Oasis des artistes: Poésie en ligne, Concours de poèmes en ligne - 6528 membres !
S'inscrire
Connexion
Pseudo : 

Mot de passe : 


Mot de passe perdu ?
Inscrivez-vous !
Petites annonces
Qui est en ligne
85 utilisateur(s) en ligne (dont 77 sur Poèmes en ligne)

Membre(s): 3
Invité(s): 82

cyrael, Fax2014, isabelle24, plus...
Choisissez
Ma passion astrologie et l'observation
HĂ©bergez vos images
zupimages
Droits d'auteur


Copyright



Index des forums de Oasis des artistes: Le plus beau site de poésie du web / Poésie, littérature, créations artistiques...
   Contes et nouvelles (seuls les textes personnels sont admis)
     Lire
Enregistrez-vous pour poster

Par conversation | Les + récents en premier Sujet précédent | Sujet suivant | Bas
Expéditeur Conversation
Mostafa
Envoyé le :  21/5/2016 19:24
Mascotte d'Oasis
Inscrit le: 2/5/2008
De: AGADIR.MAROC
Envois: 14894
Lire

Cher lecteur potentiel, chose promise chose due : A la fin de mon dernier texte intitulé « Écrire », je vous ai promis que mon prochain écrit sera intitulé « Lire ». Homme de parole, de peur de perdre ma crédibilité auprès de vous, je vous remets, en main propre, le texte en question, tout en espérant que vous trouverez un certain plaisir à le lire comme la joie et le bonheur avec lesquels je suis, en ce moment même, en train de l’écrire. Bonne lecture !
Le premier ordre divin donné au prophète Mohamed fut l’ordre de lire. Cher lecteur potentiel, dans le Coran, vous pouvez lire ces versets : « Lis, au nom de ton Seigneur qui a créé, qui a créé l’homme d’une adhérence. Lis ! Ton Seigneur est le très Noble, qui a enseigné par la plume (le calame), a enseigné à l’homme ce qu’il ne savait pas. » . . . L’ordre de lire était-il un hasard ? Sûrement pas ! Dieu, le créateur de toute vie sur Terre et de tout l’univers, Dieu, le premier auteur, ordonna d’abord au prophète de lire ; Lire avant toute autre chose ; La lecture d’abord !
Pourrions-nous, cher lecteur potentiel, trouver une preuve plus évidente, plus convaincante que les paroles de Dieu ? L’immense importance de la lecture est claire et pure comme un ciel d’azur, comme la brillance du cristal. Seule la cécité mentale peut nous empêcher de la voir. Seul l’analphabète ignore l’importance de la lecture. Comment peut-il la connaître et jouir de sa lueur quand il est noyé dans l’obscurantisme, l’ignorance et l’analphabétisme. Comment peut-il lire avec cet horrible handicap ? Il ne connaît même pas l’alphabet, comment peut-il connaître les mots et saisir leur sens ? Pour lui, les mots sont des signes étranges, incompréhensibles et mystérieux… A mon sens, l’analphabète souffre du plus horrible handicap qui soit. Je préfère être manchot ou unijambiste, mais pas analphabète ! Je ne peux imaginer ma vie sans cette fabuleuse faculté de lire. Mon Dieu, ce serait affreux ! Être analphabète, vivre comme une bête, plutôt mourir !

