A Martine Chaboche.
Mes amitiés
C'est un beau matin d'automne, un havre vivifiant,
Près des méandres de l'Ain, aux pittoresques falaises,
Où pique la fraîcheur dans la nappe liquide.
C'est un carrosse d'apparat, le feu dans le vent.
Aux flancs des roches, les eaux tâtonnent.
" Traînées, tourbillons, remous, bulles,"
Je me déchausse, je rentre de plein pied dans la rivière,
J'entends les barbeaux qui remontent le courant,
Qui fouillent la vase en quête du moindre vermisseau.
Un martin-pêcheur sort d'un taillis, plonge vers la surface,
Et ressort, une ablette dans le bec.
Je l'observe, accoudé à une branche d'un sapin;
Son plumage multicolore rehausse le rivage.
Il reprend son envol et s'éclipse dans les bois.
Le décor me séduit, la nature m'enchante,
La rivière déroule son long ruban gracieux
Et semble se perdre au loin dans une écluse.
Les versants des gorges, aux parois abrupts
Etagent leurs draperies piquetées d'essences:
" Chênes pubescents, bouleaux, pins, hêtres,"
Ce tableau me grise en sa palette picturale:
"Aube dénudée, -----déchirement du ciel,
Jour naissant, évaporant les ténèbres,
Mirage infini, éternel recommencement!
Instants éphémères sur une rosée de cristal.
Chants de la vallée, éternité sans fin."
Midi.
Je dis adieu,
Les cloches m'appellent.
Ma demeure m'attend.
Je longe une combe et grimpe un sentier tortueux.
Gagnant le plateau, mon coeur m'interpelle.
Toi, vallée, dont la lumière réconforte mon âme,
Je reviendrai chérir tes couleurs automnales.
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Je crois qu'il n'y ait eu guère d'auteurs qui aient été contents de leur siècle. Vauvenargues.