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     Les clandestins malgré eux...
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Expéditeur Conversation
momolemarin
Envoyé le :  21/12/2023 1:44
Plume d'or
Inscrit le: 15/8/2010
De: Orléans
Envois: 1602
Les clandestins malgré eux...
Personnes non désirables à bord

C’est-à-dire, des personnes montées à bord qui n'avaient nullement l'intention de partir naviguer avec nous, mais que des circonstances indépendantes de leur volonté les obligeaient à nous accompagner.
En Hollande, sur le M/S Ventoux, un chargement de dix mille caisses de bière nous donna l'occasion d'embaucher des étudiants, pour donner un coup de main aux dockers professionnels.
Cinq jeunes gens se portèrent volontaires pour cette mission occasionnelle, qui leur permit de se faire un petit peu d'argent de poche.
Le chef des palanquées les répartit: trois dans les cales, les deux autres sur le pont pour pointer les caisses.
Le travail dura une bonne partie de la journée, et se termina tard le soir.
Les jeunes, qui se connaissaient pourtant entre eux, se séparèrent le travail terminé sans se soucier les uns des autres.
Le cargo repartait dans la nuit et quittait l'Europe pour un périple de presque deux mois de cabotage en Afrique.
Ce n'est pas la famille qui nous alerta, le jeune homme était majeur, et devait découcher certainement de temps en temps sans inquiéter pour autant ses proches.
Voici donc après coup ce qui se passa réellement, et qui, pour cette histoire, se termina sans drame, contrairement au récit suivant.
Un des trois jeunes gens de faction dans la cale buvait bière sur bière pour étancher sa soif d'une part, et d'autre part parce que ce breuvage était la boisson nationale. Il dut en écluser pas mal car, la fatigue aidant, il s'allongea derrière des caisses pour s'offrir une petite sieste, sans apparemment inquiéter ses collègues de son absence.
Le travail terminé, les hommes remontés des cales, on ferme tout, et on part. Notre faux clandestin ne se réveille que le lendemain, dans l'après-midi.
"Sa prison" est la première cale tout à l'avant du bateau. Il a beau crier, personne ne peut l'entendre. Ne transportant pas de fret dangereux, les rondes systématiques ne sont pas obligatoires.
Au bout de quarante-huit heures, un marin travaillant sur le pont est intrigué par des bruits sourds semblant venir des cales. Il en parle au «bosco » (maître-d'équipage chef des matelots, et responsable de la cargaison) qui prend sur lui d'ouvrir les portes de cales donnant sur le pont.
 Bien lui en prit, à la deuxième porte ouverte, un énergumène en sort, hurlant, tout hagard, une barbe de trois jours lui mange le visage.
On pense d'abord à un clandestin, un vrai, mais il ne serait pas sorti si rapidement dès l'ouverture de la cale, au contraire, il se serait tapi dans le fond de peur de se faire prendre.
Sans aucune résistance de sa part, il se laisse calmement emmener chez le Commandant, trop content de revoir le jour, et d'être encore en vie.
Un interrogatoire rapide nous éclaire sur son cas ; il faisait bien partie des cinq jeunes embauchés à la dernière escale.
Il est mis hors de cause sur le fait d'être considéré comme passager clandestin. Il veut dans un premier temps que l’on rassure sa famille, ce que le pacha fait aussitôt.      L'armateur, alerté également et en accord avec les siens rassurés sur le sort du garçon, nous donne l'ordre de le considérer dorénavant comme un passager invité, qui devra être débarqué aux frais de la compagnie au prochain port, c'est-à-dire à l'escale vivre et courrier de Cap-Town en Afrique du sud, environ une dizaine de jours aux frais de la princesse, ce qui lui permettra de récupérer les trois jours de captivité involontaires.
Il eut tout le temps de nous expliquer comment il vécut ce qui aurait pu devenir un drame.
Le lendemain, dès son réveil après sa cuite mémorable, il ne lui fallut pas longtemps pour s'apercevoir que le bateau avait pris la mer, et qu'il lui était impossible de sortir de la cale par ses propres moyens.
Sans paniquer, il entreprit alors de taper régulièrement sur la coque avec tout ce qui lui tombait sous la main.
Seul le jour filtrant au travers des fissures des ouvertures lui permit de se guider parmi les caisses embarquées, et il ne se nourrit bien évidemment que de bière.
Pour son départ au Cap, il était devenu l'ami de tout le monde. On promit de se revoir, mais dans d'autres conditions.
Deuxième récit maintenant sur les faux clandestins, toujours aussi vrai, mais ô combien dramatique cette fois-ci.

