Des arbres du jardin les cimes tremblent toutes.
La pluie ! Oh ! voyez donc comme les larges gouttes
Glissent de feuille en feuille et passent à travers
La tonnelle fleurie et les frais arceaux verts
Des marches du perron en longues cascatelles.
Voyez comme l'eau tombe, et de blanches dentelles
Borde les frontons gris ! Dans les chemins sablés,
Les ruisseaux en torrents subitement gonflés,
Avec leurs flots boueux mêlés de coquillages,
Entraînent sans pitié les fleurs et les feuillages ;
Tout est perdu : Jasmins aux pétales nacrés,
Belles de nuit fuyant l'astre aux rayons dorés,
Volubilis chargés de cloches et de vrilles,
Roses de tout pays et de toutes familles,
Douces filles de juin, frais et riant trésor,
La mouche que l'orage arrête en son essor,
Le faucheux aux longs pieds et la fourmi se noient
Dans cet autre océan dont les vagues tournoient.
Théophile Gautier
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Ouvrez l'oreille, chaque mot possède un coeur qui bouge. (Nimier)