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   Lettres d'amour
     lettre de rupture
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Expéditeur Conversation
vent2sud
Envoyé le :  10/6/2010 1:06
Plume de soie
Inscrit le: 10/8/2007
De: marrakech
Envois: 93
lettre de rupture
Mon amour,
Je ne sais pas quoi te dire, j’ai les idées qui s’enchevêtrent et l’esprit torturé par les supplices de la tristesse. Je me sens abandonné comme une vieille photo dans le tiroir d’un aveugle. Je ne sais pas comment t’expliquer cela. Je ne vais pas te dire que j’ai des visions mais ce sont plutôt des hallucinations. Les temps des prophéties sont révolus. C’est l’ère des folies.
Je suis fatigué de moi, a fortiori de toi. Donc, ne m’en veux pas car j’en ai assez de moi-même, un seul fardeau me suffit à présent, un seul corps. Tout me fatigue. Mes vêtements, le chemin ordinaire qui mène au travail, le regard des autres qui alourdit mes pas.
Je veux me déconnecter de tout, me démissionner de ce monde, résilier les contrats des obligations fastidieuses envers les autres, brûler mes pièces d’identité, céder mon passeport à un bohémien.
Je ne suis pas encore libre car je suis prisonnier de mes désirs et de mes semblables qui ne veulent pas que je dispose de moi, de mon corps et mes sentiments.
C’est pour cela que je revendique mon droit au non-conformisme. Je ne suis pas comme vous. Je n’habite pas la même stabilité que vous. Ma tête est insalubre à cause de la boue qu’apportent les godillots des voyageurs dans le temps. Même les vents de nostalgie qui s’infiltrent dans la fenêtre de mon âme ne soufflent qu’épidémies et sécheresses. Je ne suis pas comme toi. Je suis entre le ciel et la terre. Entre l’enclume et le marteau. Entre mon corps et la gravité. Entre mes rêves et la réalité. Entre le futur et le passé. Entre l’ambition et le regret. Entre la rébellion et la loi. Entre la liberté et la sentence. Entre le martyre et le suicide. Entre la félicité et le remords. Et pire encore, entre moi et toi.
Cela peut te paraître insensé mais c’est la fatalité qui me poursuit depuis que j’ai essayé de penser loin du nid douillet des idées reçues. Crois-tu qu’avec mon salaire dérisoire on peut fonder un foyer et vivre comme dans les contes, comme bon nous semble ? Il est temps de confronter la réalité circonscrite par mes capacités limitées. Il est temps de démolir les châteaux marginaux qu’on a bâtis pendant trois ans et demi sur le territoire de l’ambition démesurée. Désormais, il ne reste que les vestiges des souvenirs, alors même que le temps se chargera progressivement de produire l’érosion qui les émiettera, pour me consoler dans l’amertume de mon existence. L’archéologie primaire de l’oubli est bien plus antique et puissante que l’architecture humaine des mémoriaux et des statues de marbre érigées en l’honneur des mortels.
As-tu déjà admiré le crépuscule depuis une falaise ? C’est le moment que je désire éternel. Une trêve d’adieu et de retrait. D’ailleurs, c’est tout ce qu’il me faut à présent. Alors, je te libère de tout engagement et de toute promesse pour que je puisse assister chaque fois aux funérailles du soleil le cœur saignant de la couleur fanée de la douleur du crépuscule. Il faut être triste et seul pour voir la clarté entre chien et loup.
En route vers l’inconnu comme ce soleil couchant, ce jour qui saute du calendrier dans le passé nébuleux, je n’ai plus envie de continuer à marcher dans la même route affreusement pavée et bordée de panneaux et de signaux au lieu d’arbres et de verdure.
J’en ai ras le bol ! Je ne supporte plus le mensonge qui agit en connivence avec la cupidité et qui creuse d’énormes fosses communes pour les misérables dont les ossements sont conservés dans le musée des horreurs qui présente l’inhumanité humaine.
