Oui, de Fukushima c’est lui le dernier homme,
Il habite, tout seul, la zone contaminée,
Les cellules de son sang sont chargées de césium,
Et il ne se nourrit que de plats cuisinés.

Il a dû renoncer, hélas, à jardiner,
Lui qui raffolait tant des plantes potagères,
Car ses légumes à lui étaient empoisonnés,
Il n’était plus possible de cultiver sa terre.

Une fois, à Tokyo, à l’université,
On lui a fait subir un genre de scanner,
Et le compteur Geiger était tout affolé,
Maintenant, il s’en fout de mourir du cancer.

Quand Tepco, au printemps, voulut les évacuer,
Son père, sa mère et lui étaient restés dehors,
Lorsque sa tante, enfin, leur a permis d’entrer,
Elle leur a fait comprendre qu’ils sentaient tous la mort.

Il a dû retrouver son horrible décor,
Où gisent des carcasses fracassées de voitures,
Des cadavres de chiens et des bateaux du port
Une immense décharge qui couve des ordures.

Quand un monde est désert il faut le repeupler,
Mais à quoi bon chercher quelque part une planque,
Il n’est pour lui sur terre nul endroit où aller,
Il aime bien les bêtes mais les hommes lui manquent.

Il n’a jamais rêvé de se faire kamikaze,
D’aller se sacrifier en vain pour son pays,
Ni de tout son passé de faire table rase,
Il n’avait pas senti venir ce tsunami.

La centrale nucléaire était indestructible,
Il fallait au japon trouver de l’énergie,
Hiroshima, jadis, de la bombe fut la cible,
On ne peut s’éclairer le soir à la bougie.

Tant pis, il soigne les chats, les chiens errants aussi,
Les sangliers, les vaches et même les poneys,
Leur vie vaut celle des hommes, c’est sa philosophie,
Il veut sauver son arche, comme le fit Noé.

Dumnac