Souviens-toi, nous étions bien, souviens-toi
Souviens-toi :
Les matins et ta main,
Souviens-moi, nous nous aimions plus que tout, je crois
On a peur, Alzheimer,
Te souviens-tu demain ?
Confusions poétiques, vos fleurs et vos noms :
Pigeon, Moutons, Cochons, Gaston
Tirés du corbillon et ce monde au portillon :
Chérie, Amour, Bébé, Couillon
Penser entre deux eaux, brumes des souvenances
Me ramènent toujours aux jeux de notre enfance
Inexorable et lente, descente vers la naissance
Alzhei MÈRE : son parfum, son berceau, son essence
Je me souviens de juin et il y neigeait déjà
Les messes du mardi et nous pressions le pas
« Tu veux un café ?
Mais où ai-je mis le sécateur ? »
Ta main sur ma main, je me souviens : ma femme, ma sœur
Je me souviens et je t’aime encore :
Quand un esprit quitte son corps
Tu te souviens ? Je t’aime encore
Je te l’ai dit, ma main le dit encore
Souviens-toi tu es venu, il y a longtemps
Hier, la semaine prochaine, il y a cent ans
Destruction poétique et les rimes appauvries
Associent : souvenir, ennui, Oubli
« Tu as eu ton café ? Tu souris
Il faut mettre les fleurs dans la tasse »
Où est le corbillon ? Qui l’a pris ?
J’y ai mis ton prénom au chaud et bien en place.
On avance Alzh AMÈRE, déjà je confonds :
Femme et Frères, pèle et mêle, Sœurs et Fils
Perd les mots, Alzheim HEURES de plombs
On s’écoule, on y glisse, On se noie : Précipice.
Souviens-toi, tu es venu me le rappeler
Nos projets, nos plus beaux jours et nos fêtes et je garde ta main,
Souviens-moi, nous nous aimons, je sais
J’aimerais être tout ça toujours et encore pour demain
Alzheim HEURT, est-ce qu’on frappe à ma porte ?
Maman est passée ce matin : Pour parler, pour qu’on sorte
Dans mon corbillon j’ai laissé une rime de toi, mon cœur
Et on frappe à ma porte, Alzhei MEURT
« Tu souris ? Tu as eu ton café »
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“C'est à partir de toi que j'ai dit oui au monde - Paul Eluard”