur d’autobus tient aux civilités,
Mais s’il a des raisons d’être aussi susceptible,
Comme il a tort de prendre un vieil homme pour cible!
L’autobus a repris sa course cahotante,
Il frĂ´le les voitures et les bords de trottoir,
Accélère en montée, freine dans les descentes ;
Moi, tout au fond du bus, je suis allé m’asseoir.
Une petite femme, qui s’apprête à descendre,
Et « Arrêt demandé » s’affiche sur l’écran,
Sur le point de sortir, elle s’est déjà levée,
Le bus ralentit : elle part dans un instant.
Eh, non ! L’homme au volant démarre, sans crier gare !
Sous le nez de la femme, la porte s’est refermée,
Elle en est courroucée, toute défigurée,
Qu’est-ce qu’elle lui a donc fait, à ce chauffeur de car ?
Il suffirait d’un rien pour qu’elle l’assassine !
Sa famille vient d’Alger, ou bien de Constantine,
Là -bas, sur l’autre bord de Méditerranée ;
Elle voudrait se venger, car elle est humiliée.
Elle a l’explication, le traite de « raciste »,
Elle ne réclamait rien, que le temps de descendre,
Mais il ne l’a pas vue, il ne veut qu’elle existe,
Elle a donc décidé de faire de l’esclandre.
Le chauffeur lui a dit : «-Madame, faut vous détendre,
Vous ne savez qui sont ma femme et mes enfants, »
-« Je ne veux les connaître, allez-donc vous faire pendre !
Vous êtes un sale raciste, je le pense vraiment ! »
Quelques mètres plus loin il veut la déposer,
Il ne peut, c’est certain, rouler en marche arrière,
Elle refuse, et ira jusqu’au prochain arrêt,
Elle ne peut se calmer, ravaler sa colère.
La femme est descendue Avenue Jean Boutton,
Puis elle a pris un bus dans l’autre direction,
DĂ©sormais le chauffeur fera plus attention,
Dans l’espoir d’éviter les procès d’intention !
Dumnac