Et la terre cessa d'exister (nouvelle humoristique)



La soucoupe s’était posée dans un silence absolu au bout du champ du père Anselme.

Enfin une soucoupe, c’est vite dit ! Cela ressemblait à une assiette creuse à l’envers surmontée d’une sorte de camembert sur lequel trois ballons de rugby tournaient lentement. Le tout mesurait une centaine de mètres de diamètre.

L’engin, que je suppose interplanétaire, débordait un peu sur la rue derrière le champ sans cependant toucher les voitures en stationnement mais dépassait de deux mètres sur un bateau.

Que faisait-il sur la terre ? En Périgord ? Quels extra-terrestres voyageaient dans cette énorme bizarrerie ?

L’histoire va nous le révéler progressivement.

Ils venaient de la grande ourse.
Les Oursogirafiniens, reconnaissables à leur grand cou, leurs poils abondant en partie basse et leurs trois paires d’yeux carrés, s’étaient révoltés récemment.

Contrairement aux aimables KranesurKulois qui n’avaient pas de cou du tout et qui habitaient la petite ourse les Oursogirafiniens étaient des râleurs perpétuels.

Cependant, assez intelligents, ils allaient chercher la solution de leurs pro-blèmes sur d’autre planètes et notamment la Terre.

Revenons à la révolte. Les mâles de la Grande Ourse avaient dit à leurs épouses la bouffe ici est insipide il faut que cela change. Nous allons aller chercher de bonnes matières premières sur une planète où la gastronomie est respectée et pour préparer un futur plaisant nous allons prélever sur des bons cuisiniers des gènes de cordons bleus et de toques blanches afin d’avoir des progénitures autant gastronomes que maitres-queues.

Quelques oursogirafiniens vinrent frapper à la porte de derrière du père An-selme.
Il en avait vu d’autre et les salua poliment : quoi c’est y que vous voulez à c’theure ?
Ayant des usages, les visiteurs lui offrirent un ours en or de quatre kilo-grammes qu’ils changèrent en louis d’or à la demande de leur hôte.
L’ours n’étant pas la monnaie utilisée sur la terre, un coup de transformateur moléculaire convertit en pièce le plantigrade jaune.

Anselme leur offrit la goutte, il s’en remplirent le Taste-bibine organe parti-culier destiné à l’analyse des saveurs et trouvant la prune fort bonne il en chargè-rent la composition moléculaire sur une clé USB ( Usage Succulent pour Biture).

Ils analysèrent sans qu’il en soit conscient, la mémoire d’Anselme et décou-vrirent qu’il était gourmand, gourmet, et qu’il avait en mémoire une quantité d’adresses de bons restaurants.

Ils prélevèrent une copie de sa mémoire cérébrale et déléguèrent dans tous les restaurants identifiés des oursogirafiniens spécialisés dans l’enregistrement de connaissances nouvelles sur RAM (registre alimentaire magistral) et sur ROM
(Récapitulatif des orgasmes masticatoires).

Puis ils quittèrent le père Anselme afin de trouver d’éventuelles humanitudes ex-ploitables et utiles à leur planète.

Ils avaient, quelques années auparavant, protégé les oursogirafiniennes, victimes de viols répétés par les Rectozizitois d’une planète voisine, en transposant l’invention du coupe-cigare terrien sur leur anatomie délicate. Les viols cessèrent !

Bref, tout se passait le mieux du monde et ils organisaient dans leur sou-coupe des gueuletons pour déterminer la trouvaille méritant l’ours de diamant avant de rentrer chez eux.
Palpitons de canard au cèpes et au foie gras ,
Cocotte de sole et Saint-Jacques sauce homardine,
Côte de veau épaisse aux morilles à la crème et au chablis
Langouste grillée au beurre de lavande et jus d’oursin, etc.

Hélas, c’était un vendredi soir que ce gueuleton eut lieu.

Nénesse et Toto, gendarmes de leur état, ayant fini leur service se retrou-vaient au « Blanc Sec » bistrot sympa où la poire valait le détour.
Ayant épuisé leur budget et s’étant bien piqué la ruche ils sortirent avec une alcoolémie d’environ trois grammes.

Passant par la rue d’où l’on voyait la soucoupe ils s’étonnèrent du station-nement de l’engin et sortirent leur carnet de contraventions :
Stationnement interdit, sur un bateau, pas d’immatriculation, pneus tellement usés qu’on les voit même pas , clignotants pas à la bonne place,etc.

À la fin, ils collèrent cinquante sept contraventions sur la soucoupe avec du papier adhésif en continuant de tourner autour.

Les oursogirafiniens essayèrent de communiquer avec les alcoolos en vain ; leurs sondeurs cérébraux ne rencontrèrent que le vide absolu !

Cela leur hérissa les poils ce qui est très mauvais signe chez eux.

Ils désintégrèrent les deux perturbateurs et survolèrent la terre pour savoir si la majorité des habitants étaient aussi nuls et méritaient d’exister.

Malheureusement les prélèvements intellectuels se firent à l’assemblée nationale et au sénat, jugés sans intérêt.

Ils transformèrent alors la terre en chaleur et en lumière.
Le peu de poussière qui en resta fut balayé sous le bord du tapis d’un trou noir.

Quant aux oursogirafiniens, ils commencèrent à s’en repentir en découvrant plus tard, l’indigestion, la crise de foie, la goutte, l’obésité, l’hyper-uricémie, le cholestérol, etc.


OLUCINEP VII 04 MMXIV