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     Histoire loufoque
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Expéditeur Conversation
plumedoiseau
Envoyé le :  7/9/2013 20:25
Plume de platine
Inscrit le: 10/4/2013
De: Province de Liège
Envois: 2647
Histoire loufoque
HISTOIRE LOUFOQUE

Les hirondelles dormaient sur le papier peint de la chambre de Marthe. Elles dormaient depuis qu’un illustrateur quelconque s’était plu à les y essaimer, rigoureusement identiques. Marthe avait quitté la pièce très tôt le matin, et à son habitude, avait levé la fenêtre coulissante afin que l’été pût réchauffer les murs vieillots de cette bâtisse située dans la campagne londonienne. Le soleil et l’air léger illuminaient le voile qui en garnissait l’encadrement. La commode recevait, elle aussi, les rayons chatoyants, bien que l’air, ce jour-là, fût imprégné de senteurs orageuses, parsemées de lilas.

Je rêvais encore dans la chambre voisine, à demi-somnolent, aux histoires loufoques que mon amie m’avait racontées au sujet de cette demeure qu’elle venait d’acheter. Histoires loufoques dont elle avait ri. On parlait, dans le Comté de Middelsex, de revenants ou d’objets qui se déplaçaient à la lueur de la lune. Et aucun habitant de la région n’avait voulu reprendre ces pierres dont on disait qu’elles étaient hantées. Ainsi, Marthe avait pu les acquérir pour une croûte de pain. Je me demandais, quant à moi, si, durant mon séjour à Richmond, j’aurais la surprise d’une table lévitante, ou, me souvenant de mes lectures de Jung, d’une voix venant d’Outre-tombe.

Soudain, mais, était-ce l’effet de ma rêverie, j’entendis un bruit sourd, comme un ressort qui grince. Le vent soufflait plus fort depuis un moment. Allai-je me lever et vérifier ? J’étais intéressé par ces histoires, mais je n’y croyais pas vraiment. Pourtant… pourtant je me disais que j’avais à la fois bien envie et bien peur que cela m’arrivât. Je me dis que le matin était levé depuis longtemps et que je n’avais plus à craindre les rumeurs de la nuit. J’avais dû rêver et je m’allongeai encore.

Neuf heures sonnèrent à l’horloge. Alors je m’étirai comme un chat et me décidai à faire connaissance avec le jour. Un second coup de vent me rappela le premier, et, me moquant de mes scrupules, je poussai la porte de la chambre de Marthe. Tout était tranquille, sauf le rideau qui flottait, poussé par le souffle du vent. Je me dirigeai vers la fenêtre pour la fermer et… quelque chose m’arrêta, me fascina : une hirondelle avait levé son aile et cherchait son essor. Une autre me parut manquer dans le dessin. Je restai sidéré. Je voulus toucher ce papier, ce mur qu’un mystère évident habitait. Une force soudaine s’empara de ma main afin de la tenir éloignée de ce lieu. Je m’en allai doucement, titubant sous l’effet de la surprise, incrédule encore, et me disant que j’avais dû être le jouet de mes fantasmes. J’étais seul dans la maison. Marthe travaillait ce matin.

Je descendis déjeuner, puis remontai dans la chambre suspecte. L’aile de l’oiseau était bien là, et laissait son ombre sur ce papier devenu noir à l’endroit qu’elle occupait. Je me crus fou. Alors, je vis que non seulement l’aile était détachée, mais que le corps tout entier avait pris forme.

