Plume de platine   Inscrit le: 10/3/2011 De: Envois: 5194 |
La maison hantée Depuis des années, la sécheresse sévit dans le Sud. Les conditions de vie étaient de plus en plus difficiles, voire même insupportables. Et pourtant, les habitants ne perdirent pas espoir et prièrent nuit et jour.
Cependant, les plus jeunes d'entre eux décidèrent de tenter leur chance ailleurs. Certains s'en allèrent vers le Sahel où les champs sont verdoyants et la récolte des olives toujours fructueuse. D'autres se dirigèrent vers le Nord où il pleut souvent et la terre est fertile. Ils espéraient s'y installer définitivement, oublier leurs malheurs et faire fortune.
C'est ainsi que Hedi, un jeune de vingt cinq ans, issu d'une famille pauvre débarqua dans un petit village du Nord-Ouest, à la recherche d'un travail. L'embauche était facile et Hedi fut aussitôt recruté en tant qu'ouvrier agricole dans l'un des domaines le plus vastes de la région.
Le seul obstacle pour lui était de trouver un foyer pour dormir. Dans cet endroit, il n'y avait ni pension, ni motel, ni hôtel. Consterné, il demanda l'aide de son employeur qui lui proposa d'habiter dans l'une de ses fermes où il y avait une maison abandonnée, complètement délaissée depuis longtemps. Hedi, ravi, accepta sans hésitation et son patron M. Mouheb lui accorda la journée pour s'y installer.
Tout à l'intérieur de cette maison était ancien et dénotait un certain goût raffiné. Les chambres étaient vastes et bien équipées des meubles sculptés dans de l'ébène. Des statuettes représentant des héros mythiques remplissaient le salon et lui donnait un aspect étrange; on dirait un temple.
La poussière recouvrait tout et Hedi fut obligé de dépoussièrer l'endroit. Il passa la journée à la besogne sans pour autant en finir. Alors, il décida de continuer le nettoyage la nuit. Il s'attaqua en dernier lieu au salon.
En frottant l'une des statuettes, une silhouette de forme bizarre surgit. Hedi, muet, resta cloué au sol. Le fantôme lui ordonna de ne plus toucher aux statuettes, de quitter immédiatement le salon et de ne plus y mettre le pied et disparut.
Le pauvre jeune homme était terrifié : son cœur battait la chamade, ses dents claquaient et ses jambes tremblaient. Il se frotta les yeux, se pinça le bras. Il crut somnoler, avoir fait un cauchemar. Il décida alors d'aller se coucher. Il faisait déjà trop tard et le lendemain il devrait se réveiller tôt pour sa première journée de travail dans le champ de M. Mouheb.
Dès que les premières lueurs du jour apparurent, Hedi sauta hors du lit, se prépara un bon café chaud pour se réchauffer et prit le chemin du champ. Il y rencontra de nombreux ouvriers qui hâtaient le pas. Est-ce parce qu'il faisait trop froid ou trop tard ? Hedi se rejoignit à eux et essaya de parler à un jeune homme au teint basané.
Ce jeune homme s'appelait Mehdi. Il était grand et mince. Il avait les cheveux bouclés et les yeux clairs. Les deux jeunes se sont placés l'un à côté de l'autre pour creuser les rigoles, arracher les mauvaises herbes…
Durant la journée, ils ont fait humble connaissance. Ils ont parlé de leurs joies et peines. Mehdi fut étonné, éberlué en entendant Hedi dire qu'il venait de s'installer dans la maison abandonnée. Il lui conseilla de chercher un autre asile, de ne plus y retourner. D'ailleurs personne dans le village n'osa s'y approcher. Cette maison était le fief des fantômes. Tout le monde l'appelait la maison maudite.
A cet instant, Hedi réalisa que la veille n'avait pas rêvé de fantômes, mais il avait vraiment vu l'un d'eux. Il en fit part à Mehdi et lui demanda d'amples explications au sujet de cette maison.
C'est ainsi qu'il a appris que cette propriété appartenait autrefois à un prince ziride qui était tombé amoureux de la fille du roi. Il voulait se marier avec elle; mais le père de son bien-aimée s'y opposa farouchement.
Le prince offensé, se sentant blessé dans son amour propre, décida de venger son honneur. Il attaqua la cité royale par une nuit froide d'hiver et réussit à hypnotiser les gardes, à pénétrer dans le palais royal et à s'emparer de la belle princesse. Arrivé dans son palais, il fêta l'évènement : il organisa un gala prestigieux et épousa la princesse qui était consentante.
Le roi suffoquant de colère ordonna le massacre du prince et de tous ses proches. Ses ordres furent exécutés à la lettre, mais la princesse refusa d'accompagner les gardes de son père. Elle s'enferma dans le château de son bien-aimé et mourut de chagrin. Depuis on dit que son âme hantait le lieu et empêchait quiconque d'y habiter.
En écoutant cette histoire, Hedi fut bouleversé. Devrait-il croire ce qu'on racontait et chercher un autre endroit pour se loger ou ignorer tout et continuer à habiter dans cette demeure ?
A la fin de la journée, il y retourna pour voir plus clair. Il avait décidé de passer encore la nuit dans cette maison. Dès qu'il y entra, il entendit une femme qui gémissait. Il avança sur la pointe des pieds, en direction de la voix et à travers une porte entrebâillée. Il vit alors une belle femme aux cheveux blond cendré, aux yeux clairs et à la peau diaphane pleurait à chaudes larmes son défunt mari, le prince.
Dès qu'elle l'aperçut, elle s'arrêta de pleurer et elle lui dit :
- Est-ce qu'on ne vous a pas dit de quitter cette maison, de ne plus y mettre le pied ?
-Oui, bredouilla Hedi.
La jeune femme dit d'une voix intransigeante : Sauvez-vous, avant qu'il ne soit trop tard.
Hedi reprit son courage à deux mains et lui demanda :
- Pourquoi dois-je me sauver ?
-Les gardes du roi vont venir vous tuer. Ils sont impitoyables. Dépêchez-vous de partir, j'ai horreur du sang.
Il fut sidéré par ce qu'il venait d'entendre. Quand il reprit ses esprits; la femme avait déjà disparu. Il resta un moment perplexe, puis il décida de fuir le lieu. Alors, il prit les quelques affaires qu'il avait et partit voir son ami Mehdi pour l'aider à trouver un logement.
Il faisait déjà nuit, sur le chemin, il entendit le bruit des sabots qui se rapprochait, des cavaliers surexcités criaient après leurs chevaux, proféraient des menaces. Ils étaient nombreux. A leur passage, un nuage de poussière envahit l’espace et empêcha davantage de voir clair.
Hedi, terrifié à l'idée d'être massacré par ces hommes farouches, se mit à courir à toutes jambes, en appelant :" au secours, à l'aide…"
Quand il arriva chez Mehdi, il était complètement essoufflé. Il ne put répondre à aucune de ses questions. Il s'assit sur un sofa et tout en tremblant, il n'arrêtait pas de dire qu'ils allaient le tuer, qu'il l'avait échappé belle.
Mehdi essaya de le tranquilliser, il lui expliqua que ce n'étaient qu'illusions; mais Hedi continua à délirer longtemps avant de s'endormir. Alors son ami le veilla toute la nuit.
Le lendemain, Hedi paraissait calme malgré la confusion qui régnait dans son esprit.
2005
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