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     LA LETTRE (suite)
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Expéditeur Conversation
MIETTE
Envoyé le :  19/3/2009 10:21
Plume d'or
Inscrit le: 27/11/2008
De: RENNES
Envois: 679
LA LETTRE (suite)
La question reste en suspens, n’attend pas de réponse. L’homme non plus n’attend rien. Son esprit se vide lentement. Il est trou béant. Corps transparent. Il se fait absence, néant. Le temps passe, scandé par le balancier têtu de la pendule, mais la souffrance, feutrée, rôde.

Opiniâtres, les quelques mots émergés de sa lecture reviennent en force. N’a-t-il pas lu ceux-ci « Jean, notre garçon » ? Mais Jean c’est lui l’homme. Qui est alors de garçon qui surgit ainsi dans sa vie ? Un portrait se compose lentement, celui de ce « Jean, notre garçon », celui de cet enfant qui est aussi le sien puisqu’il est son petit-fils. Le cœur lui bat à grands coups, soudain éperdu d’amour pour cet enfant qu’il ne connaît pas, qu’il imagine semblable à Pierre… « Pierre, mon petit ».

Son cerveau s’affole, il se lève brusquement, marche en tous sens à grands pas désordonnés. Puis, impulsé par une profonde détermination il grimpe au grenier, en état d’urgence, pour retrouver les images de son enfant, les images de son bonheur.

Oui, tout est là, dans cette commode poussiéreuse qu’il avait poussée exprès au fin fond de la pièce encombrée, comme il avait chassé les souvenirs aux limites de sa mémoire. Photos, lettres, dessins d’enfant, cahiers d’écolier, tout lui parle de Pierre, lui restitue sa présence.

Il reste longtemps, assis à même le plancher, immergé dans ses souvenirs, au milieu d’un monceau de paperasses qui redessinent son enfant, le garçonnet joyeux, éclatant de vie, yeux rieurs ou adoucis par le rêve, le jeune homme ardent, regard profond et sourire large. « Pierre, mon fils, pourquoi cette faiblesse qui a lessivé les couleurs hardies de ton personnage et t’a transformé en poltron blafard ? »

L’homme suffoque à l’évocation de cette image mutilée de ce garçon qu’il a aidé à se construire patiemment, année après année, avec amour et humilité, ne lui imposant ni sa route, ni ses choix. Il a suffit d’un accident pour déstabiliser l’édifice.

Sa pensée se rue sur la lettre. Un accident, elle parle d’un accident. Tout se culbute dans sa cervelle, idées fragmentées comme des os rompus, craquements insoutenables comme ceux qu métal qui se tord.

L’accident. Pierre qui rentre tard dans la nuit, pas hésitants, gestes incertains. La musique des bruits de ses rentrées tardives en est changée et, oreille en alerte, il descend à la rencontre de son fils. Il trouve un être défait qui lui avoue sans résistance aucune, avoir percuté un cycliste. Il a fui, toute volonté anéantie, au volant de sa voiture assassine. Il a roulé sans aucune notion du temps puis est revenu pour apercevoir les feux et le clignotant d’une ambulance qui s’éloignait. Et le voilà, transi, humilié par sa
lâcheté.

Jean fait front, exhorte son fils à prévenir la gendarmerie, à dire ce qui est arrivé, à s’expliquer. Mais sous ses yeux navrés, son fils se refuse à endosser le fardeau d’un aveu public.

Longtemps ils ont bataillé. Ils avaient appris par les journaux, dès le petit matin, que le cycliste n’avait pas été blessé gravement. Cependant le fait était là, Pierre non seulement avait fui mais il persistait à ne pas vouloir se dénoncer, prétextant qu’il était inutile de s’imposer une telle démarche puisque l’accident avait été sans conséquences graves.

Dans sa rigueur et sa droiture extrêmes, Jean ne put supporter cette démission. Il mit son fils en demeure de parler, et s’il ne s’y résolvait pas, de disparaître à tout jamais de la ville et de sa vie. Grands mots, nobles pensées. Le fils avait disparu laissant le père dans une solitude désertique.

(suite et fin)


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Vous ne donnez que peu lorsque vous donnez de vos biens

C'est lorsque vous donnez de vous-mêmes que vous donnez réellement.

Khalil GIBRAN

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Sujet :  Expéditeur Date
 » LA LETTRE (suite) MIETTE 19/3/2009 10:21
     Re: LA LETTRE (suite) crisroche 19/3/2009 17:14
       Re: LA LETTRE (suite) MIETTE 19/3/2009 18:01
     Re: LA LETTRE (suite) alaplume 20/3/2009 17:06

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