Cher lecteur potentiel, je dois vous avouer que j’étais privilégié en trouvant une place à l’école publique gratuite avec ses maîtres honnêtes, probes, généreux et patients, qui m’ont appris à lire et à écrire, me prodiguant le plus merveilleux des présents : L’outil fabuleux, la clé magique qui ouvre la porte de l’univers du savoir et chasse les ténèbres de l’ignorance. J’étais chanceux d’avoir un père conscient de l’importance vitale et primordiale de la scolarité. Son premier souci était de m’assurer les conditions propices et idéales à l’étude. Il suait, trimait comme un forçat pour que je ne manque de rien et puisse étudier et apprendre dans les meilleures conditions. Il se pliait à toutes mes volontés, ne me refusait rien, me permettait tout. Il me gâtait et me choyait comme un petit prince pourvu que j’étudie sérieusement, que je sois un bon élève, sérieux et studieux. Dieu merci, je ne l’ai jamais déçu ! Certes, il était analphabète, mais ne voulait surtout pas que son fils aîné le soit aussi. Lui, il a appris à l’école de la rue. Les déboires, les déceptions, les désillusions, les faux espoirs, les gifles et les griffes de la vie lui avaient appris tant de choses. Il était sage, intelligent et clairvoyant. Il était simple, humble et bon vivant. Il était intègre et honnête. Il ne touchait jamais à l’argent sale. Il se contentait du peu qu’il avait et avait horreur de faire du crédit. Il était croyant et pratiquant tout en respectant les croyances des autres sans intolérance et sans haine aucune. Il était l’archétype du bon et honnête citoyen. Son péché mignon : le cinéma. A peine âgé de cinq ans, je l’accompagnais aux salles obscures. Il m’offrait une bonne bouteille de limonade bien fraîche et nous plongions dans la féerie du grand écran… Pourtant, une chose primordiale lui manquait terriblement : Il ne savait ni lire ni écrire. Il n’avait pas eu la possibilité d’aller à l’école puisqu’il n’y avait pas d’école au bled de ses origines paysannes. Petit, il était berger et ne savait même pas ce que voulait dire le mot « école » ! C’est pour cela qu’il ne voulait en aucun cas que son fils aîné soit comme lui. Il tenait à ce que j’apprenne par tous les moyens. Pour lui, c’était une question vitale... Je me rappelle comme si c’était hier matin, encore petit élève à l’école primaire, je lui lisais les lettres que lui envoyaient ses frères (qui ne sont autres que mes oncles paternels) du bled. Je lui écrivais aussi les réponses qu’il leur envoyait. J’étais fier d’être son petit secrétaire et je gardais bien les secrets de ses relations avec ses frères et ceux d’autres affaires ! Lui aussi était si fier d’avoir un fils instruit et chaque fois qu’il avait l’occasion de l’exprimer, il ne se gênait guère. Mais le jour où il était le plus fier de son rejeton, c’était quand j’ai réussi à l’examen de sortie du C.P.R et devenais officiellement professeur de français au premier cycle secondaire. Depuis ce jour-là, il ne m’appelait plus que par ce joli mot arabe que j’entends presque chaque jour sur les lèvres des gens qui s’adressent poliment à moi. Ce mot, je l’ai entendu toutes ma vie ; ce mot plein de respect et de révérence, n’est autre que « Oustad ! » (Professeur !)… Je dois avouer que je me sens un peu fier quand on m’appelle « Oustad »… Je disais donc que mon géniteur était fier comme un paon en appelant ainsi son enfant. Il l’était spécialement lorsqu’il s’adressait à moi devant témoins, insistant sur le mot « Oustad », comme s’il voulait leur faire comprendre que lui, simple analphabète, avait réussi à bien élever et éduquer son enfant jusqu’à ce qu’il devienne professeur et apprenne lui aussi aux enfants à lire et à écrire pour combattre ce fléau social dont il était l’une de ses innombrables victimes.
Repos en paix, cher et adorable père ! Mission accomplie !

