A naître dans la joie et la douleur insigne
Tu trouves, spontanée, les lits et les sentiers
Qui couvrent de leurs bras, simple feuille de vigne,
Les abîmes discrets des poètes entiers.
Dévale librement les pentes du volcan
Et lave d'un élan tout désir partisan.
Partage l'innocence et forge les aciers.
Abandonne au présent le soin attentionné
De pourvoir à la soif de découvrir demain.
Ouvre le portillon du don occasionné
A la chaleur diffuse au secours d'une main.
Nourris à profusion les océans sans fond,
Que nul courant contraire, en son sein, ne confond.
Sois sel et pur ferment, tel au pain le levain.
Pardonne au sourd désir d'être le préféré,
Quand le tain du miroir ombre un funeste trait.
Non, ne regrette pas, le temps s'est altéré,
D'inonder un pardon qui brûlait, chavirait.
Ne masque plus l'accès du chemin sinueux
A l'éclat flamboyant d'un geste vertueux.
Si les perles chantaient, rosée en pâlirait.
Ruisselle sur ce dôme agité, où médite
Un enfant de la houle et source du bonheur
De sa venue au jour. Quand, rageur, il s'agite
Au cri de son essor, apaise un peu sa peur,
Tiraillé, effrayé à l'appel du destin.
Mais ne te retiens plus au lever du matin
Où d'un pas lent et fier s'affirme sa vigueur.
Fais briller l'indicible aveu crépusculaire
D'un labeur arrogant fruit d'un gain ambitieux.
Laisse éteindre les feux d'un courroux arbitraire
En cascade d'argent sur des vœux facétieux.
Coule en ruisseau follet au guilleret refrain
De comptines perdues au dictat souverain.
Soulage les tourments de la voûte des cieux.
Pour la foule affamée au joug de jours fourbus,
Abreuve les rizières de satiété urgente
Distribue les cadeaux patiemment attendus,
Délave les couleurs de contrainte latente.
Soumet le révolté à l'abandon soudain
Des luttes incomprises, en exil et dédain.
Rejoins le fleuve aisé loin de crue mésentente.
Jamais barrage hautain ne saurait détourner
Le cours sans intention de ta substance fluide,
Au tourbillon léger dont elle veut bien s'orner.
Rivière sans retour et que l'émotion guide,
Avoue ton nom au front sans faille ni regret,
Et noie tous les remords à l'oubli du secret.
Eclabousse, étincelle, tu es larme limpide.
Erehwon
----------------
Un tien est une illusion mais vaut peut-être mieux
que le vain Tu aurais pu l'avoir!