Quand j'étais pilier de comptoir



Elle avait les seins shamalow
Et la tendresse à fleur de peau
Le mystère latent des rébus

La belle Hélène, la bonne poire
La mère Térésa des comptoirs
La fée marraine des rebuts

Elle t'enveloppait de son aura
Au milieu des rires trop gras
Des intérims en fin d'mission

Et par dessus le zinc encombré
Dans le frange d'un décolleté
Elle te donnait l'absolution!


Elle avait le sens pratique
Et l'indolence pragmatique
Des estropiés du préambule

D'une œillade trop désinvolte
Montait ta fièvre à cent mille voltes
Et te renvoyait dans tes bulles

L'avait la démarche féline
Des nymphes aux ondes opalines
Mais des hanches incorruptibles!

La prohibition du tactile
Offrait du fantasme de style
Aux zombis les plus incrédibles


L'ombilicale exubérance
de ses haleines de jouvence
Mettait du baume à nos bitures

Affalés à sa devanture
Le cœur perdu en conjectures
D'hypothétiques entrevoyures

Dans son sillage, à son approche
On r'mettait nos yeux dans nos poches
Et nos espoirs dans une bière

Et quand elle venait nous servir
Elle nous rendait dans un sourire
L'océan bleu de nos chimères


Quand elle errait de tables en tables
Sa traîne plaidait non-coupable
D'être à ce point insaisissable

La brise obscure de son parfum
Le charme étrange de ses embruns
Rendaient notre misère acceptable

Et quand nos rêves tenaient séance
A l'auditoire de ses silences
Dans une torpeur surréaliste

Il m'est arrivé d'oublier
Jusqu'à l'exactitude glacée
D'une solitude hermaphrodite


y'a des milliers de mots sur terre
T'as qu'à ouvrir un dictionnaire
T'as qu'à voir mon p'tit Larousse!

Mais nous tout c'qu'on trouvait à dire
Pour avoir droit à un sourire
C'était "siouplait, encore une mousse"

Et quand elle posait sur le zinc
Ou sur un bout de table cradingue
Nos placebos, d'un Å“il complice

Par un trouble magie blanche
D'un balancement de ces hanches
Nos verres se changeaient en calices!


L'avait des cils comme des palmiers
Du charme comme s'il en pleuvait
Et à nos heures d'aquaplaning

Devant ses airbags primeurs
Qui nous protégeaient du malheur
Nos lubies faisaient du shopping

A l'assaut de ses fruits sucrés
On montait tous au cocotier
Pour retomber au fond d'un verre

Notre zèle manquait-il d'envergure,
Etions-nous bien murs pour l'aventure?
Une chose est sûre, on était vert !


Le belle Hélène, la bonne poire
La mère Térésa des comptoirs
Un beau jour a reprit sa route

En nous laissant en souvenir
L'extravagance d'un sourire
Et des rêves bleus plein nos soutes

Elle avais les seins shamalow
Et la tendresse à fleur de peau
Le mystère latent des départs


La belle Hélène, la bonne poire
A bien failli nous rendre jobards
Quand j'étais pilier de comptoir...

Un beau poème....de comptoir.
Merci phil pour cet agréable instant.
Mon amitié.

Capricorne

Bravo. Tout y est. L'ambiance, le style, l'invention, le subtil ...
Beau poème à lire et relire au bout du comptoir.

Merci

Cette poèsie a les parfums de celles de Boris Vian.

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"La sagesse est d'avoir des rêves suffisamment grands pour ne pas les perdre de vue lorsqu'on les poursuit" (O. Wilde)

Excellent, vraiment, j'adore.

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Cultivez votre amour de la nature, car c'est la seule façon de mieux comprendre l'art! (Vincent Van Gogh)

un classique de la chanson, merci pour la musicalité et le rythme des vers.

bonne journée.

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" Le secret de ma tristesse est dans la vivacité de mon plaisir "