Je ne veux pas m’endormir.- (8) …à suivre
L’’écran du pc affichait une ligne complète de zzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzz à la suite d’un paragraphe inachevé : sa main était encore appuyée sur le clavier. D’abord perplexe, il comprit vite qu’il s’était endormi un certain laps de temps : il n’aurait pu dire combien de temps car il n’avait évidemment pas noté l’heure. Manque de vigilance pensa – t-il d’assez mauvaise humeur en réprimant un bâillement énorme. Par ailleurs, il se sentait mieux. Mais un mieux sournois, jugea- t-il.
Il avait été piégé au gré d’un instant de confort où il avait baissé la garde. Et pourtant des images lui revenaient pèle- mêle. Que s’est-il donc réellement passé avant qu’il ne tombât dans un autre monde ? L’impression d’avoir vécu un épisode que sa mémoire ne pouvait pas lui restituer. Ainsi, Monique lui aurait rendu visite hier soir.
Monique lui apparaissait, arrêtée à l’entrée, la main posée sur la poignée de la porte déjà entrouverte. Elle restait là immobile, souriante, à l’écoute tandis qu’il lui parlait désespérément. John n’entendait pas le son de sa propre voix. Il se souvenait d’avoir tenté désespérément d’articuler des mots inaudibles. Ensuite, plus rien, ce fut le grand vide : il s’était endormi. Il pensa que la mort serait ainsi facile hormis l’angoisse générée par un marchand de sable inlassable.
Au fond, il était important de vérifier si, oui ou non, Monique était passée le voir hier soir. Une fois encore, il se versa une tasse de café fort. Perplexe, il voulut vérifier. La salle de bain devrait lui parler : Monique ne manquait jamais de se pulvériser un peu de son parfum quand elle venait remettre un d’ordre dans son antre. Il huma la truffe en l’air comme un bon chien de chasse. Rien. Pas la moindre fragrance. Alors c’était son état de fatigue qui l’entraînait vers le délire. Il se surprit dans le en train de secouer la tête. Jadis, il embrassait Monique avec fougue quand elle se maquillait. Aujourd’hui, il n’y avait qu’un être d’une pâleur extrême en proie aux affres de la solitude. Monique désirable. Toujours plus. Pourquoi avons-nous tout détruit des jours heureux ? Elle veut me déculpabiliser: « Ca ne se discute plus, nos torts sont partagés. ». Et donc !
« Qu’ai-je tenté de lui confier, hier soir dans mon délire, Monique, j’ai peur…tu m’entends, j’ai peur. ». John n’était plus sûr de rien. Il eut envie de balancer un grand coup de poing dans le miroir. Sans force, il renonça.
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