J’étais un typ’ très ordinaire,
Marié, deux enfants, fonctionnaire,
Petit pavillon en meulière
Vie calme et plutĂ´t sĂ©dentaire. Â
J’attendais la r’trait’ patiemment
Pour voyager de temps en temps
Mais avec ces gouvernements
J’en ai jusqu’à 70 ans… Â
Alors un jour j’ai décidé
D’écrir’ des vers sur un papier
Pour m’envoler, pour m’évader,
Pour jouer les aventuriers. Â
J' me suis assis Ă mon bureau,
Avec un papier, un stylo.
J’allais poser un premier mot
Mais rien n’est v’nu… le vid’… zĂ©ro… Â
J’avais l’ syndrom’ de la pag’ blanche
Ce truc qui transforme en désert
Le moindre mouv’ment de cerveau !
Quoi que je fasse, quoi que je pense
Le satanĂ© syndrome adhère… Â
Le syndrome adhère ! Le chameau ! Â
J'en ai parlé à un ami
Autour d'un' bière ou d'un whisky.
Après quelques verr' bien remplis,
P’tit Ă p’tit, tout s’est Ă©clairci. Â
Il m’a dit : « Mon gars, pour écrire,
Faut êtr’ triste et pis faut souffrir…
L’ powèt’, c’est çui qui parl’ d’av’nir
Alors qu’il va bientĂ´t m…m…mourir ! » Â
Agenouillé dans les toilettes,
Les mains posées sur la lunette,
J’avais la tristess’ du poète
Et sa souffranc’, lĂ , dans ma tĂŞte. Â
Bouche pâteus’, mais regard fier,
Je fixais la mort dans l’eau claire…
C’est sûr, j’allais sortir des ver’…
Mais rien n’est v’nu… mĂŞm’ pas la bière… Â
J’avais l’ syndrom’ de la pag’ blanche
Ce truc qui donn’ le mal de mer
En voyant son reflet dans l'eau
Qui bouge, qui tangue et qui balance
Comm’ sur le dos d’un dromadaire Â
D’un dromadaire… ou d’un chameau !
En sortant les poubelles, un soir,
J’ai discuté, sur le trottoir
Avec la voisin’ dans le noir.
J’ lui ai raconté mes déboires.
Ell ’m’a dit : « Si t’es là lundi,
Pass’ me voir dans l’après-midiÂ
J’ai un livr’ dans ma tabl’ de nuit
Qui devrait régler ton souci. »
Elle est montée, le jour prévu,
Chercher le trésor attendu
Mais lorsqu’elle est redescendue,
Son corsage avait disparu…
Elle me parlait littérature
Ses mains glissées sous ma ceinture…
J’allais tout comprendre, c’était sûr !
Mais rien n’est v’nu…chérie, j’te jure !
J’avais l’ syndrom’ de la pag’ blanche
Ce truc qui rend l’homme adultère
Aussi viril qu’un shamallow
Pas la moindre boss’ de puissance
Bien loin de cell’ d’un dromadaire
D’un dromadaire… ou d’un chameau !
J’ai rendu les mains éperdues
A leur propriétair' déçue
Expliquant que je n'aurais pu
ĂŠtre l'homm' qu'elle aurait voulu.
Plus tard, je lui ai présenté
Cet ami qui voulait m'aider.
La rencontr' s'est si bien passée
Que demain ils vont se marier.
Faisant fi de ceux qui blatèrent,
C'est près de Romans-sur-Isère
Que les deux ĂŞtres solitaires
Vont s' dire "oui" devant Monsieur l' Maire.
Et moi, grâce à cet entourage,
L'ami adepte de breuvages
Et la demoisell' sans corsage,
J'ai enfin pu remplir ma page.
Adieu syndrom’ de la pag’ blanche !
Demain les deux célibataires
Vont vivre leur jour le plus beau.
Tous les témoins de leur romance,
Invités dans la Drôme adhèrent .
La Drôme adhère… pas les chameaux !
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