Je ne veux plus voir tout ce flot de sang gicler. Tout ce sang si abondant au point d’être moins cher que le pétrole. Toutes ces prostituées qui vendent leurs corps à des charognards de plaisir pour une croûte de pain. Toutes ces règles qui servent l’injustice. Tous ces replets qui régurgitent des discours au vitriol professant l’amenuisement des ressources et la rationalisation des choix budgétaires. Tous ces pauvres qui meurent sans obsèques. Tous ces meneurs sans charisme qui n’écoutent que leurs propres voix. Tous ces opportunistes qui portent au pinacle des nantis imbéciles. Tous ces canons qui étouffent les cris des agonisants et assourdissent les tourterelles. Tous ces paradoxes existentiels me rendent fou de rage. Tous ces discours prolixes infectent mes oreilles.
Je ne veux plus rien. En fait, je veux justement ce « rien » qui est devenu, de nos jours où l’ennui a rouillé nos objets de plaisirs, « tout ». Une petite hutte en roseaux dans un coin retiré est devenue une rareté. Un jour, un ami m’a dit qu’il ne désirait qu’aller vivre à la compagne dans une maisonnette en parpaings en compagnie de quelques chèvres qui paissent nonchalamment dans la prairie d’à côté. Il ne savait pas qu’il demandait trop. Moi, je ne rêverai jamais de quelque chose hors d’atteinte. La réalité peut choquer mais elle ne trompe jamais. C’est la raison pour laquelle je t’ai dit que je ne peux pas te garantir la vie à laquelle tu aspires car je ne peux jamais subvenir à tes besoins par mes moyens insuffisants. Je ne peux plus mentir. Je trouve que c’est une noblesse d’avouer sa bassesse comme c’est le paroxysme du courage d’admettre sa lâcheté. En plus, il n’est jamais trop tard pour recommencer ta vie, bien sûr avec un autre qui saura t’apprécier à ta juste valeur.
En ce qui me concerne, je ne veux que marcher avec l’ombre de mes idées décapitées par la guillotine du silence. Mon corps dont les effluves m’écoeurent est relégué dans les oubliettes d’abstinence à trappes sans clés. Ma haine je l’ai voulu étouffée et l’embryon déformé que ma névrose a avorté manque déjà de métamères.
Ce n’est pas de ma faute tout cela ! J’ai bien voulu vivre avec toi dans un autre monde, plus serein et beaucoup moins cruel. Mais puisqu’il est impossible d’appartenir à une autre terre que cette planète à l’envers, je préfère donc habiter une autre dimension : le silence où je peux voyager sans passeport, voir sans être remarqué et me moquer de l’ironie elle-même.
Si tu veux me voir, suis du regard un oiseau égaré, une vague déchirée entre le flux et le reflux, un vagabond qui s’est débarrassé de sa boussole hésitante. La nuit, je voyage dans des galaxies inexplorées où je savoure avec mon esprit des délices en fermant les yeux. Je deviens le somnambule de mes songes éveillés. Je veux bien que ton portrait soit parmi les images qui encombrent ma tête, que ta voix retentisse parmi les échos qui se fracassaient sur ses parois crâniennes, mais le mieux que je puisse faire c’est de t’épargner de mes préférences et mes choix.
Excuse- moi de déserter les champs de bataille étendus sur ta peau. Je ne suis pas ce soldat vaillant qui sait pointer et tirer. Je ne suis pas non plus ce faiseur de miracles, de victoires et d’orgasmes, celui que tu cherches pour éperonner son corps par tes doigts effilés vers la conquête du jardin de délices. Moi, ce que je peux t’offrir c’est un maigre repas de pensionnaire à la bonne franquette dans ma cage squelettique avec un drap rêche cousu de mes étreintes maladroitement amoureuses. Dans ce monde, je ne me vois plus le cavalier caparaçonné à outrance et chevauchant ostensiblement sa gloire mais plutôt le sobre chevalier destitué à tort qui a vécu de son plein gré en exil au lieu de quémander une piteuse réhabilitation posthume.
