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Parceval
Envoyé le :  14/2/2019 11:37
Plume de platine
Inscrit le: 11/4/2011
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Les Chantiers (Souvenirs d'enfance)

LES CHANTIERS- SOUVENIRS D’ENFANCE
(Années cinquante)

Les chantiers de La Seyne, à l’époque Forges et Chantiers de la Méditerranée, jouaient dans les poids lourds de la construction navale : paquebots, pétroliers, cargos divers et même navires de guerre.
Les chantiers de Balaguier, Chantiers Maritimes du Midi, en étaient le parfait complément : Sur deux lignes d’assemblage on fabriquait là, de fer et de bois, de plus petits navires tels que chalands, gabares, remorqueurs, vedettes et navettes de transport, dragueurs de mines, chalutiers et yachts rutilants.
Quelques cales de radoub donnaient directement sur la mer, côté Tour Balaguier et recevaient à l’entretien des unités de même gabarit. Plus tard c’est sur ce site que le film « Le petit baigneur » sera tourné.
La baie résonnait du bruit des machines et riveteuses ; des lueurs se reflétaient sur les façades, générées par les chalumeaux et la soudure à l’arc. Il y
avait de l’ouvrage pour quelques deux cent ouvriers métallurgistes et charpentiers de marine.
C’est là que travaillait mon Père, après avoir quitté la Marine Nationale, ouvrier de jour, puis veilleur de nuit.
La mise à l’eau des bateaux achevés était un évènement pour lequel, outre les personnels concernés, tous étaient conviés, voisinage et curieux de passage. La circulation était déviée par la route de La Seyne et le chemin du Manteau vers Tamaris.
Suivant le cas, la Corniche littorale était fermée pour quelques heures : il s’agissait des plus petites unités, plaisance ou pêche assemblées sur des berceaux montés sur essieux pneumatiques multiples ; Un plan de mise à l’eau bétonné faisait face à l’entrée principale du chantier et il fallait tracter et contrôler précautionneusement l’attelage pour traverser la route et le navire se libérait naturellement de son plateau une fois à l’eau.
Pour les grosses unités assemblées sur cale, c’était plus conséquent : la corniche était fermée pour deux ou trois jours, le temps pour une armée de charpentiers, à grand renfort de poutres, cales et madriers, de relier la ligne de mise à l’eau du chantier à sa partie inférieure d’immersion. C’était un ballet animé et sonore et j’étais parmi les curieux fasciné par le labeur.
Les lancements proprement dits étaient l’occasion d’une cérémonie haute en couleur avec des drapeaux et guirlandes partout flottant au vent, estrade des Officiels, Directeurs, Clients, Ediles municipaux, Préfet. Sonorisation puissante et nasillarde diffusant les échos de la musique et des discours. Et ces odeurs particulières, rabattues par le vent : les charpentiers, avec de longues perches emmaillotées d’étoupe répandaient largement le suif chaud sur les patins de bois. Puis sourdaient les coups de masse libérant les derniers liens de la cale. La marraine lançait sa bouteille, un coup de sirène, et la glissade commençait sous les vivats, freinée par de lourdes grappes de chaînes, dans un nuage de poussière. Une grande gerbe d’écume et le navire avait rejoint son élément.
Après c’était la fête, vin d’honneur et apéritif pour les personnels, invités, habitants du hameau et curieux, pendant que le bateau était amarré à quai pour les dernières finitions avant livraison.

Ces années-là étaient dures pour tout le monde : mon Père avait échangé sa maigre solde d’officier marinier pour un salaire de misère comme ouvrier ; Pour améliorer l’ordinaire, il se fit gardien de nuit sur le site. Je me souviens des soirs où nous lui apportions sa gamelle dans sa loge et de son gros pistolet à barillet
dans le holster. Les vols de métaux, cuivre, bronze et laiton étaient fréquents et organisés. Il en fit l’expérience douloureuse en étant proprement assommé et
saucissonné un soir sans lune. Il s’en tira avec quelques points de suture…Il y avait cependant quelques « compensations » en nature : il ramenait le soir sur son dos de chutes de bois d’ouvrage et des clous dont je faisais des bateaux, de guerre évidement, avant qu’il finissent dans le poêle ou la cuisinière ; aussi des chutes de savon de Marseille et de la soude caustique pour faire le savon noir de la lessive.
Pourtant les chantiers ont été la bonne étoile de mon paternel : En 52, il y eut une grosse commande de remorqueurs et chalands pour le compte d’une grosse Société sucrière qui développait à Madagascar une filiale pour la production de sucre de canne brut. Il eut contact avec les Clients qui le débauchèrent, intéressés qu’ils étaient par sa spécialité chaufferie vapeur. En 54 une autre vie commençait pour lui (et pour nous) ; les vaches maigres trouvaient bon pâturage.

Parceval
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