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     Le mouton du sacrifice
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Expéditeur Conversation
Ougounnine
Envoyé le :  15/10/2012 17:27
Plume d'or
Inscrit le: 11/6/2009
De: Maroc
Envois: 563
Le mouton du sacrifice


L’histoire que je vais vous raconter s’est déroulée à la fin des années quarante. Le monde se réveillait à peine du cauchemar de la Seconde Guerre et de ses cinquante millions de morts. Le Maroc commençait à réclamer son indépendance avec insistance et les occupants français qui jusque là étaient plus ou moins tranquilles, commençaient à sentir venir l’orage. Casablanca prenait de l’importance de jour en jour et beaucoup de gens s’y installaient.

Moi, je peinais en ces années de disette à joindre les deux bouts. J’étais marié depuis cinq années à peine, mais je traînais déjà trois enfants et le quatrième allait bientôt venir au monde. Je traînais entre les petits boulots et mes revenus déjà dérisoires étaient instables. En fait, je vivotais au jour le jour au grand dam de ma femme qui se démenait comme elle pouvait, dépensant des ressources d’ingéniosité pour nourrir tout ce beau monde à partir de l’argent souvent insuffisant que je lui laissais. Nous ne mangions que des féculents et quelques légumes que ma femme allait ramasser parmi les restes au marché d’à côté.

Nous occupions un minuscule logement composé d’une seule pièce et d’une cuisine sur la terrasse d’une maison dont le seul étage était occupé par mon grand frère Hmad, sa femme et ses six enfants. Il travaillait dans un hôtel du quartier européen tenu par des français et gagnait bien sa vie. Il s’habillait à l’européenne et ses enfants étaient aussi bien vêtus et bien mieux nourris que leurs cousins, ce qui créait de fréquentes disputes entre moi et Fatima mon épouse qui était une cousine de Rkia la femme de mon frère aîné.

Rkia ne perdait aucune occasion pour montrer les vêtements et tenues que lui achetait mon frère et prenait un malin plaisir à nous envoyer quelques gâteaux et autres friandises ainsi que quelques fruits et des morceaux de viande pour faire enrager encore plus sa cousine. Cela ne manquait jamais d’envenimer mes rapports avec ma femme et d’accentuer notre malaise.

Malgré mes incessants efforts et mes recherches continuelles, je ne parvenais pas à trouver un emploi stable et bien rémunéré. Je travaillais donc principalement au marché de gros, aidant dans le chargement et le déchargement des camions et des charrettes de légumes et fruits. Je partais tôt le matin avant le lever du soleil et ne revenait généralement pas avant la fin de l’après-midi, trimant toute la journée, tous les jours de la semaine y compris le dimanche.

J’étais arrivé du douar avec ma femme et mes enfants au début de l’été, rejoignant mon frère à Casablanca et fuyant la misère et la famine qui sévissaient chez nous. Mon frère aîné m’a accueilli et m’a trouvé un logement pas cher. Nous passâmes le ramadan suivant tant bien que mal. La fête de l’Aïd Al Adha (fête du sacrifice) approchait de jour en jour. Déjà nous entendions les premiers bêlements dans le voisinage. Puis un matin, quatre jours avant le jour de l’Aïd, mon frère acheta son mouton. Un bel agneau, gras et poilu avec de grandes cornes. Ses bêlements assourdissants se faisaient entendre jusque dans notre mansarde et ma femme commença à me jeter des regards interrogateurs et ses insinuations se multiplièrent.

Les enfants n’étaient pas en reste. Ils me demandèrent où était notre mouton et quand est ce que j’allais l’amener. Ils voulaient jouer avec pendant les quelques jours précédant le jour de la fête et être à pied égal avec leurs cousins. Je repoussai leurs questions, mais mes arguments n’étaient pas du tout convaincants. Finalement, je cédai à leur demande et leur promis le mouton pour le lendemain, soit deux jours avant la date fatidique de la fête. Je ne savais absolument pas comment j’allai tenir ma promesse, étant sans le sou et n’ayant aucun crédit auprès de mes employeurs épisodiques pour prétendre à un quelconque prêt.

‘Demain, j’achèterai un beau mouton cornu et bien gras et vous allez jouer avec, tant que vous voudrez’. Ses paroles, que j’avais dites sous la pression de ma femme et les regards suppliants de mes enfants, résonnaient encore dans ma tête quand j’allai dormir et me tinrent longtemps éveillé. Je considérai la question sous tous les angles et ne trouvai aucun moyen pour avoir la somme nécessaire à l’acquisition de l’ovin tant convoité. ‘Yasbah ou yaftah’ me dis-je, demain on verra, avant de sombrer dans un sommeil léger plein de rêves où les bêlements du mouton de mon frère aîné se mêlaient aux hordes d’énormes moutons noires, détalant à toute allure vers l’horizon.

