Voilà bien la disgrâce qui frappa cette terre : maintenant lugubre, déserte et plate, sans lanterne pour accrocher notre regard ; l’étendue - en une friche malingre, aux carcasses dégueulasses, gisantes et muettes, enmourchardées sous les nuées noires versatiles des cohortes volantes – n’est plus qu’un lourd silence mortel.
Parmi les saintes ruines et le spectacle des corps démembrés, entre les murs d’un désastre entendu ; l’invoquée – par les sacrifices sanglants - arrache la terre arrosée de ses griffes décharnées, sortant peu à peu de sa grise léthargie pour honorer la vie liquidée.
Sa main droite est gantée de ferraille aux lourdes émailles - sa serre maudite, la poigne glaciale du conflit - le fléau humain ; où rage et rancœur se noient dans les eaux de leurs humeurs belliqueuses - la guerre ; divine épidémie de la nature harmonieuse.
Elle est là , radieuse, belle dans sa fatale ironie, jouant du double flageol, assise, miroitant sa lugubre composition en de subtiles notes sibyllines. Mélodieuse Mort, délivrant les âmes déchirées, qui ; emmurées dans les chaires abominables de leurs pauvres existences insignifiantes, ressortent lavées, papillonnant vers les cieux intangibles.
Et de là , la Mort, inqualifiable bienfaitrice, joue ses dernières notes qui se perdent dans le vent, lentement, pour s’en retourner, dans le linceul terrestre de son antre mortifère.
Mais le silence est rompu et des plus noires horizons ; renaîtra la vie, lavée des souillures à ces échos. Elle reprendra tendrement son chemin ou ; dans le gosier des corbeaux, dans les ventres des autres nécrophages, cycliquement rendus à d’heureuses naissances, qui viendront redorer le paysage d’organismes brillants.
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Il n'y a pas d'amour, pas de douleur, pas de jours heureux et de malheur sans vie.