Horizons et espaces infinis
Il priait pour que l’alizé survînt et gonflât sa voile avant que son ennui ne dérivât, l’horizon lui tendait ses bras pervers. Il aurait pu se laisser bercer par l’illusion des espaces infinis, se livrer aux courants incontrôlables, succomber à l’éblouissement d’un reflet sur l’immensité étale ; l’astre pointait l’eau et tendait en permanence sa flèche lumineuse sur l’étrave de sa barque. Il n’avait qu’une hâte, partir. L’horizon et les espaces infinis ne l’effraieraient plus dés lors qu’il pourrait choisir le cap. L’eau nappait l’attente d’un bleu turquoise, de légers clapotis vibraient leurs promesses contre la coque du voilier ; en homme de mer averti, il décryptait leur langage familier et tranquille : n’étaient-ils pas soumis eux-mêmes à l’humeur changeante des éléments ?
Des plaintes étranges lui parvinrent : criaillerie des mouettes qui formaient un manège au faîte du mât sur le fond du ciel céruléen. Peut-être attendaient-elles aussi ?
Soudain, comme si une main invisible les en avait chassées, elles s’éparpillèrent en une multitude de cris lugubres. N’était-ce qu’une illusion, des vaguelettes se formaient avec insistance.
L’homme tendit l’oreille autant qu’il le put. Alors il entendit chanter le grand mât pressentant le souffle nouveau. Il venait de l’Ouest.
Quelques instants plus tard, une voile multicolore vibrait allègrement en toute liberté, et, à la barre, un homme chantait en quête d’horizons et d’espaces infinis.
Pierre WATTEBLED- le 23 septembre 2011
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