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     Lintertextualité (article didactique) suite et fin.
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Expéditeur Conversation
ARobert13
Envoyé le :  7/6/2023 11:41
Plume de platine
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De: Marseille
Envois: 2911
Lintertextualité (article didactique) suite et fin.

L'INTERTEXTUALITÉ 2 (suite et fin)

Le concept de l'intertextualité, que j'associe à un "écho de mémoire", est à considérer comme un phénomène inhérent à une reviviscence d'une perception après un temps de latence. Ceci s'apparente à l'image eidétique. Je n'ai pas l'intention de vous perturber l'esprit en dissertant longuement sur un sujet dont je pense avoir dit l'essentiel ; mais seulement, en guise de conclusion, faire référence plus particulièrement à la poésie, rappelant quelques termes et notions qui, en linguistique, s'attachent à la représentation de ce "dialogisme" selon lequel la doctrine signifie que tout énoncé particulier entretient un dialogue avec d'autres énoncés. (D'où le mot dialogisme, inventé par le sémioticien et poéticien russe Mikkaïl BAKHTINE (1895-1975).

Tout texte, d'hier et d'aujourd'hui, peut être assimilé à cette "balançoire", forme moderne de ce qu'on appelait en des temps révolus : la culture. Autrement dit, le bonheur de posséder en soi, par le travail, par la lecture, la connaissance de livres riches de valeurs littéraires, avec cette faculté d'opérer des rapprochements parce qu'ils se ressemblent, s'opposent, s'appellent ou se repoussent. En prenant ce principe à sa base, on peut dire que la lecture d'un poème fait naître en nous d'autres poèmes en "échos". C'est la façon dont pratique tout spécialiste en littérature comparée, de manière systématique. La conclusion à en tirer est que tout discours, toute écriture, s'échafaudent à partir d'un "déjà-dit".

Julia KRISTEVA, à laquelle nous devons le néologisme et la notion littéraire d'intertextualité (1966-1967), indique dans ses notes, je cite : - "que le mot (le texte) est un croisement de mots (textes) où on lit au moins un autre mot (texte). Tout texte se construit comme une mosaïque de citations, tout texte est absorption et transformation d'un autre texte. À la place de la notion d'intersubjectivité s'installe celle d'intertextualité, et le langage poétique se lit, au moins, comme "double"." (Fin de citation). ("Recherche pour une sémanalyse". Le Seuil, 1969.)

On peut ainsi douter de la théorie romantique de l'inspiration et/ou de la transcendance d'un auteur sur son œuvre, aussi bien que de la transcendance d'une œuvre sur son contexte historique. De même, je pense, il devient difficile, comme dans l'analyse de type structuraliste, de considérer un "texte poétique" indépendamment de tout contexte comme un univers clos et isolé.

Deux interprétations nouvelles s'offrent à notre perspicacité : tout énoncé est en relation avec l'ensemble social considéré comme un ensemble textuel, si l'on s'en réfère à la lecture des études de KRISTEVA et, selon une moindre extension, l'intertextualité implique la présence effective d'un texte dans un autre, comme le fait remarquer G. GENETTE dans ses "Palimpsestes" en 1982.

De telles théories supposent, bien entendu, un lecteur averti, cultivé, et dont la mémoire soit telle qu'il soit en mesure de repérer dans un texte toutes les allusions et références culturelles. Par cette analyse on accède, en poésie, à la fameuse notion de "signifiance", autrement dit, un poème nous dit une chose et en signifie une autre.

Je me permets de citer le poème, en forme de sonnet, d'Alain BOSQUET qui est la parfaite illustration, à mon sens, de la notion qui fait l'objet de ces lignes. Cela est assez explicite, me semble-t-il, pour se passer de tout commentaire.


IMITATEUR

Je parle de vieillesse à la femme que j'aime ;
On me répond : "C'est dans Ronsard, tout ça." Je
Parle
D'un deuil profond et d'une enfant qui s'est noyées ;
On me répond : "Tout ça, c'est dans Victor Hugo."

Je parle d'un cœur lourd comme un lac en colère ;
On me répond : "Tout ça, tu vois, c'est Lamartine."
Je parle de musique et d'un parc dans la brume ;
On me répond : "Tout ça, Verlaine y est passé."

Je parle de partir, là-bas vers l'équateur ;
On me répond : "Tout ça, c'est dans Rimbaud." Je
Parle
De mon orgueil et de ma solitude amère ;

On me répond : "C'est dans Vigny, t'as pas de
chance."
Je ne parlerai plus, de peur de les gêner,
Ces salauds qui sans moi ont écrit mes poèmes.

(A. BOSQUET, "Sonnets pour une fin de siècle).

ARAGON, lui-même, au sujet de l'intertextualité, et en parlant de sa poésie, a écrit, en quelques mots, ce qui me paraît être une très bonne définition de ce phénomène : "Pour moi, je n'écris jamais un poème (…) qui ne tienne compte de tous les poèmes que j'ai précédemment écrits, ni de tous les poèmes que j'ai précédemment lus." (Arma virumque cano. Préface aux "Yeux d'Esa". Les Cahiers du Rhône, 1942).

En conclusion, on peut dire que l'imitation, la parodie et le plagiat ont fait de l'intertextualité, depuis toujours sans le savoir, un peu comme Monsieur JOURDAIN faisait de la prose, alors que d'autres font du charabias. Les exemples ne manquent pas : le centon qui est une "fabrication par collage" de divers éléments empruntés à plusieurs poèmes, suppose, en tout cas, une bonne et assez vaste culture ; je serais tenté de dire, le maniement d'une riche intertextualité.

Comme le langage n'a pas d'autre référent que lui-même, la littérature ne parle jamais que de la littérature, et la poésie est poésie de la poésie. Le "dialogisme" et "l'intertextualité" aboutissent toujours à la notion d'autoréférentialité analysant tout texte comme texte du texte.

ANDRÉ
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Sources : "Encyclopédie thématique Universalis" (2005)
"Dictionnaire de poétique" (Michel Pougeoise). Ed. Belin. (2006)
"Dictionnaire de la poésie française" (Jacques Charpentreau). Ed. Fayard. (2006)


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Citation :

La poésie se nourrit aux sources de la prose et s'embellit au concerto des mots. (André LAUGIER)


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