Marchez, marchez, courez, sautez !
Ouvrez vos ailes et hop ! Partez.
Usez vos pieds et vos semelles.
Demain, vos jambes
Vous seront sans doûte rebelles.
Partez tant qu'il ya de la vie !
Donnez, donnez sans mesure
Et sans compter.
Demain, vos poches,
Demain, vos champs seront fauchés.
Semez l'amour, semez les chants
Tout en passant.
Comme le pauvre donne à l'un
Sa soupe encore fumante
Et à l'autre son peu de joie
Et son dernier vêtements.
Donnez sans compter et partez !
Écoutez les pleurs, écoutez les chants
Écoutez crépiter le feu de bois
Dans les champs.
Écoutez le murmure des feuilles
Emportées par le vent.
Écoutez le réveil des fleurs
Et le rire d'enfants.
Écoutez les cris des naufragés
Dans un navire en dérive.
Écoutez le roucoulement des pigeons
À une heure tardive.
Écoutez le sanglot d'un nourrissant
Allaité par une mère affamée
Et plus que chétive.
Écoutez se briser les vagues
Le long des rives.
Écoutez tant qu'il ya de la vie !
Humez à grands flots
L'odeur de l'homme
L'odeur du blé,
L'odeur du bois dans la forêt,
L'odeur du pain, l'odeur des chaumes.
Écoutez battre les cœurs des femmes
Rincez vos yeux
D'un homme heureux
Dans leur nudité.
Allongez vos mains pour cueuillir
Un dernier fruit d'été.
Restez loin, mais trop prés
Tant qu'il ya de la vie !
Pensez aux nids saccagés,
Aux ruines pillées,
Pensez à ces têtes sur le trottoir décapitées.
Pensez aux tombeaux jusqu'aux os profanés
Et pis encore, pensez aux belles
Vendues aux encher sur les pavés.
Pensez aux hommes crusifiés
Et arrachez tout doux
Les clous enfoncés dans leur chair
Et leurs pieds.
Pensez aux dananés
Tant qu'il ya de la vie !
Et quoi qu'il advienne,
Et pour tout résumer.
Tournez la face aux années des vaches maîgres
Et des ennuis.
Espirez, surespirez,
Allumez les bougies,
Mettez à la place du cœur une lune,
Un croissant et un soleil qui luit.
Allongez vos bras
Pour cueuillir des étoiles filantes
Leur tout dernier fruit
Et des ténébres leurs trésors
Et les couleurs de leurs papillons de nuit.
Mettez à la place du cœur une lune
Un croissant et un soleil qui luit
Et puis partez !
Usez vos semelles, usez vos pieds !