Souviens-toi, mon ami, notre village,
Rappelles-toi, nos maisons à l’allure sage.
Ce vieux hameau calme et tranquille où l’on n’est nés,
Ces lieux et ces endroits que nous avons hanté !
Souviens-toi, mon ami, la grande école.
Rappelles-toi, les sauts les jeux, les courses folles,
Le goût âcre de l’encre et l’odeur de la craie,
De ce grand tableau noir, de la joie des récrés !
Souviens-toi, mon ami, la petite église,
Rappelles-toi, les culottes courtes et les blouses grises,
De ces hivers interminables, froids et neigeux,
Les doigts gelés, les jambes à nu, les genoux bleus !
Souviens-toi, mon ami, notre rivière,
Rappelles-toi, l’eau fraîche, clapotant sur la pierre,
De nos plongeons, des sauts de l’ange et des baignades,
la chaleur de l’été et le goût de l’eau fade !
Souviens-toi, mon ami, les champs de blé,
Les couleurs du Printemps, la moiteur de l’Eté,
Et ces heures passées à piller les fruits mûrs,
Dans le chant du ruisseau, doux et calme murmure !
Souviens-toi, mon ami, les herbes hautes !
Les nids douillets, où nous allions cacher nos fautes,
Rappelles-toi, de ce premier chagrin d’amour,
De la détresse, qui aurait dû durer toujours !
Souviens-toi, mon ami, les avenues !
Et ces grands arbres, dressés comme en revue,
Les fresques des jardins, aux mille et une fleurs,
Tous ces parfums, et ces effluves, et ces senteurs !
Souviens-toi, mon ami, les joies d’antan !
Les petites guerres, les cris les chants, les rires d’enfants,
Les veillées à débattre sous le ciel des tilleuls,
Las, le temps et la mort, y ont mis leur linceul !
Souviens-toi, mon ami, ce gai village !
Où l’on a dévoré, le printemps de notre âge,
Puis l’été est venu et l’automne peu à peu,
Nous amène à l’hiver, tuant les jours heureux !
Que reste t’il, mon ami, de tout cela ?
Les âmes meurent, au gré des logis qu’on abat,
Que reste t’il, un arbre ou deux, deux ou trois pierres,
Une école morte, une église vide, un cimetière !
Quelque années encore, il ne restera rien,
Rien des maisons, rien des jardins, ni des chemins,
Seuls survivront, les souvenirs des temps heureux,
Et parfois quelques larmes, nous ennoyant les yeux !
Adieu, mon vieil hameau, adieu, mon cher village,
Nous voici mon ami, presque au bout de notre âge,
Nous deux, nous en irons, en gardant pour toujours,
Tout au fond de nos cœurs, l’image des beaux jours !!!
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La nature, n'a jamais rien créé de médiocre ! A part l'homme, peut-être...?