Oasis des artistes: Poésie en ligne, Concours de poèmes en ligne - 6528 membres !
S'inscrire
Connexion
Pseudo : 

Mot de passe : 


Mot de passe perdu ?
Inscrivez-vous !
Petites annonces
Qui est en ligne
109 utilisateur(s) en ligne (dont 99 sur Poèmes en ligne)

Membre(s): 2
Invité(s): 107

poetal, Ancielo, plus...
Choisissez
Pensez-vous...
Hébergez vos images
zupimages
Droits d'auteur


Copyright



Index des forums de Oasis des artistes: Le plus beau site de poésie du web / Poésie, littérature, créations artistiques...
   Lettres d'amour
     Lettre au Grand Meaulne
Enregistrez-vous pour poster

Par conversation | Les + récents en premier Sujet précédent | Sujet suivant | Bas
Expéditeur Conversation
jeanluc
Envoyé le :  14/10/2008 16:33
Plume de platine
Inscrit le: 12/6/2008
De: BRIVE, CORREZE
Envois: 5462
Lettre au Grand Meaulne




j'ai le plaisir de te révéler, que je te dédie cette lettre, en espérant que ma plume ne dérogera et n'effacera ta notoriété inébranlable, toi dont le nom encore, parcourt les fibres de mon coeur depuis si longtemps.
Je me suis toujours demandé, Augustin, si ta folle aventure n'était pas l'antidote à la morosité qui ronge nos facultés intellectuelles, le remède aux dépressions physiques qui alourdissent notre corps, lorsqu'il faudrait préserver perpétuellement, face à notre destin, cette pureté d'enfance qui nous échappe continuellement.
Ton audace de partir en gare de V..., pour prendre les Charpentiers, avec la jument des Fromentins, sur quelle conjonture était-elle fondée? L'effet de produire l'hilarité générale à la classe de St Agathe, en faussant le serment tenu par Mr Seurel, ou bien, est-ce l'orgueil de tes ancêtres qui s'est soulevé en toi, gonflant tes veines de paysan rustre et mystérieux, blessé en ton âme..., toi, dont la bravoure est de lancer des défis et de chercher le bonheur qui nous fuit toujours?
Augustin, quel instinct latent t'avait poussé à fuir, un jour de décembre, la cour du pensionnat? Je ne le sais pas, et ne le saurais probablement jamais, mais je continue pourtant de croire, mon cher Meaulnes, que tu brûlais de quitter en toute hâte, cette enveloppe charnelle et néfaste qui t'empêchait de vivre, de t'exprimer dans ton paradis artificiel, au seuil de tes dix-sept-ans.
Sûrement, tu voulais connaître quelque chose de nouveau, hors de ta vie d'écolier, attendant anxieusement le déclic d'une démarche extraordinaire, et ce coup de tête, de ramener des gens âgés au pays, a été indéniablement le prétexte de ta folle échappée.
Dans quelle quête, espérais-tu, t'enflammer Augustin? Je me perdrais en hypothèses vaines et inutiles. Mais je songerais qu'il n'en est rien; c'était l'intention tout simplement de s'évader, de voler un cheval, sans la moindre idée des conséquences qui s'ensuivraient, avec ce risque quand même, de t'attendre à quelque évènement qui bouleverserait ta fuite impromptue.
Ces signes révélateurs, ils devinrent bien réels, pourtant. En sortant de la bergerie abandonnée, après t'être égaré, à la vue de la flèche d'une tourelle grise, tu compris soudain, que le but était atteint, qu'il n'y avait plus qu'à espérer que du bonheur...
Baignant au coeur de la fête, sur la rive sablonneuse, comme un chemin de halage, il est vrai, tu rencontreras l'égérie de tes rêves, en la personne d'Yvonne de Galais. Serait-ce ça, le bonheur que tu recherchais inconsciemment, gardé et couvé dans le salon d'apparat de ta mémoire? Non, puisque, auparavant, dans le domaine, deux petits garçons te prirent chacun par la main, pour t'emmener au dîner cérémonial, à l'instant, où tu t'apprêtais à quitter les lieux.
Pour toi, il n'était pas concevable de rester figer au cours de St Agathe, à regarder passer, aux carreaux de la classe, devant la grille, les femmes du bourg, les tombereaux qui grinçaient sur les pavés. Non. Il fallait que tu partes vers d'autres cieux, à être tenté par tout ce qui touchait à l'inconnu, à fureter, à embrasser des paysages jamais vus.
Pourquoi, alors, Augustin, avoir perdu les traces du domaine? Le malheur voulut que tu t'endormisses sur la route du retour, au fond d'une vieille guimbarde, où dormaient deux petits êtres charmants. Dans les bruits de la fête, les poursuites enfantines, le bateau filait avec un son calme de machine et d'eau, emportant un charmant costume et une jaquette serrée, aux manches bouffantes aux épaules. Tu regrettais ta balourdise envers Yvonne, tu suffoquais de rage, en face d'une défaite que ton coeur pouvait à peine supporter, et gagné par la fatigue, tu finissais de baisser les paupières, en chassant de ton corps d'enfant le lieu exact de la fête étrange.
Et, pourquoi, alors, Augustin, ton mariage n'a été en tout et pour tout, qu'une chimère? Je comprends maintenant le dénouement final. C'est cette Valentine, cette fille perdue qui a gaché la partie de plaisir. Les Sablonnières n'auraient jamais dû rester dans l'ombre. Obstiné, à l'appel de Frantz, Augustin a repris la route, et ta fiancée, blessée dans son orgueil, t'a laissé partir. Le serment de réunir, l'an prochain, à la maison isolée, Frantz et Valentine, Seurel voulait le tenir à ta place, car ta décision de racheter une faute et de courir peut-être encore à l'aventure ont été plus forts que tout.
Du domaine démoli, où ne subsiste plus que la maison aux volets clots, le narrateur entend parfois, à l'angle du taillis, des torrents de larmes, des airs mélancoliques que lui apporte le vent, lorsque Yvonne de galais, accoudée au piano, joue gravement seule, dans le coin du salon, pour oublier la fuite du Grand Meaulnes.
En conclusion, ce que j'aime en toi, Augustin Meaulnes, c'est cette façon de ne pas prendre la vie au sérieux, tout en gardant quand même, une certaine confiance absolue dans le destin.
J'apprécie aussi, quoique en y mettant une certaine réserve, ta bravoure, ton audace de braver des interdits, de prendre parti pour quelque chose de tout neuf, et j'applaudis surtout Augustin Meaulnes, de mes deux mains, cette idée, cette lumineuse idée, pour avoir suscité du merveilleux, en portant le gilet de soie, cette aptitude à faire entrer mystérieusement l'aventure dans la réalité la plus quotidienne