Je vois aussi les âmes turpides planer comme des aigles faméliques là où les guerres d’usure immolent les innocents. La stupidité des machines à tuer. Des visions cauchemardesques d’apocalypse imminente. Je vois des choses terribles qui font frémir d’horreur. La catastrophe qui rampe fallacieusement vers la conscience qui roupille. La mélancolie est le café noir du réveil matinal. L’amour est devenu un simple sandwich bouchant le creux du désir charnel sans pour autant combler le vide émotionnel.
Rien que pour dénicher un papier qui est la preuve unique que l’on existe, les handicapés sociaux et les victimes de népotisme gravissent péniblement les pentes savonneuses et escarpées des hautes pyramides de la bureaucratie qui excelle dans la géométrie de l’étourdissement et du désagrément. Le bip du portable est plus significatif qu’un battement de cœur, une visite de courtoisie est substituée à un SMS, l’intuition à une antenne, l’excursion et les jeux de plein air à un jeu vidéo. Le pigeon voyageur est électrocuté par les décharges électriques des câbles téléphoniques.
Le romantisme se perd dans les méandres du langage administratif. Les tentacules du web remplacent nos mains pour faire une caresse dans une rencontre virtuelle. Les gens tapent sur le clavier d’un ordinateur au lieu de jouer au piano. Le chéquier est un diplôme, le corps est un produit commercial qui peut porter un tatouage ou une prothèse en silicone comme label de qualité. La matière envahit nos rêves et en chasse nos âmes. L'Homme est devenu vide et sourd en croyant tout savoir ou tout se permettre. Mais, un sonotone ne peut jamais remplacer une écoute attentionnée. Déjà, Frankenstein eût tort de penser que le secret subtil de la vie est aussi simple qu'un courant électrique. Réduire l'homme à ses rudimentaires besoins matériels équivaut à renier la partie humaine qui l'anime. En être convaincu est un refus qui émane d'un instinct animal inférieur qui mène à la perdition en croyant aveuglément à la survie : l'orgueil… l'orgueil est un état second qui altère la nature. L'orgueil est le poison de la science.
Je ne peux pas t’aimer avec tout ce profond dégoût pour cette aberration terrestre et ces atrocités qui dépassent les limites de ma patience. Par conséquent, je te prie de ne pas te creuser les méninges avec des questions inutiles au sujet de notre rupture. Une acceptation inconditionnée nous épargnera tous les deux, peine et chagrin.


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le vent est l'expression sublime de la nature qui nous rappelle que le mot peut etre aussi transparent que volatile, libre et lancinant..à mon avis,un poème authentiquement écrit est une brise qui caresse les émotions tout en étant susceptible de s'exp...

ondin
Envoyé le :  16/6/2010 1:11
Plume d'or
Inscrit le: 22/3/2008
De: dans les nuages de la joie et l'harmonie
Envois: 745
Re: lettre de rupture
quelle subtil lettre à la fois revoltante et dénoncante des vices et dans l'autre face empreinte d'amour à fleur de la profondeur et de la longueur de l'écrit.
merci du partage.


----------------

mistruzzi
Envoyé le :  24/6/2010 10:05
Plume d'argent
Inscrit le: 18/10/2009
De:
Envois: 409
Re: lettre de rupture


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barbara66
Envoyé le :  8/10/2010 20:29
Inscrit le: 21/8/2010
De:
Envois: 5
Re: lettre de rupture
BRAVO POUR VOTRE SINCERITE ET VOTRE MIROIR DE L EXISTENCE TROUBLE DE L HUMANITE SAUVER QUELQUEFOIS PAR UN SOUFFLE D AMOUR
AU PLAISIR DE VOUS LIRE A NOUVEAU

BARBARA Citation :

kissingyou
Envoyé le :  10/12/2010 14:58
Inscrit le: 10/12/2010
De:
Envois: 4
Re: lettre de rupture
c'est hélas tellement vrai
paradoxalement c'est très beau
dur Ă  lire, dur Ă  vivre ...