Cher lecteur potentiel, mon cursus scolaire avait commencé très tôt, trop tôt peut-être : je n’étais encore qu’un bambin à peine âgé de quatre ou cinq ans. Normalement, je devais encore jouer de l’aurore au couchant et voilà que je me trouvais assis sagement, à même le sol, sur une natte de paille pourrie puant la pisse enfantine, ma tablette à la main, ânonnant à m’époumoner des versets coraniques dont je ne comprenais pas le sens, devant le regard de lynx et le long bâton du "fquih" épiant le moindre mouvement suspect, la moindre inadvertance pour me rosser sadiquement ! Je me voyais faisant face à ce monstre qui attendait le moindre chuchotement innocent au petit enfant morveux et crasseux collé à moi par l’ironie du sort, pour me flageller impitoyablement ! Même présentement, frôlant la vieillesse, il me suffit de fermer les yeux et me revoir au "msid" (honorable école coranique traditionnelle) et me souvenir des zébrures du fouet du « Taleb » sur mon corps chétif et fragile, osseux et frêle !... Le "fquih" était un monstre sans une once de pitié et je devais le respecter, le vénérer, l’idolâtrer. Je devais lui faire le baisse-main en entrant et en sortant du "msid" que j’appelais « enfer » ! Et il arborait un sourire sadique et une euphorie voyante en me tendant sa sale main de tortionnaire, jouissant et se réjouissant de mon petit baiser obligatoire, le salopard !... Moi, j’avais la chance et le privilège d’apprendre dès ma prime enfance le sens profond et la sagesse philosophique de l’adage arabe « La main que tu ne peux mordre, embrasse-la ! »
Hélas, j’ai passé toute ma vie à embrasser des mains impossibles à mordre, que je voulais tellement mordre sans jamais avoir l’opportunité ni la capacité de les mordre. Comme je mourais d’envie de mordre à pleines dents toutes ces mains méchantes et cruelles qui m’avaient tant fait souffrir ! Et comme elles étaient nombreuses ces mains qui me giflaient, me boxaient, me bousculaient, m’écartaient, me bloquaient, m’étouffaient et essayaient de m’empêcher de vivre et d’avoir ma place au soleil comme le commun des mortels ! Pourquoi ne les ai-je pas mordues, me diriez-vous, cher lecteur potentiel ? Honnêtement, je ne peux y répondre. Étais-je trop timide, trop lâche, trop impuissant pour le faire ? Étais -je trop clément, trop indulgent, trop pacifique pour le faire ? Je ne peux le dire. Tout ce dont je suis sûr comme des blessures de mon cœur, c’est que les autres m’ont fait très mal, gratuitement, sadiquement et que ce mal a laissé des séquelles. Cependant, je n’ai jamais riposté, je ne me suis jamais vengé. Dieu leur pardonne !

Cher lecteur potentiel, mon père qui croyait aveuglément au maxime « Qui aime bien châtie bien ! », n’hésitait jamais à me cravacher pour me donner une bonne éducation et faire de moi un fils béni, bien élevé, docile, sage comme une image, résigné et soumis. Il donnait légalement au" fquih" et à l’instituteur «l’autorisation parentale » de me mettre à tabac dans le but de m’apprendre à lire et à écrire ! Pour lui, seul le bâton était le moyen pédagogique et didactique par excellence ! Je me rappelle encore sa phrase sanguinaire le premier jour où il m’emmena au "msid". Il dit solennellement au "fquih" : « Je ne veux que ce « Barhouche » (mioche) apprenne le livre de dieu. N’hésite surtout pas à le battre s’il le faut. Toi, tu égorges et moi j’enlève la peau ! » Mon dieu, ils me prenaient visiblement pour un agneau ! Je me voyais entrer à un abattoir au lieu d’une école coranique. Quel horrible cauchemar ! J’ai vite fait d’apprendre l’alphabet arabe et de commencer à apprendre par cœur les sourates coraniques de peur d’être égorgé ! Certes, j’ai appris à lire et à écrire avec le bâton, dans la douleur et la terreur mais j’ai appris. La fin justifie-t-elle les moyens ?

Vous l’avez sûrement deviné, cher lecteur potentiel (je ne doute nullement de votre intelligence), après l’école traditionnelle est venue l’école moderne, sinon je serais maintenant en train de lire le coran dans une mosquée ou une « médersa » !... J’ai vite aimé l’école moderne avec sa classe, son tableau noir, ses tables, son maître avec son tablier blanc, son cartable plein de cahiers, de livres et de fournitures scolaires. Je peux affirmer fièrement que c’était une partie de plaisir pour moi, contrairement à mes petits camarades morveux et crasseux qui voyaient pour la première fois de leur vie les lettres de l’alphabet arabe. Moi, je les connaissais savamment et savais parfaitement les lire et les écrire. Alors, je faisais office de petit instituteur et aidais mon maître à expliquer à ceux qui avaient de grandes difficultés ; cela veut dire les cancres ! Le fait d’aider le maître et même celui d’être un bon élève ne voulait pas dire que j’étais à l’abri du bâton. Bien sûr que non, voyons ! Le maître était le maître absolu, que ce soit dans sa classe ou dans la rue. Malheur à toi s’il te voyait dans la rue ! Quoi que tu fasses, le lendemain matin, prépare-toi, physiquement et psychiquement, au châtiment ! Si tu le vois et tu ne viens pas lui embrasser la main, il te frappera sous prétexte que tu as manqué de respect à ton maître et que tu es un élève impoli et irrespectueux. Si tu le vois et tu viens embrasser sa main comme l’exigent les bonnes manières, il te punira quand même puisque tu étais en train de jouer dans la rue au lieu d’apprendre tes leçons chez toi. Avec lui, le passage à tabac était inéluctable ! De nos jours, des instituteurs pareils n’existent plus. Cette race a disparu à jamais !

