Peut-on se regarder dans les yeux constamment ?
Non, la vie nous attend, et cela ne se peut,
On ne reste couchés, comme des bienheureux,
Et pour l’éternité, figés comme gisants.
Il faut nous arracher aux étreintes fébriles,
Dès le lever du jour, nous remettre à l’ouvrage,
Et quitter les moiteurs de ce bonheur tactile,
Il faut bien se bouger, se remettre à l’ouvrage.
Se réaccoutumer aux étoffes, au textile,
Sans trop s’appesantir, savoir tourner la page,
Retrouver, sans tarder, les lumières de la vile,
Il faut, tout comme avant, accepter d’être sages.
Nous, qui étions des dieux, retrouvons les humains,
Nul ne peut, Ã toute heure, boire cette ambroisie,
Et l’eau est insipide, quand, au petit matin,
On redescend sur terre, happés par cette vie.
Nous allons, de nouveau, nous éponger le front,
Et nous ingénier à gagner quelques sous,
Pendant que des amours se font et se défont,
Il nous faudra tenter de joindre les deux bouts.
Mais de nous regarder, nous trouverons le temps,
Peu importe la vie, quand, les yeux dans les yeux,
Nous restons étendus, comme des bienheureux,
Quand nous quittons la terre, l’espace d’un instant.
Dumnac