Citation :

vent2sud a Ă©crit :
Mon amour,
Je ne sais pas quoi te dire, j’ai les idées qui s’enchevêtrent et l’esprit torturé par les supplices de la tristesse. Je me sens abandonné comme une vieille photo dans le tiroir d’un aveugle. Je ne sais pas comment t’expliquer cela. Je ne vais pas te dire que j’ai des visions mais ce sont plutôt des hallucinations. Les temps des prophéties sont révolus. C’est l’ère des folies.
Je suis fatigué de moi, a fortiori de toi. Donc, ne m’en veux pas car j’en ai assez de moi-même, un seul fardeau me suffit à présent, un seul corps. Tout me fatigue. Mes vêtements, le chemin ordinaire qui mène au travail, le regard des autres qui alourdit mes pas.
Je veux me déconnecter de tout, me démissionner de ce monde, résilier les contrats des obligations fastidieuses envers les autres, brûler mes pièces d’identité, céder mon passeport à un bohémien.
Je ne suis pas encore libre car je suis prisonnier de mes désirs et de mes semblables qui ne veulent pas que je dispose de moi, de mon corps et mes sentiments.
C’est pour cela que je revendique mon droit au non-conformisme. Je ne suis pas comme vous. Je n’habite pas la même stabilité que vous. Ma tête est insalubre à cause de la boue qu’apportent les godillots des voyageurs dans le temps. Même les vents de nostalgie qui s’infiltrent dans la fenêtre de mon âme ne soufflent qu’épidémies et sécheresses. Je ne suis pas comme toi. Je suis entre le ciel et la terre. Entre l’enclume et le marteau. Entre mon corps et la gravité. Entre mes rêves et la réalité. Entre le futur et le passé. Entre l’ambition et le regret. Entre la rébellion et la loi. Entre la liberté et la sentence. Entre le martyre et le suicide. Entre la félicité et le remords. Et pire encore, entre moi et toi.
Cela peut te paraître insensé mais c’est la fatalité qui me poursuit depuis que j’ai essayé de penser loin du nid douillet des idées reçues. Crois-tu qu’avec mon salaire dérisoire on peut fonder un foyer et vivre comme dans les contes, comme bon nous semble ? Il est temps de confronter la réalité circonscrite par mes capacités limitées. Il est temps de démolir les châteaux marginaux qu’on a bâtis pendant trois ans et demi sur le territoire de l’ambition démesurée. Désormais, il ne reste que les vestiges des souvenirs, alors même que le temps se chargera progressivement de produire l’érosion qui les émiettera, pour me consoler dans l’amertume de mon existence. L’archéologie primaire de l’oubli est bien plus antique et puissante que l’architecture humaine des mémoriaux et des statues de marbre érigées en l’honneur des mortels.
As-tu déjà admiré le crépuscule depuis une falaise ? C’est le moment que je désire éternel. Une trêve d’adieu et de retrait. D’ailleurs, c’est tout ce qu’il me faut à présent. Alors, je te libère de tout engagement et de toute promesse pour que je puisse assister chaque fois aux funérailles du soleil le cœur saignant de la couleur fanée de la douleur du crépuscule. Il faut être triste et seul pour voir la clarté entre chien et loup.
En route vers l’inconnu comme ce soleil couchant, ce jour qui saute du calendrier dans le passé nébuleux, je n’ai plus envie de continuer à marcher dans la même route affreusement pavée et bordée de panneaux et de signaux au lieu d’arbres et de verdure.
J’en ai ras le bol ! Je ne supporte plus le mensonge qui agit en connivence avec la cupidité et qui creuse d’énormes fosses communes pour les misérables dont les ossements sont conservés dans le musée des horreurs qui présente l’inhumanité humaine.