Je restai seul avec ces choses dont on dit qu’elles n’existent pas. Je me demandai si moi j’existais. Et je m’en allai vers la campagne avoisinante afin de philosopher à mon aise sur l’étrangeté de l’existence. Je me promenais au hasard, ne connaissant rien de ces lieux, et j’allongeai mes pas le long d’une vallée qui s’offrit à moi. Un ruisseau coulait, limpide, et je remontai le courant. La nature était vallonnée, mais dépourvue des mêmes feuillus que l’on voit chez nous, et je jouai avec les campanules et les boutons d’or. J’arrivai à une sorte de tournant de la rivière et le paysage devint plus sauvage, plus grandiose aussi. Des pierres énormes semblaient avoir été amenées dans le lit d’eau. Une cascade chantait et s’accordait avec Eole. Sous le soleil maintenant au zénith, certains feuillus blanchissaient. Deux grands arbres, dont j’ignore encore le nom, se penchaient l’un vers l’autre au-dessus des lourdes pierres, à l’endroit où l’eau chutait. Il me vint à l’esprit qu’ils s’aimaient et ne pouvaient vivre l’un sans l’autre. Une brise légère souffla, et les sons d’une harpe emplirent ce lieu perdu. Un charme opérait-il dans mon imagination ? Je me reposai la question, hanté encore par le souvenir du matin. Une harpiste se cachait-elle ici ? N’étais-je point seul ? Je revins sur mes pas, décidé à explorer l’endroit. Le soleil était brûlant et j’ôtai mes vêtements afin de me baigner dans la rivière. Le chant de la harpe me guidait.

C’est alors que je la vis. Non pas la harpiste. Mais la harpe seule qui chantait au gré du vent. Car c’était cela qui jetait dans la vallée ces sons absolument divins. Je me demandai une fois de plus si je rêvais. Je pensai avoir franchi le Monde Invisible en cette journée mémorable. Je me pinçai afin de m’éprouver à la réalité, regagnai l’autre rive, me rhabillai et repris le chemin de la maison.

Par je ne sais quel hasard, je rencontrai une fillette qui contemplait deux chenilles posées sur sa main. Deux chenilles en voie de métamorphose. Le ton de la journée y était. Et je songeai aux contes de mon enfance où les sorcières se changent en grenouilles, la princesse en pomme d’orange et le crapaud en prince…

Je rentrai à la maison que je décidai d’explorer davantage. Peut-être trouverai-je la clé de l’énigme dans son grenier. Quelque écrit y restait-il ? J’y montai et fouillai les coffres et les murs. Et tandis que le soleil dardait encore ses rayons sur la porte, je vis le bouton de celle-ci tourner. J’allai ouvrir. Rien. Affolé, je descendis dans la bibliothèque, et ce que j’aperçus ne me surprit pas moins. Le tapis était mouvant, la table oscillait et tournait. Je pris la chaise dans un mouvement de panique et tentai d’attraper la chose qui se déplaçait sous le tapis. En vain.

Je courais dans tous les sens de cette demeure quand le soir tomba brusquement. Il n’était pourtant que trois heures de l’après-midi. J’allai à une fenêtre, celle précisément que j’avais fermée le matin. Une lueur blanchâtre enveloppait des voitures qui se soulevaient du sol. Je me retournai et fus alors totalement épouvanté, car Marthe elle-même était dans son lit, un livre de musique ouvert à ses côtés. Quelques rameaux de buis ornaient ce livre ouvert au Requiem de Mozart. Je touchai Marthe. Elle était morte.

***

Des mois plus tard, j’appris qu’un autre acquéreur de la maison hantée avait découvert un message roulé dans le corps de l’hirondelle : « Je suis la harpiste du val assassinée sauvagement par son époux. J’écris ceci avant d’expirer afin de confier ma haine à l’hirondelle. Je suis vouée à errer dans l’au-delà par le sort que me jeta mon homme sorcier. Jusqu’au jour où l’on découvrira ce mot et que l’on croira qu’il existe un pont entre les vivants et les morts. Jusque là, les propriétaires éventuels de ce lieu seront voués au maléfice et me rejoindront afin de m’assister. »

Depuis ces événements, je n’ai de cesse de jeter un pont entre Marthe et moi. J’interroge. Je me demande quel est le sens de ces choses absurdes. Je mets des avis dans les journaux afin que les gens ayant connu des expériences aussi bouleversantes témoignent.

