Elle aurait dû...elle n'aurait pas dû!
Elle le guette bien chaque jour partir
Elle le guette bien chaque jour revenir
Toujours avec sa même démarche
Toujours avec le même beau sourire
Et de la serrure, sans nulle relâche
Elle guette le jour, sans pouvoir sortir
Le passage de son ami, le tendre poète
A qui elle veut quelques fois ouvrir
Et que l'on dise:" c'est osé, c'est bête!"
Il n'y a qu'un mois et quelques ans
Il lui enseignait la science des mots
Tous les élèves étaient ses enfants
Son accent ne sonnait guère faux
Et que de sourires entre les leçons!
Il ne voyait le cœur qui avaient si chaud
Toujours très fidèle à ses bonnes façons
Sa science le rendait mille fois plus beau
Et elle avait appris à apprécier les chants
Elle est maintenant devenue demoiselle
La poitrine remplie de mille et un fruit
On lui dit belle, mais elle est très belle
Tout en elle s'admire, tout en elle reluit
Dans ses beaux yeux est inscrit un appel
Souvent essuyé par de légères pluies
Entre les lèvres des poches chargées de miels
Et sur les joues du rose vif qui éblouit
Mais lui seul ignore la beauté de son ciel!
Et comme chaque jour, elle l'a tant attendu
Un matin d'octobre, pas comme tous les matins
Pour savoir, elle aurait tout, tout, tout vendu
Elle n'a vu son ombre, ni senti son parfum
Pourtant la serrure est la même, l'oreille est tendue
On vient lui dire que ce qu'elle fait est vain
Que son beau rêve est à jamais perdu
Monsieur a été ailleurs, la main dans la main
Avec sa seule confidente, ah! elle n'aurait pas dû.