LE LIÈVRE ET LE LÉVRIER. (Fable)
LE LIÈVRE ET LE LÉVRIER.
« Je sais que la vérité vaut infortune ;
Je n’y puis pourtant renoncer», K’IU YUAN.
Un jour d’automne brumeux, un chasseur huma
L’air moite de la montagne et se pâma
De la chasse au lièvre, à laquelle il s’arma
D’un bâton et d’un lévrier, qu’il acclama.
Ce beau chien, aux yeux noirs et au museau humide,
Poudroya les longs sentiers, comme un vrai bolide.
Pattes, jambes, poitrine : carrure solide,
Il fit de longues foulées , mais toujours placide.
Avec son maître, ils débusquèrent le gibier,
Un vieux lièvre sauta, sans de rien se soucier,
Aussitôt, le brave chien, tel un épervier,
S’étira à ses trousses, vers un bouclier.
Il lui coupa la trajectoire pour le tenir,
Par le dos, le secouer et l'anéantir.
Mais le malin lièvre, avant de défaillir,
Trouva un bon gîte, à un pouce de périr.
Exigu, toit pierreux, la bête s’y blottit,
Mais le chien, poussé par l’instinct, ne ralentit
Qu’en se brisant le front et point il ne se remit
Le chasseur en prit soin, mais sa tâche s’alourdit.
Il dût alors mettre sur pattes le chien zélé,
Puis rattraper le lièvre fourbe et ailé.
En un mois, le lévrier fut bien profilé
Pour requinquer le moral fortement ébranlé
Alors, l’homme commença par boucher les trous,
Les grottes et les gîtes où se planquèrent les filous
Pour épargner au bon chasseur les graves dessous,
Puis vint le jour où calmer enfin le courroux.
Le vieux lièvre fut rapidement déniché
Et le vigoureux canidé fut vite dépêché.
Ainsi, le jeu de prédation fut déclenché,
Mais la proie ne trouva le gîte recherché.
Sur le coup, le lévrier prit à la volée
Le lièvre, surpris de son refuge annulé,
Il lui brisa les vertèbres ! Fuite calée.
Et le chasseur, trompé, eut tout compte réglé.
A votre tour, d’en dénicher vite la morale,
Voulez-vous que je la dise, elle est géniale :
C’est LA VERITE, qui se cache et se voile,
Mais qui finit par céder, en lutte loyale.