Cher lecteur potentiel, j’ai vite appris la langue arabe et cela m’a donné accès au livre. Cet amour du livre m’a été inoculé par ma mère qui, contrairement à mon père, savait très bien lire et écrire l’arabe et le français car elle avait la chance d’entrer à l’école dirigée par les français, avant l’indépendance de notre pays. Ma mère lisait des histoires en arabe et en français et me les racontait le soir avant de me livrer aux bras de Morphée. Dès que j’avais appris à lire, je me suis mis à dévorer les petites histoires et les contes merveilleux. J’avalais ces collections pour enfants comme des petits pains ! Je lisais même les Mille et Une Nuits en cachette. Encore petit, ce recueil de contes célèbres m’était interdit ; je ne devais en aucun cas lire ces histoires qui contenaient des scènes et des descriptions érotiques et sensuelles !
Ce n’est qu’au début de la troisième année primaire que j’ai commencé l’apprentissage d’une langue étrangère et étrange appelée « Français ». Cette langue avait sa propre classe, son propre livre, ses propres difficultés, ses propres bizarreries. Il fallait donc prendre cela au sérieux et travailler dur si je voulais réussir. Et je le voulais ! J’ai eu du mal, beaucoup de mal à apprivoiser cet alphabet bizarre, à m’approprier ces lettres venues d’ailleurs et pouvoir les utiliser pour lire et écrire des mots, ensuite construire des phrases avec ces mots. Que de boulot ! Que de labeur ! Mon Dieu, comme cette langue est dure, difficile, incompréhensible, indomptable, insaisissable, indocile ! Et son orthographe ; un vrai casse-tête chinois ! Je n’arrivais pas à cerner toutes les difficultés, à comprendre toutes les règles, à épier chaque exception. On aurait dit que les académiciens n’avaient inventé ces règles que pour le plaisir sadique d’y ajouter ces exceptions et ces irrégularités et rire sous cape en nous voyant les yeux exorbités, la main tremblante, la plume à la main soigneusement posée sur le buvard, ne sachant comment écrire tel ou tel mot. Vous l’avez compris, cher lecteur potentiel : J’étais nul en orthographe ! Et vous parler des labyrinthes vertigineux et périlleux de la conjugaison serait un pur euphémisme. Et allez donc vous amuser, si cela vous chante et vous enchante, à résoudre les énigmes des fabuleux synonymes, antonymes, paronymes, homonymes, homophones, homographes et compagnie ! C’est à s’arracher les cheveux de la tête. Je n’arrivais pas à comprendre, par exemple, pourquoi on appelle les tiges d’un parapluie « Baleines ». Quel est donc ce lien étrange entre ces cétacés et les parapluies ? Et que vient faire « un chien » dans un fusil ? Devant ces bizarreries, je restais coi et pantois, bouche-bée, et me résignais à donner ma langue au chat en dépit de ma sainte horreur de la défaite… Vraiment, le français est une langue à s’arracher les cheveux de la tête mais elle scintille de beauté malgré ses difficultés. Et c’est ce qui fait sa singularité…Petit prétentieux imbu de sa petite personne, j’avais le toupet et l’outrecuidance d’atteindre l’excellence dans cette matière en classe et de dégoter mes petits camarades morveux et crasseux. Je pris avec imprudence la résolution de devenir le premier de ma classe en français comme je l’étais en arabe. Alors, par mégarde, j’ai négligé la langue de Sibawayh pour celle de Grevisse. Et j’ai découvert un moyen infaillible, aussi enrichissant que divertissant, pour mieux élargir mon horizon et forger mes compétences. Ce moyen magique n’était autre que la bande dessinée. Je me dois d’avouer que monsieur Astérix et son imposant compagnon et complice, le sympathique et gourmand Obélix, m’ont appris le français autant que mes maîtres d’école, même s’ils étaient loin d’être mes ancêtres les Gaulois ! Ils ne m’ont pas appris seulement les expressions et le vocabulaire ; ils m’ont également appris des valeurs et des principes dont je leur suis fort reconnaissant : Aimer farouchement sa famille, sa terre et son pays et les défendre vaillamment, avec ou sans potion magique, contre toute invasion ; Être brave et vaillant devant son adversaire même s’il est César en personne ; Être honnête, sincère et franc, gai et bon vivant ; ne craindre rien ni personne sauf que le ciel te tombe sur la tête ! Par Toutatis, ils sont fous, ces Gaulois !
Après la B.D, l’univers romanesque m’a généreusement ouvert ses portes et fenêtres. J’y suis entré pour ne plus en sortir. Que du bonheur ! Je me rappelle le premier livre que j’ai lu en Français, de A à Z, initié, motivé et encouragé par mon prof de français au collège, durant la fameuse leçon de « Lecture suivie ». Ce livre est intitulé « Naufragé volontaire » d’Alain Bombard. Est-ce grâce à cet éminent savant que je suis devenu un amoureux fou de la mer, rêvant toujours de devenir un jour un naufragé volontaire? Est-ce ce livre qui m’a donné cette envie irrésistible et cette soif inassouvie de prendre le large, défiant les flots, en quête d’aventures océaniques et d’îles au trésor ?... Ce même enseignait dont je serai toujours reconnaissant, m’a fait lire la pièce de théâtre « Le voyage de monsieur Perrichon » d’Eugène Labiche. J’aimais lire en classe les répliques de ce personnage, me forçant de trouver l’intonation juste et appropriée, ne me souciant nullement des ricanements de mes camarades qui ont cessé subitement d’être morveux et crasseux, rassurés par leur puberté et se prenant déjà pour des hommes !... Lire cette pièce, à cet âge, m’a sûrement fait aimer le théâtre, cet art que j’ai pratiqué par la suite en tant qu’acteur amateur et metteur en scène, presque toute ma vie. Monsieur Perrichon, mille et un mercis ! Je vous serai reconnaissant à vie.

