Renaissance.

Tout est noir tel le néant précédant la naissance.
Sous un drap blanc, encore inconscient du grand départ, j'ouvre alors des yeux stellaires sur un monde étrange de lueurs.
Par les remous de mon linceul, je suis comme écorché vif ou cicatrisé mort.
Vivre sa blessure, immortel edelweiss des neiges mais seul avec ses rêves de village car du haut de la montagne, il ne voit que des lumières ondoyantes au vent de la nuit. L'alpha et l'oméga. L'améthyste reflet d'un jour. Émeraude cristal d'une fin.
Des images en corps et en cœur. Chorale céleste lorsque ma mère me montrait les bateaux :"paquebots". J'avais alors cinq ans, garagiste sans outils, cheval et jockey, chef d'orchestre qui avait peur de l'orage, Thierry sans sa fronde et à mon actif un billet pour l'assistance publique, maisons d'enfants, nourrices. Quartier Maison-Blanche (Paris) pour maman ça vous pose tout de même déjà un homme. Je pense que c'est durant mon séjour à Nohant, vers l'âge de sept ans environ à l'école de St Chartie, qu'il m'a été donné le goût de lire et peut-être plus tard celui d'écrire.
Écrire pour survivre. J'ai commencé par parler des oiseaux, du parfum des feuilles mortes sous la rosée des matins d'automne. Des étangs qui vous donnent le vertige. Les interminables passerelles de bois que j'avais peur d'emprunter. Des libellules frôlant les nuages de nénuphars. Le ciel, l'eau, la musique. Interroger le sombre qui sommeillait en moi. J'ai dessiné la nostalgie les chants de Noël. Mozart, le verre de jus de pomme à la cantine de l'école. La gouache mes peintures et mes toiles remplies d'étoiles et de desseins.
J'ai dessiné la nostalgie puis des montagnes surréalistes. Comment expliquer le pourquoi, le quand, le comment (why, when, how.) sans tituber sur le récit de son histoire. Voici pourquoi j'écris. Parce que je suis sensible et ambiguë.

Jean-Robert Dray. À Cergy.

Le 28/07/1995. 22h.