Je ne veux plus voir tout ce flot de sang gicler. Tout ce sang si abondant au point d’être moins cher que le pétrole. Toutes ces prostituées qui vendent leurs corps à des charognards de plaisir pour une croûte de pain. Toutes ces règles qui servent l’injustice. Tous ces replets qui régurgitent des discours au vitriol professant l’amenuisement des ressources et la rationalisation des choix budgétaires. Tous ces pauvres qui meurent sans obsèques. Tous ces meneurs sans charisme qui n’écoutent que leurs propres voix. Tous ces opportunistes qui portent au pinacle des nantis imbéciles. Tous ces canons qui étouffent les cris des agonisants et assourdissent les tourterelles. Tous ces paradoxes existentiels me rendent fou de rage. Tous ces discours prolixes infectent mes oreilles.
Je ne veux plus rien. En fait, je veux justement ce « rien » qui est devenu, de nos jours où l’ennui a rouillé nos objets de plaisirs, « tout ». Une petite hutte en roseaux dans un coin retiré est devenue une rareté. Un jour, un ami m’a dit qu’il ne désirait qu’aller vivre à la compagne dans une maisonnette en parpaings en compagnie de quelques chèvres qui paissent nonchalamment dans la prairie d’à côté. Il ne savait pas qu’il demandait trop. Moi, je ne rêverai jamais de quelque chose hors d’atteinte. La réalité peut choquer mais elle ne trompe jamais. C’est la raison pour laquelle je t’ai dit que je ne peux pas te garantir la vie à laquelle tu aspires car je ne peux jamais subvenir à tes besoins par mes moyens insuffisants. Je ne peux plus mentir. Je trouve que c’est une noblesse d’avouer sa bassesse comme c’est le paroxysme du courage d’admettre sa lâcheté. En plus, il n’est jamais trop tard pour recommencer ta vie, bien sûr avec un autre qui saura t’apprécier à ta juste valeur.
En ce qui me concerne, je ne veux que marcher avec l’ombre de mes idées décapitées par la guillotine du silence. Mon corps dont les effluves m’écoeurent est relégué dans les oubliettes d’abstinence à trappes sans clés. Ma haine je l’ai voulu étouffée et l’embryon déformé que ma névrose a avorté manque déjà de métamères.
Ce n’est pas de ma faute tout cela ! J’ai bien voulu vivre avec toi dans un autre monde, plus serein et beaucoup moins cruel. Mais puisqu’il est impossible d’appartenir à une autre terre que cette planète à l’envers, je préfère donc habiter une autre dimension : le silence où je peux voyager sans passeport, voir sans être remarqué et me moquer de l’ironie elle-même.
Si tu veux me voir, suis du regard un oiseau égaré, une vague déchirée entre le flux et le reflux, un vagabond qui s’est débarrassé de sa boussole hésitante. La nuit, je voyage dans des galaxies inexplorées où je savoure avec mon esprit des délices en fermant les yeux. Je deviens le somnambule de mes songes éveillés. Je veux bien que ton portrait soit parmi les images qui encombrent ma tête, que ta voix retentisse parmi les échos qui se fracassaient sur ses parois crâniennes, mais le mieux que je puisse faire c’est de t’épargner de mes préférences et mes choix.
Excuse- moi de déserter les champs de bataille étendus sur ta peau. Je ne suis pas ce soldat vaillant qui sait pointer et tirer. Je ne suis pas non plus ce faiseur de miracles, de victoires et d’orgasmes, celui que tu cherches pour éperonner son corps par tes doigts effilés vers la conquête du jardin de délices. Moi, ce que je peux t’offrir c’est un maigre repas de pensionnaire à la bonne franquette dans ma cage squelettique avec un drap rêche cousu de mes étreintes maladroitement amoureuses. Dans ce monde, je ne me vois plus le cavalier caparaçonné à outrance et chevauchant ostensiblement sa gloire mais plutôt le sobre chevalier destitué à tort qui a vécu de son plein gré en exil au lieu de quémander une piteuse réhabilitation posthume.