----------------
Je crois qu'il n'y ait eu guère d'auteurs qui aient été contents de leur siècle. Vauvenargues.

jedis
Envoyé le :  16/10/2008 8:16
Plume de platine
Inscrit le: 28/2/2006
De: MASSILIA
Envois: 9996
Re: Lettre au Grand Meaulne
Jean-Luc ta belle et longue lettre prouve ton interêt pour l'écriture. Toutefois l'absence de paragraphes espacés dans le texte me gène un peu.
Amicalement
Henry


----------------

jeanluc
Envoyé le :  16/10/2008 15:48
Plume de platine
Inscrit le: 12/6/2008
De: BRIVE, CORREZE
Envois: 5462
Re: Lettre au Grand Meaulne




Merci Jedis, pour la remarque. J'y penserai, la prochaine fois.


----------------
Je crois qu'il n'y ait eu guère d'auteurs qui aient été contents de leur siècle. Vauvenargues.

candide
Envoyé le :  31/10/2008 14:16
Mascotte d'Oasis
Inscrit le: 20/10/2007
De: Maroc
Envois: 9760
Re: Lettre au Grand Meaulne
C'est quand même un bel écrit!


----------------
MB CANDIDE

jeanluc
Envoyé le :  7/11/2008 16:27
Plume de platine
Inscrit le: 12/6/2008
De: BRIVE, CORREZE
Envois: 5462
Re: Lettre au Grand Meaulne





Merci Candide pour ta sincère gentillesse.


----------------
Je crois qu'il n'y ait eu guère d'auteurs qui aient été contents de leur siècle. Vauvenargues.

crisroche
Envoyé le :  4/3/2009 8:43
Plume de diamant
Inscrit le: 27/7/2008
De: Résistance
Envois: 13525
Re: Lettre au Grand Meaulne
Merci pour ce partage.


----------------

jeanluc
Envoyé le :  9/4/2009 16:45
Plume de platine
Inscrit le: 12/6/2008
De: BRIVE, CORREZE
Envois: 5462
Re: Lettre au Grand Meaulne





Crisroche. Merci beaucoup pour ta pensée.



----------------
Je crois qu'il n'y ait eu guère d'auteurs qui aient été contents de leur siècle. Vauvenargues.

scarlett
Envoyé le :  10/4/2009 14:58
Plume d'or
Inscrit le: 22/9/2008
De: Ombres et lumières
Envois: 1393
Re: Lettre au Grand Meaulne
Jean-Luc,

Merci de m'avoir fait frissoner, de m'avoir rendu à mes dix-sept ans-mais ça, chez moi, est une activité mentale quotidienne....

Magnifique, ta lettre est magnifique, et c'est aussi une très belle idée de roman, un roman dans lequel tu t'adresserais à différents personnages...

Marie12 et moi avons joué dans un très célèbre remake du Grand Meaulnes-lol, les oasiens le savent, je l'ai déjà évoqué...-, nous en reparlions encore hier, de ce film super 8 tourné il y a des siècles....

Nous sommes tous des Grands Meaulnes, nous sommes toutes des Anna Karenine, des Emma Bovary, des Scarlett o'Hara...

Merci à toi, ta plume est sublime.

Sabine, touchée, en direct des Sablonnières...


----------------
"Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue:
Un trouble s'éleva dans mon âme éperdue.
Mes yeux ne voyaient plus, je ne pouvais parler:
Je sentis tout mon corps et transir et brûler."

Racine, "Phèdre"...

Par conversation | Les + récents en premier Sujet précédent | Sujet suivant |

Enregistrez-vous pour poster