A Curaçao, sur le M/S Blois, pendant une escale de travaux annuelle.
Le Commandant renseigné par le chef mécanicien des travaux importants à effectuer, ne pouvant être faits par les gens du bord, consignait ceux-ci sur une main courante, et quand la liste était suffisamment longue, en accord avec les représentants de la compagnie, on immobilisait le navire le temps nécessaire à la durée des travaux.
 Le port du chantier n'était communiqué au bord qu'à la dernière minute, le temps que l'armateur trouve un arsenal moins cher que les autres, et surtout sur la ligne régulière du navire, pour ne pas en plus trop retarder les commandes.
Pour ce récit, nous sommes donc à Curaçao, au nord de Caracas, près des côtes du Venezuela.
Immobilisé pour une dizaine de jours, ce sont toutes les soutes à eaux douces qui furent vérifiées, nettoyées.
Une quinzaine d'ouvriers monte à bord pour assurer les travaux. On nous expliqua plus tard que le manquant à l'appel fut déclaré déserteur et recherché partout, sauf sur notre navire.
Bien au fond d'une soute d'eau douce, il se serait endormi certainement ivre, car en fin de chantier, des sirènes hurlaient très forts dans toutes les coursives pour appeler les hommes.
La cale de notre dormeur, mal vérifiée, fut verrouillée et emplie d'eau douce, pour contrôler les travaux.
Eau douce qui soit dit en passant, était justement celle dont les occupants du bateau se servaient pour la boisson, la cuisine, etc. ... (Au départ de chaque port, le plein était fait, et le bord produisait lui-même son eau douce, en cas de pénurie).
Un mécanicien machine, en vérifiant comme tous les jours les niveaux dans chaque cale, fut surpris de voir passer dans un regard en verre comme de la filasse. On mit cela sur le compte du restant de chantier de la dernière escale, et plus personne ne s'inquiéta, jusqu'au jour où, par ce même regard, défilèrent cette fois-ci des choses étranges, sous les yeux ébahis du graisseur, du chef mécanicien et enfin du Commandant appelé de toute urgence.
L'alerte fut donnée, des prélèvements furent retirés de la soute, examinés sommairement par le bord, et l'horreur nous apparut: depuis quinze jours, tout le bord, du mousse au Commandant, nous buvions du bonhomme, et oui, aussi horrible que cela puisse paraître.
Le corps, traîné dans le fond de la soute, par le roulis, le tangage, s'était décomposé plus vite que s'il était tombé dans une rivière, et les cheveux dans un premier temps (que nous prenions pour de la filasse), puis des éléments de l'individu avaient fini en suivant l'aspiration des pompes amenant l'eau jusqu'au point de distribution, par se faire voir par les niveaux de contrôle, qui servent à vérifier l'état de remplissage de cette soute à eau douce.
Heureusement qu'en fin de parcours, un filtre métallique fait office de tamis, pour retenir les corps étrangers en suspension dans l'eau car, en plus de boire notre bonhomme depuis quinze jours, nous en aurions mangé des morceaux.
Trente années après les faits, j'en parle aisément, mais sur le moment, nous étions tous paralysés par la peur. Dès le premier port, nous fûmes tous mis en quarantaine, examens sanguins et analyses diverses, on nous déclara hors de danger.
L'homme noyé devait être sain, sinon je ne vous raconte pas les maladies que nous aurions attrapées.
Mais nous autres marins, avec tous les vaccins que nous avons, les visites médicales nombreuses et sérieuses que nous subissons, personne d'entre nous ne fut indisposé par cette boisson spéciale que nous absorbions depuis quinze jours.

Sphyria
Envoyé le :  21/12/2023 5:42
Mascotte d'Oasis
Inscrit le: 25/4/2021
De: France
Envois: 27533
Re: Les clandestins malgré eux...
Beau récit, très touchant !
Sybilla
Envoyé le :  22/12/2023 21:11
Modératrice
Inscrit le: 27/5/2014
De:
Envois: 95588
En ligne
Re: Les clandestins malgré eux...
Bonsoir mon oncle Maurice,

J'ai lu tous tes livres, mais j'avais occulté ce chapitre.

Quelle décès atroce dans la seconde histoire...
C'est triste...



Belle soirée mon oncle Maurice !
Toutes mes amitiés à Sylvie et toi
Gros bisous à vous deux
Sybilla


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Presque toutes mes poésies ont été publiées en France et ailleurs avec les dates ""réelles"" de parution.

Le rêve est le poumon de ma vie (Citation de Sybilla)

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