Je vois aussi les âmes turpides planer comme des aigles faméliques là où les guerres d’usure immolent les innocents. La stupidité des machines à tuer. Des visions cauchemardesques d’apocalypse imminente. Je vois des choses terribles qui font frémir d’horreur. La catastrophe qui rampe fallacieusement vers la conscience qui roupille. La mélancolie est le café noir du réveil matinal. L’amour est devenu un simple sandwich bouchant le creux du désir charnel sans pour autant combler le vide émotionnel.
Rien que pour dénicher un papier qui est la preuve unique que l’on existe, les handicapés sociaux et les victimes de népotisme gravissent péniblement les pentes savonneuses et escarpées des hautes pyramides de la bureaucratie qui excelle dans la géométrie de l’étourdissement et du désagrément. Le bip du portable est plus significatif qu’un battement de cœur, une visite de courtoisie est substituée à un SMS, l’intuition à une antenne, l’excursion et les jeux de plein air à un jeu vidéo. Le pigeon voyageur est électrocuté par les décharges électriques des câbles téléphoniques.
Le romantisme se perd dans les méandres du langage administratif. Les tentacules du web remplacent nos mains pour faire une caresse dans une rencontre virtuelle. Les gens tapent sur le clavier d’un ordinateur au lieu de jouer au piano. Le chéquier est un diplôme, le corps est un produit commercial qui peut porter un tatouage ou une prothèse en silicone comme label de qualité. La matière envahit nos rêves et en chasse nos âmes. L'Homme est devenu vide et sourd en croyant tout savoir ou tout se permettre. Mais, un sonotone ne peut jamais remplacer une écoute attentionnée. Déjà, Frankenstein eût tort de penser que le secret subtil de la vie est aussi simple qu'un courant électrique. Réduire l'homme à ses rudimentaires besoins matériels équivaut à renier la partie humaine qui l'anime. En être convaincu est un refus qui émane d'un instinct animal inférieur qui mène à la perdition en croyant aveuglément à la survie : l'orgueil… l'orgueil est un état second qui altère la nature. L'orgueil est le poison de la science.
Je ne peux pas t’aimer avec tout ce profond dégoût pour cette aberration terrestre et ces atrocités qui dépassent les limites de ma patience. Par conséquent, je te prie de ne pas te creuser les méninges avec des questions inutiles au sujet de notre rupture. Une acceptation inconditionnée nous épargnera tous les deux, peine et chagrin.
Upsha
Envoyé le :  1/2/2011 15:22
Plume d'argent
Inscrit le: 22/8/2010
De: Lighted world
Envois: 470
Re: lettre de rupture
Je trouve très courageux de faire face à un amour qui bat de l'aile et de le terminer de cette façon. C'est absolument mettre fin à un espoir vain et que la souffrance de l'absence conduise vers d'autres horizons car il n'y a plus d'attente.
Il faut avoir goûté à l'absence sans raison et sans rupture, apprendre par les autres, être maltraitée par le silence, l'ignorance, l'indifférence pour savoir que ta lettre -ci, si elle a été réellement envoyée à temps est un secours qu'une rupture, est un respect de l'autre que négligence et j'espère qu'elle l'a reçu au moment de la rupture. C'est savoir regarder l'être qu'on a aimé dans les yeux et par respect et amour lui dire la vérité. Tu es cher auteur très respectable et je te félicite :

"Je ne peux plus mentir. Je trouve que c’est une noblesse d’avouer sa bassesse comme c’est le paroxysme du courage d’admettre sa lâcheté. En plus, il n’est jamais trop tard pour recommencer ta vie, bien sûr avec un autre qui saura t’apprécier à ta juste valeur. "
Upsha


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