Je me réveillai peu avant l’aube, fit mes ablutions et la prière. Je sortis dans le froid matinal en direction du marché de gros alors qu’il faisait encore sombre. Des campagnards conduisaient leurs troupeaux de moutons au souk pour les vendre. Et c’est dans la pénombre matinale que j’aperçus le spectre d’une bête solitaire qui reniflait un tas de détritus. Je crus tout d’abord qu’il s’agissait d’un chien errant. Mais son allure et les cornes me confirmèrent que c’était un mouton. Il s’était égaré de son troupeau, et ses propriétaires n’avaient pas remarqué sa désertion. J’essayai de l’attraper mais il détala, s’arrêta plus loin et attendit, se rendant compte que sa horde était partie. Je sus que mon Dieu m’avait envoyé, tel le prophète Sidna Ibrahim, ce mouton pour mes enfants. Je m’approchai prudemment pour ne pas effaroucher la bête. Des passants, croyant que le mouton m’avait échappé, vinrent m’aider à le capturer.

Je conduisis mon mouton plus loin de peur que son propriétaire ne s’aperçoive de sa défection et revint sur les lieux. Je marchandais ensuite avec un charretier qui nous conduisit, mon cher mouton et moi à la maison. Il m’aida à l’installer à la terrasse et à bien le ligoter. Je considérai le mouton pour la première fois à la lumière du soleil qui commençait à se lever. C’était un très beau spécimen bien gras, il était aussi imposant que celui de mon frère. Mon épouse s’était levée et préparait le petit déjeuner. Je la conduisis à la terrasse et elle son visage s’illumina quand elle aperçut le mouton. Elle me demanda comment j’ai pu l’acheter et je lui répondit que mon patron m’avait avancé l’argent.

Elle profita de l’occasion pour réveiller les enfants un peu plus tôt, leur annonçant l’heureuse nouvelle. Ils ne se firent pas prier et coururent directement vers la terrasse admirer l’ovin qui les regarda, étonné de susciter tant d’intérêt. Il ne commença à bêler que quand il entendit les bêlements de son voisin du dessous ! Nous passâmes une très bonne fête, nous régalâmes de viande.

Personne, même ma femme, ne sut jamais rien de la façon dont j’ai acquis ce mouton. Je remerciai Dieu de sa générosité et priai pour qu’Il me pardonne de ne pas avoir cherché à le rendre à son propriétaire !


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Pouvoir, c'est vouloir

Mostafa
Envoyé le :  17/10/2012 0:02
Mascotte d'Oasis
Inscrit le: 2/5/2008
De: AGADIR.MAROC
Envois: 14894
Re: Le mouton du sacrifice
C'est un présent divin!Il a bien fait de ne pas le rendre.C'est la justice céleste qui a voulu que les deux frères soient égaux au moins pendant cette fête du sacrifice!
Pourvu que Dieu m'envoie un beau bélier moi aussi; j'en ai terriblement besoin .On dit que les ovins coûtent les yeux de la tête, cette année! Que Dieu nous vienne en aide!



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Ma vie n'est plus une barque dans une mer enragée
Et je ne suis plus le naufragé!
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Mostafa, point fat, seul, las, si doux, rêvant de sa mie!!!

Ougounnine
Envoyé le :  18/10/2012 17:03
Plume d'or
Inscrit le: 11/6/2009
De: Maroc
Envois: 563
Re: Le mouton du sacrifice
En plus, cette nouvelle est inspirée d'une histoire vraie ! Merci cher ami pour l'avoir lue et commentée.


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Pouvoir, c'est vouloir

Honore
Envoyé le :  19/10/2012 9:36
Modérateur
Inscrit le: 16/10/2006
De: Perpignan
Envois: 39531
Re: Le mouton du sacrifice
Comme quoi il existe une justice divine à laquelle il faut toujours croire.
HONORE
Ougounnine
Envoyé le :  23/10/2012 18:53
Plume d'or
Inscrit le: 11/6/2009
De: Maroc
Envois: 563
Re: Le mouton du sacrifice
Merci de la lecture et de votre commentaire. Amitiés.


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Pouvoir, c'est vouloir

Amedyaz
Envoyé le :  8/11/2012 22:31
Mascotte d'Oasis
Inscrit le: 7/8/2006
De: Tafraout Maroc
Envois: 17695
Re: Le mouton du sacrifice








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"Je n'existe que dans la mesure où j'existe pour autrui"
Manet




Mon blog : http://amedyazamazigh.blog2b.net

Ougounnine
Envoyé le :  9/11/2012 11:54
Plume d'or
Inscrit le: 11/6/2009
De: Maroc
Envois: 563
Re: Le mouton du sacrifice
Merci cher ami pour tes encouragements


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Pouvoir, c'est vouloir

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