Ma mémoire est intarissable
Qu’une vie ne pourrait suffire
A démêler l’impérissable
De mes chagrins et de mes rires.
Je suis arrivée un matin
Comme un aubain qu’on n’attend pas
Dans cet univers incertain
Peuplé de fous et de malfrats.
Dans une ville sans attrait,
J’ai lutté contre tous les vents
Et imploré dans le secret
Quand on riait à mes dépends.
Alors, j’ai compris, sans façon,
Et j’ai fardé ma belle enfance
En oblitérant de mon front
Le masque blanc de l’innocence.
J’ai enfermé à double tour
L’âme de mes rêves d’enfant
Et j’ai vécu au jour le jour
Avec un loup de courtisan !
Quelques amis m’ont bien aimée,
Mais, ce n’était que des passants
Et je les ai vite oubliés :
Ils n’avaient rien d’intéressant.
Un jour, l’amour s’est invité
Et, dans mon cœur, ce fut la joie
Puis, sans un mot, il m’a quittée,
Il ne m’en reste rien, je crois.
J’ai bâillonné, là , mes envies
Et, sur tous les chemins de France,
J’ai marché sans faire de bruit
Avec le masque du silence.
Ne pouvant aimer Ă ma guise,
J’ai déguisé mes sentiments
Comme on se déguise à Venise,
Avec un masque grimaçant.
Personne n’a su regarder,
Non, personne n’a su me voir ;
Par habitude, j’ai donné,
Mais sans jamais rien recevoir.
Mon passé me démoralise,
Rien ne fait vibrer mon présent,
Mon avenir, quoi qu’on en dise,
Qui sait ce qu’il sera vraiment ?
Pourtant, j’espère au fond de moi
Que, quelque part sur cette terre,
Il y’a une île rien qu’à moi
Où je n’aurai plus à me taire,
OĂą je pourrai enfin donner,
Sans rien chercher Ă recevoir,
Où quand tu dis la vérité,
On ne te met pas dans le noir !..
...Ma mémoire est intarissable
Qu’une vie ne pourrait suffire
A démêler l’impérissable
De mes chagrins et de mes rires.
----------------
(c) Antigone
"L'amour, ce n'est pas se regarder l'un l'autre, c'est regarder ensemble dans la même direction" (Antoine de Saint-Exupéry)