Cher lecteur potentiel, je sais que mon texte commence à devenir trop long et pesant et vous prie d’être indulgent et patient et continuer la lecture de cet écrit ennuyeux et rébarbatif. Merci… Je continue :
Ce n’est qu’au lycée que les choses sérieuses ont commencé : Voici venu le temps de la lecture savante et intelligente : Étude de l’œuvre, analyse, argumentation, documentation, critique, impressions, rédaction…Quel labeur mais beaucoup de bonheur ! Des œuvres littéraires comme Germinal, Les Misérables, Les Fleurs du mal, La Répudiation, etc, me resteront toujours en mémoire. Et c’est aussi au lycée que la poésie m’a éclaboussé, m’a caressé, m’a bercé, m’a ému, m’a envoûté, m’a enivré, m’a bouleversé. Ma passion ardente pour la lecture de la poésie a débuté par un regrettable plagiat : A l’époque, l’amitié épistolaire était à la mode. On ne connaissait ni internet ni portable. On envoyait notre lettre par la poste et on attendait que le facteur sonne à notre porte. On dit qu’il sonne toujours deux fois, je ne sais pas pourquoi ! . . . Parmi mes correspondantes, innombrables et charmantes, il y avait une lycéenne algérienne que j’aimais bien. Dans une de ses lettres parfumées, elle m’a envoyé un poème qu’elle avait écrit, d’après ce qu’elle m’a affirmé. Le poème était si beau que je n’ai pas résisté à l’envie de le montrer à ma prof de Français. Dès qu’elle a lu les premiers vers, elle m’a demandé qui avait écrit ce texte. Quand j’ai expliqué qu’il m’avait été envoyé par ma correspondante d’Algérie. Elle m’a dit en souriant : « Ton amie Algérienne s’appelle-t-elle Verlaine ? » Voyant mon regard interrogateur, elle m’a expliqué que le poème en question était celui d’un grand poète français appelé Paul Verlaine, que mon amie m’était qu’une petite voleuse de vers et que ce délit s’appelait en français « Plagiat »… Le lendemain matin, elle m’a apporté la preuve de son accusation ; le recueil « Poème saturniens » où figurait le poème plagié. J’y ai plongé et j’ai découvert des merveilles. Alors, j’ai eu ce désir si fort de flirter avec les Muses. Ma prof me corrigeait mes première vers de poète en herbe, m’orientait, m’initiait à l’écriture poétique… Grâce à ma prof de français, je suis devenu féru de poésie tout en prétendant être un petit poète sans pour autant avoir la grosse tête ! Pour moi, écrire un poème est une fête ! Merci, madame Rose Protzel ! Vous voyez, après toutes ces longues années, je retiens encore votre nom, moi qui oublie facilement ce que j’ai fait hier. Cela veut dire tout simplement que je vous en suis éternellement reconnaissant ! Cependant, je pense qu’il est trop tard pour vous avouer que j’étais amoureux de vous en secret et que j’avais du mal à guérir de cette étrange maladie !

