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     TRANCHES DE VIE A BALAGUIER 7
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Envoyé le :  3/7/2012 13:42
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TRANCHES DE VIE A BALAGUIER 7
TRANCHES DE VIE A BALAGUIER - Souvenirs 1950 -

VUES SUR RADE

La façade de notre maison donnait, plein est, un large aperçu de la Rade ; il suffisait de « descendre » sur la corniche pour bénéficier d’un panorama en cinémascope. En vedette : la mer bien sûr, au fil des saisons et du temps.
Au calme et au soleil du matin, miroir étincelant, et plus dans la journée, miroir réfléchissant Saint Mandrier à l’envers. Au lever de risées, les zones de calme plat se moiraient de plages de friselis à géométrie complexe et changeante.
Lorsqu’il faisait gros mistral, on avait l’impression que la mer s’enfuyait vers la passe, en vagues courtes frangées d’écume; on disait : la mer fait des moutons… C’était un concert de sifflements dans les pins.
Quand venait la tempête de vent d’est, la musique changeait, mugissements rythmés du choc des grosses vagues sur la murette de la corniche et les monceaux d’algues entassées contre, malaxées, triturées , reprises et renvoyées au bord. On voyait de grandes gerbes blanches sauter par-dessus la jetée de la passe. Le bord de l’eau était noyé d’embruns qu’on sentait jusqu'à la colline ; le trottoir et la chaussée étaient parsemés de flaques et de débris improbables, liège bois et bidons…
Lorsqu’on prenait le coté du chemin du Bois Sacré ramenant vers l’Eguillette, on arrivait au terrain militaire et le chemin descendait abruptement sur la route littorale. Le regard embrassait d’ouest en est le Mont Caume, le Mont Faron et le Coudon, avec un point de vue unique sur la « grande rade » : Toulon, l’Arsenal et le port militaire depuis la pyrotechnie (La Pyro pour les intimes) jusqu'à l’atelier des torpilles et la Tour Royale. L’essentiel de la Flotte française mouillait là. Prés de la Pyro, les sous-marins, ensuite la flottille des dragueurs de mines et les avisos, le Dixmude, cargo transformé en porte-avions par l’ajout d’un pont d’envol sur pilotis, les navires de support logistique, ravitailleurs, le dock flottant « Le Foudre », le paquebot transport de troupes « Louis Pasteur » (quand il était là) et l’unique vrai porte-avions : l’Arromanches. Après venaient les escorteurs et frégates, les torpilleurs et contre-torpilleurs carénés en lame de couteau et enfin les cuirassés, mastodontes impressionnants hérissés de tourelles d’artillerie : le Georges Leygues et le Jean Bart qui gardaient l’entrée du port de la ville. Toute la bordure ouest de la Grande Rade était encombrée d’épaves renflouées venant du sabordage et de navires déclassés, qui attendaient d’être démantelés et livrés aux chalumeaux pour nourrir les hauts fourneaux.

VIE SUR RADE

Certes, la Rade de Toulon était une belle carte postale ; mais c’était aussi et surtout un spectacle permanent. Il se passait toujours quelque chose. Tout ce qui entrait et sortait des ports défilait devant Balaguier, comme à la parade.
A commencer par le transport local des passagers. Au tout début, les liaisons entre Toulon, La Seyne, Tamaris et Les Sablettes se faisaient par des bateaux hors du temps, reliques des rêves de Michel Pacha. Imaginez ça : coque basse et noire, cabine genre wagons de troisième classe, longue cheminée et machine à vapeur centrale qui entraînait directement deux grandes roues à aubes carénées. Les bastingages et superstructures étaient constellés de bouées de sauvetage rondes, blanches et rouges, et de radeaux de liège orange. Mississipi et Auberge du Cheval blanc réunis ! Ces ancêtres furent un temps remplacés par des vedettes avant que le service soit interrompu de longues années.
Il y avait aussi le Pipady ; Le Pipady c’était la navette militaire qui reliait Toulon à Saint Mandrier, au bénéfice des personnels de la Base et des arpètes de l’Ecole des Mécaniciens.
On comptait aussi les grosses vedettes blanches qui faisaient le service des Iles d’Or (îles d’Hyères) ; plus les bateaux de plaisance, élégants voiliers et croisiéristes…
Les mouvements des bateaux de l’Escadre étaient pour moi d’un intérêt passionnant. Les bateaux entraient ou sortaient, bannières et fanions au vent, avec les marins alignés sur le pont lors des parades. Longs fuseaux noirs des sous-marins, escorteurs, frégates, croiseurs, porte-avions ; comme les engins de guerre sont beaux !
On voyait régulièrement le paquebot Louis Pasteur, coque noire grêlée de hublots, flottaison rouge, très haute sur l’eau, superstructures blanches, énorme et unique cheminée noire. Il était réquisitionné pour acheminer troupes et matériels vers l’Indochine. C’était un grand parfum d’Extrême-Orient aux rumeurs évocatrices d’aventure et de gloire, Hanoï, Saïgon, les Viets, le trafic de piastres, qui chatouillaient mes oreilles innocentes.
Car la guerre était partout ; quelquefois nous avions droit au grand ballet aéronaval. Les grands hangars à toit courbe de Saint Mandrier abritaient les hélicoptères et une escadre d’hydravions : des quadrimoteurs tout blancs Sunderland et quelques bimoteurs Catalina qu’on voyait évoluer, amerrir et décoller dans le grondement des moteurs et les gerbes d’écume. Lors d’exercices combinés, ils avaient rendez-vous avec les avions Corsairs, les TBM, les Vampires à réaction… Les avions Nordatlas larguaient les parachutistes en chapelets de corolles blanches au-dessus de la digue. Les hélicoptères Sikorski, les HUP birotors, les récupéraient en mer. Il y avait l’image, mais aussi le son : mitraillage des baudruches aériennes tractées, relayé par le tonnerre assourdi des canons de 155 et 90 aux essais du polygone de La Renardière et le staccato de tourelles Bofor de la batterie de Saint Elme .
Ambiance, ambiance. Presque le jour le plus long avant Daryl Zanuck ! Comment ne pas être imprégné de ce spectacle belliqueux et rêver exploits héroïques et glorieux.
Lorsque l’aviso La Découverte passait en vue de la maison, nous étions tous à faire de grands signes et saluer Papa, qui nous voyait, c’est sûr, illusion soigneusement entretenue par Maman…

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