LA MAISON SOURCE
On y vient à pied. On y entre … seul.
Dans le chemin de terre, il s’est perdu d’abord. Il a hésité. S’est retourné. Est revenu. A suivi le sentier étroit qui menait vers la porte…
Il est entré. Doucement. Attendri, surpris par le silence. Lentement, il s’est laissé surprendre davantage… Les lieux, dedans ce soir, révélaient une attente. Oui, les lieux l’attendaient, et l’obligeaient à s’arrêter. S’arrêter pour entendre, pour écouter le bois, les pierres et le chant du passé qui devenait présent. La flamme éclairait l’âtre et les couleurs… Des bleus, des ocres et des rouges illuminaient l’espace, l’invitaient à la paix, au repos, au désir de rester, d’entrer dans leur intimité. Son regard même s’éclaira. Ses pieds, sans qu’il s’en rende compte, le conduisaient, l’emmenaient autour de cette flamme centrale, légèrement bleutée, plutôt violette en son sommet. Il s’aperçut qu’il tournait, retournait, quêtait quelque chose d’indicible qui se trouvait là , devant lui, au centre, et que c’était ce qui se trouvait aussi, il en fut sûr tout-à -coup, au centre de lui-même. Que c’était là ce qu’il quêtait depuis tant de jours, de nuits, de rêves et de chemins passés. Il souffrit. De cette attente, de cette impuissance à se trouver. A s’aimer, à brûler de ce centre.
Pourtant, il le sentit si bien, tout était là . Dans cette maison dans laquelle il venait d’entrer, cette maison en forme d’œuf, cette maison source d’une vie qu’il soupçonnait sans pouvoir y toucher. Là , il était.
Il vit que la flamme l’éclairait encore et l’invitait à la caresse et au bruissement léger. Il l’accompagna, musa quelque berceuse enfouie dans les limbes de sa jeunesse. Là -haut, en écho, un oiseau chanta. Alors seulement, il lâcha, il déposa le poids de son passé sur ce sol en terre battue recouvert de tapis çà ou là . Les larmes lui venaient sans qu’il puisse les tarir à volonté, comme il l’eût souhaité hier encore. Accueilli. Oui, il se sentait accueilli dans ce lieu, par ce lieu qui lui reflétait et sa flamme et son ombre. Rien d’autre ne comptait. Il se trouvait chez lui en lui. Toutes ses errances coulaient le long de ses joues et abreuvaient la terre.
Dehors, le vent avait soufflé et refermé la porte. Il l’avait effleuré de son souffle et lui l’avait reçu. Il entra dans la nuit, lavé et rené…
Dans son sommeil, la couleur de sa peau s’irisa de l’or de la flamme…
Vraiment, il était entré chez lui...
Anne DE MAY
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