Cher lecteur potentiel, permettez-moi de vous qualifier de « complice » comme l’a fait Baudelaire et laissez-moi me confesser :
Lire, quel plaisir ! Quelle euphorie ! Quelle féerie ! Dès que je pénètre l’univers imaginaire d’un auteur, je fais des voyages extraordinaires dans l’espace et dans le temps, je fais de fabuleuses aventures. Je m’identifie aux personnages, je les vois et les entends. Je vois les lieux, les êtres et les choses. Je vois tout dans ma tête. J’oublie mon monde réel, j’oublie mes soucis et mes ennuis, je m’oublie. Lire me soigne et me guérit, lire me soulage et m’adoucit, lire m’enseigne et m’assagit, lire me lave et me purifie, lire me libère et m’affranchit. En lisant, je vois mieux, je constate mieux, je pense mieux, je raisonne mieux, j’analyse mieux, je comprends mieux les hommes, le monde et la vie. En lisant, j’émerge de ma candeur et de ma torpeur, je me libère de mes idées préconçues et de mes arrière-pensées vermoulues, je secoue mes certitudes et mes illusions et me pose des questions, je mets en question mes principes et mes valeurs, je questionne mes croyances et mes utopies, je doute, je me fais face, je m’interroge, je me juge, je me jauge, je me corrige, je me gronde, je me critique, je prends de nouvelles résolutions, je me fais des promesses. Parfois, je m’y attache et m’y accroche comme à une bouée de secours. Parfois, je les oublie dès le lendemain matin. Que voulez-vous, cher lecteur potentiel, personne n’est parfait !
Comment oublier toutes ces nuits blanches passées avec un de mes auteurs préférés, dans la quiétude et la sérénité de la nuit, dans le calme et le silence, dans la paix et la tranquillité ? Je lisais, plongé dans mon livre, oubliant tout. Seul l’appel du muezzin m’arrachait à ma lecture, me faisant revenir au monde réel. Quel régal ! Et comme la grâce et grasse matinée était douce après cette nuit magique et enchanteresse !
Comment oublier tous ces auteurs qui sont entrés dans ma vie grâce à leurs livres, qui sont devenus familiers, intimes, aimés, adorés, vénérés ? Sans me connaître, sans m’avoir jamais vu, ils m’ont tant donné, tant appris, tant aidé, tant dirigé, tant guidé dans ma vie. Je me demande comment serait ma vie, ma façon d’être, mon comportement, sans leur influence. Aurais-je la même vie ? Serais-je la même personne ? Sûrement pas ! Chaque livre que je lis laisse en moi son empreinte. Je ne sors jamais indemne de la lecture d’un livre. Si un livre ne change rien en moi, c’est comme si je ne l’avais pas lu !... Chaque livre que je lis est une fenêtre ouverte sur le vaste monde. Chaque livre est une bougie qui illumine ma nuit et guide mes pas vers la lumière. Chaque livre est une main qui me prend la main et m’entraîne vers demain. Chaque livre est une brise qui chasse la torpeur et me donne de la fraîcheur. Chaque livre est une fée qui effraie les démons et chasse ma peur. Chaque livre est une expérience de vie, une philosophie, un savoir qui m’assagit. Chaque livre est un conseiller, un maître, un guide, un phare, un complice, un pont, une passerelle, un ami. Chaque livre est un coffre-fort, un réservoir, un silo, un répertoire, un patrimoine. Chaque livre est un trésor !
C’est pour toutes ces raisons et pour d’autres raisons encore, cher lecteur potentiel, que j’adore les livres. J’aime les regarder, les admirer et je ne peux résister à la tentation de les toucher et de caresser leur couverture. J’adore lire la quatrième de couverture, fermer les yeux et tenter de deviner le contenu et imaginer l’histoire. Je fais souvent ce jeu amusant : J’ouvre le livre au hasard, je palpe le papier en humant son odeur et je lis quelques lignes. Après, je décide de lire le livre ou non… Pour moi, le livre n’est guère un objet quelconque, vulgaire, terre à terre. Je n’aime pas qu’on le plie, qu’on le froisse, qu’on le salisse, qu’on le maltraite. Le livre est précieux ; c’est un bijou, un joyau! Déchirer un livre ou le brûler est un crime !
Et cet objet si précieux, il faut le protéger et le sauvegarder parce qu’il est menacé de disparition dans ce monde devenu trop « moderne ». Et pour qu’il perdure, il est urgent de le faire aimer aux enfants. C’est le plus beau cadeau que l’on puisse leur offrir. Il est cette lampe qui illuminera leur vie et les mènera vers un lendemain meilleur. Il est l’unique moyen de défense, l’unique arme pour combattre les ténèbres. Il les sauvera de l’ignorance et de la barbarie, de l’ignominie et de la sauvagerie, de la haine et de la cruauté, de la violence et de la méchanceté, de la démence et de l’absurdité. Il les rendra intelligents, policés, instruits, civilisés, altruistes, tolérants, fraternels, humains. Le livre est notre bouée de secours, notre issue de secours, notre arche de Noé, notre sauveur bienfaiteur !
En guise de conclusion, moi qui aime tant les maximes et les citations, je ne peux trouver mieux que ces vers du grand poète / philosophe Victor Hugo :

