Il y avait dans un pays, un jeune homme dont les parents, à sa naissance, avaient consulté lfa (Devin) . Et lfa leur avait dit: -"Cet enfant ne doit pas se marier."
Il grandissait, quand un jour au marché passant près de l'étalage d'une jeune fille, il s'entendit interpeller ainsi: -"Jeune homme, je veux devenir ta femme." Il connaissait l'ordre d'Ifa et se contenta de répondre: - "Je ne puis me marier." La jeune fille écouta, mais, résolue à devenir sa femme, elle passa outre.
Apprenant un jour que le jeune homme demeurait non loin de là , la jeune fille alla le trouver, lui parla et fit tant et si bien qu'il accepta de la prendre pour épouse.
Ifà l'avait défendu. Aussi, dès leur première rencontre, le jeune homme mourut. Apprenant ce qui s'était passé, la famille vint trouver la jeune femme, lui reprocha sa conduite et la somma de rendre la vie au défunt.
lfa, consulté, répondit: - "Votre enfant peut vous être rendu, mais, pour cela, creusez une fosse, jetez-y du bois, mettez le feu, et que l'un des parents passe à travers la flamme." Le bokonon(le grand féticheur) , suivi de la famille, creusa la fosse, y mit le bois, l'alluma et l'arrosa d'huile. Mais ni le père ni la mère ni les autres parents n'eurent le courage de passer à travers la flamme.
Par affection pour celui qu'elle avait pris comme mari et se reconnaissant coupable de sa mort, la jeune fille se plaça devant le feu et se mit à chanter. Elle s'avança dans les flammes, mais elle tomba et tout le monde de dire: - "C'est fini, elle brûle."
On jeta du bois, de l'huile, le bois s'enflamma; on jeta encore du bois, on versa encore de l'huile et ainsi jusqu'au matin.
A la pointe du jour, que vit-on arriver ? Le jeune homme et la jeune fille. lis venaient se donnant la main, et le jeune homme chantait:
Si mon père qui a travaillé
Qui a peiné pour ni 'élever
A refusé,
Si ma mère qui a veillé,
Passé, ses nuits près de moi,
A refusé,
Cette jeune femme
M'a délivré, m'a rendu libre:
Je suis comme les autres hommes
L'amour est plus fort que la mort.
Contes du Dahomey (Bénin) de P. Barbeau
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TONTONTIM POUR LES INTIMES