LE DIVORCE

À force de réécrire cette histoire illisible
À force de commencer sans jamais rien finir
À force de regarder mon image invisible
À force de me plaindre au lieu de réagir
À force de faire rimer improbable et possible
À force de m’enfuir pour mieux me revenir
À force de rêver à une paix impossible
À force de me taire pour ne pas faire souffrir

À force d’ignorer vos conseils avertis
À force d’emprisonner mes passions concubines
À force de propager chaque jour mes conneries
À force de cueillir les fleurs par la racine
À force de m’accrocher à la corde de la vie
À force d’apprivoiser les rumeurs assassines
À force de basculer tout droit dans la folie
À force de m’inspirer des textes de Médine

À force de douter de mes capacités
À force de faire semblant d’être un bon citoyen
À force de m’inventer un monde immaculé
À force de m’insurger contre ces cons d’aryens
À force de supporter ma culpabilité
À force de combattre ce mal qui fait du bien
À force de torturer mon cerveau perforé
À force d’empoisonner votre pain quotidien

À force de confondre réel et virtuel
À force de répéter que les murs nous surveillent
À force de m’évader en mode artificiel
À force de consumer les mégots de la vieille
À force de me prendre des râteaux des gamelles
À force d’assassiner le pouvoir de l’oseille
À force de m’échouer comme un radeau sans elle
À force de croupir à l’ombre du soleil

À force de panser mes pseudo-sentiments
À force de hurler à voix basse mes souffrances
À force d’écorcher l’omnipotence du blanc
À force d’immoler mon courage en silence
À force de mépriser l’infection de mon sang
À force de cracher mon venin sur la chance
À force de repenser au rouge moulin d’avant
À force de vous choquer en toute indifférence

À force de m’abstenir quand j’ai la bonne réponse
À force de critiquer sans me remettre en cause
À force d’insulter les croyances qui dénoncent
À force d’être différent de ce que l’on m’impose
À force de m’amuser face aux coups de semonce
À force de museler ma bouche qui overdose
À force de marcher nu dans des bouquets de ronces
À force de préférer les épines à la rose

À force de propager mon image de fêlé
À force de batailler contre la Marseillaise
À force de trop vouloir croire en la liberté
À force de m’abreuver des paroles de Saez
À force de trinquer aux amitiés truquées
À force de m’approcher des rives du Père-Lachaise
À force de parier sans jamais rien gagner
À force de marteler que leur église nous baise

À force de déverser du poison dans mes mots
À force de me tromper même quand j’ai mes raisons
À force de retenir les larmes de mes sanglots
À force d’affronter l’araignée du plafond
À force de scier de mes rêves les barreaux
À force de gravir les marches à reculons
À force de respecter l’être humain par défaut
À force d’imaginer l’autre coté du pont

À force de me cacher sous le masque de l’humour
À force de camoufler mes blessures antérieures
À force de m’endormir quand la nuit se fait jour
À force de murmurer à voix haute mes douleurs
À force d’échapper à la mort qui accourt
À force de voire le pire dans les yeux du meilleur
À force de cultiver les mirages de l’amour
À force d’oublier mes morceaux de bonheur

À force de m’acharner contre un sort qui m’accable
À force de me soumettre au joug dictatorial
À force de réciter que rien n’est équitable
À force de n’être que moi sans pudeur ni morale
À force de présumer que l’on est tous capables
À force d’abuser de substances illégales
À force de songer à ce mal incurable
À force de survivre sous perfusion sociale

À force de parler de ma vie amputée
À force de réfréner mes élans populaires
À force de guérir mais sans cicatriser
À force d’être soigner par des vétérinaires
À force de me mentir en toute sincérité
À force de me noyer en vain au fond des verres
À force de conjuguer mon futur au passé
À force d’enterrer la hache de naguère

À force d’éviter mon reflet dans la glace
À force de m’enivrer de fictions utopiques
À force de sourire en forme de grimace
À force d’entretenir mes défauts empathiques
À force de slalomer au milieu des crevasses
À force de nier mes tocs apodictiques
À force d’escalader les murs du temps qui passe
À force d’assumer mon parcours atypique

À force de respirer l’air malsain qu’on pollue
À force d’appréhender l’instant avant la chute
À force de m’écrouler sous chaque coup de massue
À force de vomir sur tous ces fils de brutes
À force de prêter au risque de moins-values
À force de me maudire quand je cesse la lutte
À force de me convaincre qu’il n’y a pas d’issue
À force de tout gâcher quand je suis proche du but

À force de spéculer à m’en broyer le crâne
À force de m’épuiser dans des mea culpa
À force de jalouser les chansons de Goldman
À force de m’enfoncer dans la paranoïa
À force de patienter comme pour un don d’organe
À force de m’accepter même si je ne m’aime pas
À force d’accuser les pointeurs en soutane
À force de me ruer dans le vide de tes bras

À force d’insinuer que l’Enfer est un choix
À force de balancer des pavés dans la marre
À force de me méfier comme un chien aux abois
À force de militer sans tambour ni fanfare
À force de me forcer à ne plus croire en moi
À force de recompter les mois qui nous séparent
À force de souffrir du manque de ta voix
Et à force de t’aimer malgré qu’il soit trop tard

L’itinéraire se corse
Je peux l’écrire en morse
Même si je bombe le torse
C’est le vide sous l’écorce
Mes faiblesses se renforcent
Et ma vie désamorcent
Je suis à bout de forces
Et du monde je divorce…

23/02/2012

parfois le divorce est nécessaire pour pouvoir reprendre sa vie en main.
J'ai ressenti une grande douleur dans tes mots.

merci pour ce partage !

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Lire, c’est rencontrer du monde, au plus profond de soi.

PARFOIS C'EST LE MONDE QUI NOUS DIVORCE

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les années de disette dictent les poètes

Bel écrit, fort et profond !

des mots douloureux qui me touchent vraiment au fond on partage les même sentiments merci

Waw, quel souffle !!!

a force d'écrire la vie devient poésie, malgré tout...

merci Dom

A

Et, à force de subir ...on divorce

ouah !
quel texte
a bout de souffle !
bravo heureux de te relire !
mes amitiés
yohann

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la nostalgie est un bouquet de fleurs enfoui au fond de votre coeur ,
qui vous embaume quand remontent les souvenirs du bonheur ,
yohann

Bonjour Dom un très long plaidoyer pour une séparation.
Merci pour ce partage.
Mon amitié.

Capricorne

Salut mon DOMI...J etais absent deux mois. Mais sache qu il y a une vie "APRES" le divorce...J ai l experience...ELLE est même plus belle ( la nouvelle, et la vie).Bises Un plaisir de te retrouver là.MERCI.

Je comprends ce choix!

Et bien tu as le cerveau en ébullition pour écrire tout cela

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On a tous le sang de la même couleur

Le divorce, quand tout a été dit.... à quoi continuer sur de mauvaises bases. IRIS

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Tout simplement le genre humain dans un poème...
Chacun peut reconnaître ses propres traits...à peine forcés
Très, très intense...

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" Il y a des volcans dont l'embouchure est à la mesure exacte de l'antique déchirure..." (Aimé Césaire)

il y a dequoi oui...je comprends ta décision, j'ai peur aussi en lisant toutes ces "a force"...
superbe inspiration
merci poétesse

Merc i à toutes et tous pour votre passage...