Un tapis perdu dans l'univers. (Un tappeto perso nell'universo.)
Un tapis perdu dans l'univers.
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(Un tappeto perso nell'universo.)
Voici que s'avancent les personnages familiers,
D'abord le bouffon, en patriarche rouge et obèse,
Les jeunes acrobates arrêtés, aux regards pénétrés,
Suivi de la petite danseuse, délaissant son panier.
En grand commentateur de cet unique spectacle,
L'arlequin se tient à l'écart de cette troupe,
Picasso tente, en artifice, de s'identifier à lui,
En lui donnant, en malhabile, son propre profil.
Dans cette démarche hardie, l'implication,
Résume toutes les préoccupations antérieures,
Comme pour un fabuleux baisser de rideau intérieur,
L'inaction nous convie vers cette nouvelle orientation.
Au premier plan, cette jeune fille assise, en oracle,
Vise l'écart, elle reste bien étrangère au groupe,
Porteuse d'eau, elle tranche sur le reste du spectacle,
Pourtant son regard s'attache et suit le reste du groupe.
Beaucoup de questions restent en suspens,
Si les saltimbanques gardent tout leur aspect coutumier,
La scène reste comme inachevée, ambiguë,
Dans tous ces éléments qu'elle ne peut rassembler.
Les gens du cirque posent,
Dans le décor d'un pays sans nom,
Toute l'indifférence fait nature morte,
Sur le tapis perdu, au centre de l'univers.
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illustration : Famille de saltimbanques.Picasso. 1905.
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