Contre temps
Il avait pris l’habitude de partager sa solitude avec une feuille vierge sur un matelas d’alpha et son roseau taillé en pointe qu’il trempait dans l’encrier des cendres noires de ses jours consumés.
Il édifiait une montagne de mots en aval des courbes de l’écriture qu’il posait en guise de pansements sur les plaies de ses maux.
Les battements de son cœur au rythme des sentiments parfois contradictoires qui l’habitaient, rejoignaient la rond effrénée de la toupie à contre sens des aiguilles de l’horloge figée.
Il s’évadait les nuits de pleine lune sur les sentiers de la forêt dense, dans sa quête de l’inconnue.
Il aperçut en amont de la plaine une lueur (Nour) qui prenait forme. Au fur et à mesure qu’il s’approchait d’elle, elle redoublait d’intensité.
Soudain, son cœur s’emplit de joie à la vue de Nour (lumière) dans toute sa beauté. Souriante elle lui tendait la main, l’invitant à partager sa danse.
Sa geôlière ouvrait les portes de sa pensée, le soir venu, pour la libérer. Elle l’enfermait le jour, de peur de la voir s’approcher du soleil et de se faire brûler.
Il se disait dans son fort intérieur : j’ai trouvé chaussure à mon pied.
Dans sa hâte de la rejoindre, il a trébuché sur un tronc d’arbre et s’est tordu la cheville.
A mesure que son pieds s’enflait, il du se résigner à arrêter sa marche. L’aube déjà pointait à l’horizon.
La geôlière n’arrêtait pas de crier après Nour pour venir la rejoindre sans aucune forme de respect.
Il rebroussa chemin, décidé à la retrouver à la prochaine pleine lune.
Sa blessure ne sera qu’un mauvais souvenir. Il pourra enfin enfiler la chaussure, qui lui était prédestinée.
Charef