Des mines anthracites colorient les nuages.
Et le soleil livide ombre les paysages.
L’air était lourd et chaud, ni figue, ni raisin.
L’été se fige en nuit et août donne le grain.
Sous le ciel mouillé aux couleurs des lavis
La foule qui se presse vers une course aux abris.
L’averse fleurie les rues de corolles translucides
Emportant les souillures dans ses torrents rapides
L’orage gonfle l’espace et pourchasse la vie.
Le vent prend dans sa main les rares parapluies
Ecrasant sans pitié leurs nervures fragiles.
Les arbres pleurent déjà leurs ramures fébriles.
Sur une robe de plomb des zébrures électriques
Animent les façades de sourires diaboliques.
Les perles aquatiques s’abattent sur les carreaux
Et répondent au fracas du tonnerre, en écho.
Tu me happes la main et j’emporte ton pas
Nous sautons les obstacles et les trottoirs se noient.
Au détour d’une rue : une porte cochère
Nous offre, inattendu, un asile de pierre.
Dans les vapeurs opaques, parfumées de bitumes
Je goûte aux revirements qui me donna fortune :
Enveloppés des drapées de la pluie cristalline
Tu m’offris ce baiser d’indécence divine.
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“C'est à partir de toi que j'ai dit oui au monde - Paul Eluard”