Dieu, le premier auteur de tout ce qu’on écrit
A mis, sur cette terre oĂą les hommes sont ivres,
Les ailes de l’esprit dans les pages des livres.
Tout homme ouvrant un livre y trouve une aile et peut
Planer là-haut où l’âme en liberté se meut
Donc au petit enfant donnez le petit livre.
Marchez, la lampe en main, pour qu’il puisse vous suivre.

Cher lecteur potentiel, j’espère que vous avez eu la patience de lire ce texte jusqu’à la fin et que vous l’avez lu avec la même jubilation que celle avec laquelle je l’ai écrit ; moi votre humble serviteur. Sinon, vous avez tout le loisir de le jeter à la poubelle. Mais cherchez un autre texte à lire ! L’important, c’est de lire ! Lisez, m’arrêtez jamais de lire !... A bon entendeur…

Agadir, le 17/5/2016
Mostafa Houmir




----------------
Ma vie n'est plus une barque dans une mer enragée
Et je ne suis plus le naufragé!
...............................................................................................
Mostafa, point fat, seul, las, si doux, rĂŞvant de sa mie!!!

Ougounnine
Envoyé le :  24/5/2016 9:58
Plume d'or
Inscrit le: 11/6/2009
De: Maroc
Envois: 563
Re: Lire
Un très bel hommage à nos parents, nos maîtres et professeurs qui nous ont forgés. Un très beau texte, d'une grande profondeur et d'une sincérité très touchante. Bravo cher ami !



----------------
Pouvoir, c'est vouloir

Ogr3
Envoyé le :  26/5/2016 8:56
Plume de platine
Inscrit le: 25/4/2016
De: Voie Lactée, Terre, parfois Lune
Envois: 8832
Re: Lire
Bon jour Mostafa,
J'ai lu avec le plus grand intérêt ce parcours qui a vu naître ce professeur, cet "oustad" amoureux des mots et de ses racines... Quel cheminement ! quelle soif d'apprendre ! quelle volonté !
Je ressens dans tes différents écrits, la force de ta liberté d'expression et ton abnégation à positiver l'avenir, car la fatalité n'existe pas pour toi cher Mostapha !
Mon amitié, Marc
Par conversation | Les + récents en premier Sujet précédent | Sujet suivant |

Enregistrez-vous pour poster