C’est ainsi qu’on raconte qu’un enfant dormait tranquillement dans sa chambre, à Venise, lorsque deux sphères lumineuses, évanescentes, y entrèrent.
« C’est lui qui a opéré ce prodige », dirent-elles. L’enfant s’éveilla, entendit ces mots et répondit :
« Quel prodige ? »
« Vous avez lancé un caillou magique dans le canal. Il vous est revenu. A cause de cela, un énorme paquebot y fut poussé, malgré lui, balayant les maisons qu’il touchait »
« Ainsi, le rêve que nous avons fait se réalise », dit l’enfant tranquillement. « Nous avions parié, avec mes trois amis, que si nous partions par le petit train vers le Monde Invisible, le Monde qui est situé au-delà des brumes de la mer, il arriverait des choses qui ne se passent qu’au ciel ou en enfer. Nous rêvions de détruire le monde pour que les gens soient obligés d’en reconstruire un autre, meilleur. On nous a raconté que ceux qui habitent là-bas font tout ce qu’ils désirent, qu’ils imaginent que le bateau leur apparaît à leur gré, qu’ils se déplacent comme le vent. Ils n’ont qu’une seule loi : créer, imaginer. Et les fleurs se transforment en chats quand elles le veulent, et les chats prennent visage humain. Mais surtout, on dit qu’il y a une lumière irisée qu’on nomme Lumière d’Amour. Alors, nous, on aurait bien voulu la connaître. »
« Votre vœu est exaucé » répondirent les sphères. « Cependant, il appartient aux adultes du Monde de la Terre de redevenir des Enfants comme vous. Ainsi, ils pourront vivre le Monde Imaginaire. Ceux qui sont morts sont vivants et le savent. »

Ceux qui sont morts sont vivants et le savent.

Ainsi, il était inutile que je me fasse du souci pour Marthe. Il y avait bien un pont entre le monde des vivants et celui des morts. Il existe en nous. A nous de le créer, de l’imaginer. Sans doute, Marthe avait-elle été appelée, et moi, je n’avais qu’à espérer, rêver à un Monde meilleur. Le Monde des Enfants

Donc, reconquérir ma Jeunesse.

Anne DE MAY
Mai 1990


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troubadoc
Envoyé le :  19/9/2013 8:39
Plume d'or
Inscrit le: 16/10/2012
De: valras plage
Envois: 1066
Re: Histoire loufoque
FABULEUSE INSPIRATION. LES HIRONDELLES VIENNENT DE QUITTER NOTRE PAYS ET A L ANNEE PROCHAINE.FINI LEUR ARABESQUE DANS LE CIEL


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la vie est belle a la retraite que tu en ai 60 ou 70 ou plus si tu es en bonne santé! tamalou? mot a eviter;
les poemes un passe-temps sans aucune pretention dans la beauté de l'aurore avec le soleil qui me fait des levers pharaonique sur la mer...

plumedoiseau
Envoyé le :  3/11/2013 13:45
Plume de platine
Inscrit le: 10/4/2013
De: Province de Liège
Envois: 2647
Re: Histoire loufoque
Merci pour votr passage sur cette histoire loufoque... Il paraît que tout ce qu'on pense, ou imagine, est prêt à se réaliser, ou se passe quelque part....

Amitiés

Anne


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Sybilla
Envoyé le :  10/6/2023 0:46
Modératrice
Inscrit le: 27/5/2014
De:
Envois: 95520
Re: Histoire loufoque
Bonsoir ma chère amie Anne

Quelle merveilleuse histoire sur les hirondelles !



Belle soirée chère amie poétesse Anne !
Toutes mes amitiés
Gros bisous
Sybilla


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Presque toutes mes poésies ont été publiées en France et ailleurs avec les dates "réelles" de parution.


Le rĂŞve est le poumon de ma vie (citation de Sybilla)

plumedoiseau
Envoyé le :  30/3/2024 10:50
Plume de platine
Inscrit le: 10/4/2013
De: Province de Liège
Envois: 2647
Re: Histoire loufoque
Merci pour ton passage, chère Sybilla, toujours attentive, à ce texte imaginé lors d'un atelier d'écriture il y a belle lurette....
Si j'ai bien compris le message de Sphyria, ces textes pourront être mis sur poèmes pdt qq jours avant d'être déplacés dans la rubrique adéquate. Attention, ici, il s'agit plutôt d'un conte...

Je te souhaite le meilleur pour cette fête de Pâques...

Toute mon amitié

Anne


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RomanNovel
Envoyé le :  1/4/2024 15:51
Mascotte d'Oasis
Inscrit le: 27/8/2022
De: Dordogne - Originaire de Lyon
Envois: 10146
Re: Histoire loufoque
Une magnifique fable au bon dénuement final de ce pont qui existe entre le monde des vivants et celui des morts, une histoire loufoque très originale et superbement racontée.


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