Il est tout petit le serpent,
Né d’un père bout de ficelle
D’une mère de vermicelle
Comment pourrait-il être grand ?

Il est si petit le serpent
Qu’il habite une maisonnette
Boite, chipée à l’allumette,
Perdue au milieu d’un arpent.

Il est si petit le serpent
Qu’il est, même mis sous la loupe,
Plus fin qu’un cheveu sur la soupe
Qui fait grandir le chenapan.

Il est si petit le serpent
Plus fin qu’un alevin d’anguille
Et s’il croise le trou d’aiguille
Le traverse facilement.

Si l’hiver, le cas échéant,
Un nuage ouvre la paupière
Dix gouttes lui font sa rivière
Et cent lui font un océan

Quand l’orage houspille serpent
Le secoue comme une brindille
Alors, mouillé, le serpent brille
Comme brille un beau fil d’argent.

Quand sur un arbre il se suspend
S’y accrochant par sa queue grise
C’est à une queue de cerise
Que ressemble petit serpent.

Il est si petit le serpent
Que la terre posée en motte
Est une montagne trop haute
Et qu’on rigole à ses dépens.

Il est si triste le serpent
Quand tout lui parait difficile
Que la larme de crocodile
Mouille son Å“il de sacripant.

Triste d’être un petit serpent
Qui voit le cheval qui galope
Qui voit s’envoler l’antilope
Alors que lui, s'en va rampant.